- L’empathie et la compassion comme un fil d'or du soin. Revue Hypnose et Thérapies Brèves 77.
- Honte et brûlures du coup. Hors-Série 19 de la Revue Hypnose & Thérapies Brèves.
- Maux de tête et désir de perfection. HS 19 de la Revue Hypnose et Thérapies Brèves.
- Le pouvoir de l'eczéma. HS 19 de la Revue Hypnose et Thérapies Brèves.
Brainspotting : quand le regard ouvre la voie à la guérison
« Les yeux sont la fenêtre de votre âme. » Cette phrase de Shakespeare pourrait résumer l’essence du Brainspotting (BSP), une approche thérapeutique innovante née presque par hasard, mais qui transforme aujourd’hui la manière dont nous travaillons avec les mémoires traumatiques.
À l’origine, David Grand, psychothérapeute new-yorkais, cherchait à aider ses patients à retraiter des chocs sévères — victimes du 11 septembre, de l’ouragan Katrina, vétérans de guerre. En affinant sa pratique de l’EMDR, il observe qu’un point précis dans le champ visuel déclenche chez certains patients des réactions corporelles subtiles, mais profondes. En fixant ce point, souvenirs, sensations et émotions se mettent en mouvement. Le Brainspotting était né.
Le regard qui change tout.
La devise du BSP est simple : « La direction de votre regard influence la façon dont vous vous sentez. »
En pratique, il s’agit de repérer ce brainspot — un point dans l’espace qui agit comme une porte d’accès vers une mémoire enfouie. Le patient y fixe son attention tout en observant ce qui émerge, sans rien forcer.
Cette technique engage le corps et l’esprit dans un processus d’autoguérison. Le thérapeute, en posture de présence active, accompagne avec une attention flottante, proche de celle utilisée en hypnose.
Jean, au bord de la mort.
Jean, la cinquantaine, vient consulter après un accident ischémique transitoire. Son discours est rassurant : « Ça va aller, on va s’en sortir. » Son corps, lui, dit tout autre chose : souffle court, dos voûté, épaules fermées.
Plutôt que de le confronter, je l’invite à rester avec ses sensations. Rapidement, son regard se fixe sur un point précis derrière moi : un gazespot. Ce point devient l’ancrage du travail. Jean entre dans un état de pleine conscience ciblée, un pied dans le souvenir traumatique, un pied dans l’instant présent.
Ici, pas de protocole rigide. Le thérapeute se place dans la « queue de la comète » du processus : c’est le patient qui mène, le praticien qui suit.
L’accordage, cœur battant du processus.
L’une des forces du BSP réside dans le double accordage :
1. Accordage du patient à lui-même (corps et cerveau).
2. Accordage thérapeute-patient.
Comme une mère qui se synchronise aux signaux de son bébé, le praticien se met sur la même longueur d’onde que le patient. Par effet miroir, le cerveau du patient utilise cette régulation externe pour trouver sa propre stabilité interne.
À cette double syntonie s’ajoute un troisième accordage : celui du thérapeute avec lui-même, attentif à ses propres ressentis. C’est un art subtil, où l’outil principal reste la présence.
Le principe d’incertitude.
Contrairement à d’autres approches stratégiques, le BSP n’impose pas de direction préétablie. David Grand insiste : « S’il n’y a pas d’incertitude, il n’y a pas d’accordage. »
Le thérapeute ne sait pas à l’avance où la séance va mener. Cette ouverture permet au patient de suivre son propre rythme et de mobiliser ses ressources intérieures. La relation devient un espace de co-création thérapeutique, où intuition et créativité peuvent s’exprimer.
Ressources et dissociation positive.
Lorsqu’un patient risque de sortir de sa fenêtre de tolérance, le BSP propose de travailler sur un point ressource : un endroit du champ visuel où la sensation de sécurité et d’ancrage est maximale.
Sur ce point, il est possible de rester connecté à la fois à la ressource et au trauma, créant ainsi un espace sûr pour retraiter l’expérience. Cette approche est particulièrement adaptée aux patients présentant des troubles de l’attachement, des traumas précoces ou complexes, et des états dissociatifs.
Dans un travail avec Jean, une part émotionnelle plus jeune émerge. Grâce au point ressource, il peut rester ancré dans son adulte tout en donnant voix à cette part blessée. Le BSP utilise alors la dissociation non comme un obstacle, mais comme un mécanisme intelligent au service de la guérison.
Une approche intégrative et créative.
Le Brainspotting n’est pas exclusif : il s’intègre à la psychanalyse, à l’hypnose, aux TCC, ou encore à l’Internal Family System. Dans ma pratique, je combine BSP Ressource, respiration, ancrage, visualisation et figures ressources, en m’appuyant sur la théorie polyvagale.
La méthode est simple dans sa mise en œuvre, mais profonde dans ses effets. Elle requiert du thérapeute une posture de savoir-être plus que de savoir-faire, un engagement dans la présence et la curiosité plutôt que dans le contrôle.
Au-delà du trauma.
Le BSP ne se limite pas au traitement des blessures psychiques. Il existe des variantes pour améliorer les performances sportives, créatives ou artistiques, pour développer l’intuition ou même la dimension spirituelle.
Mais au cœur de tout, il y a cette conviction : le cerveau sait se réparer. Le rôle du thérapeute est d’offrir les conditions qui permettent à cette intelligence naturelle de se déployer.
Réparer les cerveaux, réaccorder les vies.
Voir un patient passer de l’effondrement à la réconciliation avec lui-même, ressentir dans la pièce ce moment où l’énergie cesse d’entretenir la dissociation pour nourrir l’unité… c’est là que le Brainspotting prend tout son sens.
Chaque regard fixé, chaque silence habité devient une porte vers la transformation. Et dans cet espace, thérapeute et patient avancent ensemble, à l’écoute de l’imprévu, confiants dans ce que l’esprit humain a de plus puissant : sa capacité à guérir.
Crédit Photo © Xavier Montoy
Un article qui aurait fait plaisir à notre regretté confrère Bernard MAYER, spécialiste du Brainspotting, avec qui nous avions étudié il y a plus de 20 ans déjà, l'IMO Intégration par les Mouvements Oculaires en Thérapie, et qui a d'ailleurs donné naissance de ma part à la thérapie EMDR - IMO.
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Cette formation vous permettra d’intégrer cet outil avec les outils thérapeutiques que vous utilisez déjà en pratique clinique.
Alors, rendez-vous à Paris, Marseille, Bordeaux, Annecy, Nancy, Strasbourg, Lausanne et Genève, avec des instituts membres de la CFHTB, pour une formation en EMDR INTEGRATIVE.
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À l’origine, David Grand, psychothérapeute new-yorkais, cherchait à aider ses patients à retraiter des chocs sévères — victimes du 11 septembre, de l’ouragan Katrina, vétérans de guerre. En affinant sa pratique de l’EMDR, il observe qu’un point précis dans le champ visuel déclenche chez certains patients des réactions corporelles subtiles, mais profondes. En fixant ce point, souvenirs, sensations et émotions se mettent en mouvement. Le Brainspotting était né.
Le regard qui change tout.
La devise du BSP est simple : « La direction de votre regard influence la façon dont vous vous sentez. »
En pratique, il s’agit de repérer ce brainspot — un point dans l’espace qui agit comme une porte d’accès vers une mémoire enfouie. Le patient y fixe son attention tout en observant ce qui émerge, sans rien forcer.
Cette technique engage le corps et l’esprit dans un processus d’autoguérison. Le thérapeute, en posture de présence active, accompagne avec une attention flottante, proche de celle utilisée en hypnose.
Jean, au bord de la mort.
Jean, la cinquantaine, vient consulter après un accident ischémique transitoire. Son discours est rassurant : « Ça va aller, on va s’en sortir. » Son corps, lui, dit tout autre chose : souffle court, dos voûté, épaules fermées.
Plutôt que de le confronter, je l’invite à rester avec ses sensations. Rapidement, son regard se fixe sur un point précis derrière moi : un gazespot. Ce point devient l’ancrage du travail. Jean entre dans un état de pleine conscience ciblée, un pied dans le souvenir traumatique, un pied dans l’instant présent.
Ici, pas de protocole rigide. Le thérapeute se place dans la « queue de la comète » du processus : c’est le patient qui mène, le praticien qui suit.
L’accordage, cœur battant du processus.
L’une des forces du BSP réside dans le double accordage :
1. Accordage du patient à lui-même (corps et cerveau).
2. Accordage thérapeute-patient.
Comme une mère qui se synchronise aux signaux de son bébé, le praticien se met sur la même longueur d’onde que le patient. Par effet miroir, le cerveau du patient utilise cette régulation externe pour trouver sa propre stabilité interne.
À cette double syntonie s’ajoute un troisième accordage : celui du thérapeute avec lui-même, attentif à ses propres ressentis. C’est un art subtil, où l’outil principal reste la présence.
Le principe d’incertitude.
Contrairement à d’autres approches stratégiques, le BSP n’impose pas de direction préétablie. David Grand insiste : « S’il n’y a pas d’incertitude, il n’y a pas d’accordage. »
Le thérapeute ne sait pas à l’avance où la séance va mener. Cette ouverture permet au patient de suivre son propre rythme et de mobiliser ses ressources intérieures. La relation devient un espace de co-création thérapeutique, où intuition et créativité peuvent s’exprimer.
Ressources et dissociation positive.
Lorsqu’un patient risque de sortir de sa fenêtre de tolérance, le BSP propose de travailler sur un point ressource : un endroit du champ visuel où la sensation de sécurité et d’ancrage est maximale.
Sur ce point, il est possible de rester connecté à la fois à la ressource et au trauma, créant ainsi un espace sûr pour retraiter l’expérience. Cette approche est particulièrement adaptée aux patients présentant des troubles de l’attachement, des traumas précoces ou complexes, et des états dissociatifs.
Dans un travail avec Jean, une part émotionnelle plus jeune émerge. Grâce au point ressource, il peut rester ancré dans son adulte tout en donnant voix à cette part blessée. Le BSP utilise alors la dissociation non comme un obstacle, mais comme un mécanisme intelligent au service de la guérison.
Une approche intégrative et créative.
Le Brainspotting n’est pas exclusif : il s’intègre à la psychanalyse, à l’hypnose, aux TCC, ou encore à l’Internal Family System. Dans ma pratique, je combine BSP Ressource, respiration, ancrage, visualisation et figures ressources, en m’appuyant sur la théorie polyvagale.
La méthode est simple dans sa mise en œuvre, mais profonde dans ses effets. Elle requiert du thérapeute une posture de savoir-être plus que de savoir-faire, un engagement dans la présence et la curiosité plutôt que dans le contrôle.
Au-delà du trauma.
Le BSP ne se limite pas au traitement des blessures psychiques. Il existe des variantes pour améliorer les performances sportives, créatives ou artistiques, pour développer l’intuition ou même la dimension spirituelle.
Mais au cœur de tout, il y a cette conviction : le cerveau sait se réparer. Le rôle du thérapeute est d’offrir les conditions qui permettent à cette intelligence naturelle de se déployer.
Réparer les cerveaux, réaccorder les vies.
Voir un patient passer de l’effondrement à la réconciliation avec lui-même, ressentir dans la pièce ce moment où l’énergie cesse d’entretenir la dissociation pour nourrir l’unité… c’est là que le Brainspotting prend tout son sens.
Chaque regard fixé, chaque silence habité devient une porte vers la transformation. Et dans cet espace, thérapeute et patient avancent ensemble, à l’écoute de l’imprévu, confiants dans ce que l’esprit humain a de plus puissant : sa capacité à guérir.
Crédit Photo © Xavier Montoy
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Trouble dissociatif de l’identité : quand la multiplicité devient ressource.
Notes de lecture d'EMDR.FR pour les formations, un article de Nicolas D'INCA
Psychologue clinicien, hypnothérapeute. Méditant de pleine présence pendant vingt ans, aujourd’hui orienté sur la pratique des états modifiés de conscience, notamment la transe chamanique. Passionné des formes de guérison alternatives, étudie les cultures traditionnelles et spirituelles du monde pour aller vers une thérapie intégrative.
"Nous sommes une personne multiple." Ainsi se présente Moira, patiente diagnostiquée avec un Trouble dissociatif de l’identité (TDI). Derrière ces mots, un univers complexe s’ouvre : celui d’un esprit habité par plusieurs identités, chacune porteuse d’une histoire, de fonctions, et parfois… d’une mission protectrice.
Cet article propose une plongée au cœur du TDI, entre compréhension clinique et résonances interculturelles, pour interroger nos pratiques et envisager de nouvelles perspectives thérapeutiques.
Du diagnostic à la réalité vécue
Le TDI est un trouble dissociatif complexe, encore trop souvent méconnu ou mal diagnostiqué. Il se caractérise par la présence d’états du soi alternants — ou alters — qui prennent, à différents moments, le contrôle de la conscience et du comportement. Chacun possède son propre vécu, ses émotions, ses souvenirs… et parfois une vision radicalement différente du monde.
Loin de la caricature des « personnalités multiples » popularisée par la fiction, le TDI est avant tout une stratégie adaptative. Comme le rappelle la psychotraumatologie, il naît souvent dans l’enfance, lorsque l’intégration de l’identité est rendue impossible par des expériences traumatiques répétées.
Et si nous étions tous un ensemble d’esprits ?
Dans les cultures occidentales, cette multiplicité est envisagée sous l’angle pathologique. Mais ailleurs, elle est parfois perçue comme naturelle, voire valorisée. Les traditions chamaniques, par exemple, voient l’être humain comme un ensemble d’esprits. Passer d’un état de conscience à un autre, « devenir autre », voyager vers des mondes invisibles pour en rapporter savoirs et guérison : autant de pratiques dissociatives… mais choisies, ritualisées et bénéfiques.
Cette perspective change notre regard : et si certaines formes de dissociation pouvaient devenir un levier thérapeutique plutôt qu’un symptôme à éradiquer ?
Moira et son “système”
Moira, 30 ans, vit avec un TDI avéré. Elle connaît et nomme ses alters : Rage, protectrice méfiante ; Eric, figure rationnelle ; Julia, part dépressive ; Absalem, persécuteur interne… Chaque alter a son âge, son sexe, ses émotions, ses souvenirs et même son timbre de voix.
« Nous sommes un système de huit personnes… et notre multiplicité n’est pas le problème principal », affirme Rage.
Ici, le terme de système prend tout son sens : il désigne l’ensemble des parts dissociées, chacune ayant un rôle dans la survie psychique. La priorité, pour Moira, n’est pas de fusionner en une personnalité unique, mais de trouver un fonctionnement harmonieux.
Co-conscience, communication, coopération
Face à un patient TDI, la posture thérapeutique se redéfinit. Il ne s’agit pas de « restaurer l’unité » coûte que coûte, mais de reconnaître chaque alter comme une partie légitime du tout.
Trois axes guident ce travail :
• Co-conscience : permettre aux parts de se savoir mutuellement présentes.
• Communication : favoriser les échanges internes.
• Coopération : développer une organisation où chaque part trouve sa place.
Cette approche suppose une confiance dans la santé intrinsèque des patients dissociés et une absence de jugement sur leurs modes d’adaptation.
L’inner : une maison intérieure
Pour Moira, l’espace psychique commun — ou inner — prend la forme d’un Dôme. Chaque alter y possède sa chambre, à son image. Des espaces communs permettent de partager souvenirs et émotions, à un moment choisi.
Cette métaphore architecturale, loin d’être un simple outil imaginaire, offre un cadre concret à la régulation interne. Elle évite l’intrusion psychique et favorise la coopération. Les outils numériques comme Simply Plural ou Antar prolongent ce travail, permettant à chaque part de s’exprimer par écrit.
Accueillir toutes les parts
En séance, l’attention se déplace au gré des switchs. Aujourd’hui, c’est Vanille, 8 ans, qui parle ; demain, Eric ou Renard, part animale silencieuse. Chacun mérite accueil, curiosité et respect.
Même les parts les plus difficiles — comme Absalem, au discours menaçant — peuvent être entendues. Le thérapeute les considère comme des protecteurs extrêmes, porteurs d’un sens dans l’économie globale du système.
Changer notre regard sur la dissociation
Le TDI est une pathologie… mais aussi une œuvre d’adaptation créative. En divisant la charge traumatique, il permet à la personne de continuer à vivre, même dans des conditions extrêmes.
En tant que professionnels, nous savons déjà voyager entre différents états de conscience grâce à l’hypnose. Nous pouvons donc offrir un cadre où les capacités dissociatives — lorsqu’elles sont sécurisées et orientées — deviennent des ressources.
Vers une clinique intégrative
L’avenir du soin en santé mentale pourrait s’inspirer de cette vision élargie. Plutôt que de voir la dissociation comme un ennemi, nous pourrions l’intégrer dans une stratégie thérapeutique :
• reconnaître chaque part comme un interlocuteur légitime ;
• offrir un espace sécurisé pour leur expression ;
• travailler à une régulation collective plutôt qu’à une fusion forcée.
Car au fond, la multiplicité n’est peut-être pas l’obstacle… mais un chemin vers la guérison.
Crédit Photo © Xavier Montoy
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Du diagnostic à la réalité vécue
Le TDI est un trouble dissociatif complexe, encore trop souvent méconnu ou mal diagnostiqué. Il se caractérise par la présence d’états du soi alternants — ou alters — qui prennent, à différents moments, le contrôle de la conscience et du comportement. Chacun possède son propre vécu, ses émotions, ses souvenirs… et parfois une vision radicalement différente du monde.
Loin de la caricature des « personnalités multiples » popularisée par la fiction, le TDI est avant tout une stratégie adaptative. Comme le rappelle la psychotraumatologie, il naît souvent dans l’enfance, lorsque l’intégration de l’identité est rendue impossible par des expériences traumatiques répétées.
Et si nous étions tous un ensemble d’esprits ?
Dans les cultures occidentales, cette multiplicité est envisagée sous l’angle pathologique. Mais ailleurs, elle est parfois perçue comme naturelle, voire valorisée. Les traditions chamaniques, par exemple, voient l’être humain comme un ensemble d’esprits. Passer d’un état de conscience à un autre, « devenir autre », voyager vers des mondes invisibles pour en rapporter savoirs et guérison : autant de pratiques dissociatives… mais choisies, ritualisées et bénéfiques.
Cette perspective change notre regard : et si certaines formes de dissociation pouvaient devenir un levier thérapeutique plutôt qu’un symptôme à éradiquer ?
Moira et son “système”
Moira, 30 ans, vit avec un TDI avéré. Elle connaît et nomme ses alters : Rage, protectrice méfiante ; Eric, figure rationnelle ; Julia, part dépressive ; Absalem, persécuteur interne… Chaque alter a son âge, son sexe, ses émotions, ses souvenirs et même son timbre de voix.
« Nous sommes un système de huit personnes… et notre multiplicité n’est pas le problème principal », affirme Rage.
Ici, le terme de système prend tout son sens : il désigne l’ensemble des parts dissociées, chacune ayant un rôle dans la survie psychique. La priorité, pour Moira, n’est pas de fusionner en une personnalité unique, mais de trouver un fonctionnement harmonieux.
Co-conscience, communication, coopération
Face à un patient TDI, la posture thérapeutique se redéfinit. Il ne s’agit pas de « restaurer l’unité » coûte que coûte, mais de reconnaître chaque alter comme une partie légitime du tout.
Trois axes guident ce travail :
• Co-conscience : permettre aux parts de se savoir mutuellement présentes.
• Communication : favoriser les échanges internes.
• Coopération : développer une organisation où chaque part trouve sa place.
Cette approche suppose une confiance dans la santé intrinsèque des patients dissociés et une absence de jugement sur leurs modes d’adaptation.
L’inner : une maison intérieure
Pour Moira, l’espace psychique commun — ou inner — prend la forme d’un Dôme. Chaque alter y possède sa chambre, à son image. Des espaces communs permettent de partager souvenirs et émotions, à un moment choisi.
Cette métaphore architecturale, loin d’être un simple outil imaginaire, offre un cadre concret à la régulation interne. Elle évite l’intrusion psychique et favorise la coopération. Les outils numériques comme Simply Plural ou Antar prolongent ce travail, permettant à chaque part de s’exprimer par écrit.
Accueillir toutes les parts
En séance, l’attention se déplace au gré des switchs. Aujourd’hui, c’est Vanille, 8 ans, qui parle ; demain, Eric ou Renard, part animale silencieuse. Chacun mérite accueil, curiosité et respect.
Même les parts les plus difficiles — comme Absalem, au discours menaçant — peuvent être entendues. Le thérapeute les considère comme des protecteurs extrêmes, porteurs d’un sens dans l’économie globale du système.
Changer notre regard sur la dissociation
Le TDI est une pathologie… mais aussi une œuvre d’adaptation créative. En divisant la charge traumatique, il permet à la personne de continuer à vivre, même dans des conditions extrêmes.
En tant que professionnels, nous savons déjà voyager entre différents états de conscience grâce à l’hypnose. Nous pouvons donc offrir un cadre où les capacités dissociatives — lorsqu’elles sont sécurisées et orientées — deviennent des ressources.
Vers une clinique intégrative
L’avenir du soin en santé mentale pourrait s’inspirer de cette vision élargie. Plutôt que de voir la dissociation comme un ennemi, nous pourrions l’intégrer dans une stratégie thérapeutique :
• reconnaître chaque part comme un interlocuteur légitime ;
• offrir un espace sécurisé pour leur expression ;
• travailler à une régulation collective plutôt qu’à une fusion forcée.
Car au fond, la multiplicité n’est peut-être pas l’obstacle… mais un chemin vers la guérison.
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Théorie Polyvagale et scénarios réparateurs : revisiter le trauma pour réparer le lien.
Notes de lecture d'EMDR.FR pour la formation, article d'Evelyne JOSSE, psychologue, psychotraumatologue, hypnothérapeute, chargée de cours à l’université de Metz (UL) et à l’Université Libre de Bruxelles (ULB). Elle a fondé le DIU en hypnose à l’ULB et à l’UL.
Dans le cabinet, la lumière est douce. Le patient ferme les yeux, guidé par la voix du thérapeute. Un instant, il retourne là où tout a commencé : la scène de l’événement qui a laissé une empreinte indélébile. Mais cette fois, il n’est pas seul. Ce voyage, inspiré de la théorie polyvagale et des recherches sur la reconsolidation de la mémoire, porte un nom : le scénario réparateur.
Le système nerveux, chef d’orchestre invisible
Pour comprendre la portée de cette méthode, il faut remonter aux bases : le système nerveux autonome. Longtemps décrit comme un duel entre le sympathique (mobilisation) et le parasympathique (repos), il s’avère plus subtil. Les travaux de Stephen Porges révèlent deux branches du parasympathique : ventrale (connexion, sécurité) et dorsale (retrait, figement).
Dans un état de sécurité — mode ventral —, l’individu dispose de ses ressources cognitives, émotionnelles et sociales. Face au danger, le sympathique prend le relais : combattre ou fuir. Mais quand la menace devient écrasante, la branche dorsale coupe tout : ralentissement cardiaque, anesthésie émotionnelle, dissociation.
« On ne saute pas du ventral au dorsal sans passer par le sympathique. »
Cette hiérarchie, visualisée comme une pyramide inversée, guide le thérapeute dans la manière d’accompagner la sortie d’un état figé vers la sécurité.
Réécrire le souvenir, ne pas le nier
Les neurosciences confirment qu’un souvenir se modifie chaque fois qu’il est réactivé. C’est la reconsolidation : une fenêtre de quelques minutes où il est possible de l’actualiser, de l’associer à de nouvelles ressources, avant qu’il ne se fixe à nouveau.
Le scénario réparateur utilise cette fenêtre : replacer le patient dans la scène douloureuse, lui permettre d’y introduire ce qui lui a manqué — protection, soutien, moyens d’action — afin de réduire la charge émotionnelle sans effacer la mémoire de l’événement.
Dissociation et parties en dialogue
La méthode s’appuie aussi sur le modèle de la dissociation structurelle :
• PE : la partie émotionnelle, bloquée dans l’événement, saturée de sensations et d’émotions.
• PAN : la partie apparemment normale, fonctionnelle au quotidien.
L’enjeu est de reconnecter ces parties, de sortir la PE du figement et de la panique, et de réactiver les ressources de la PAN.
Remonter l’échelle polyvagale
L’exposition directe au souvenir n’est pas toujours possible. Le thérapeute ajuste le rythme, utilise métaphores et histoires, et reste attentif aux signes de débordement émotionnel ou de dissociation. Les émotions dominantes orientent l’intervention :
• Colère / culpabilité → besoin d’action ou de défense.
• Peur → besoin de protection.
• Honte → besoin de dignité et de reconnaissance.
Chaque étape vise à faire gravir au patient les trois échelons :
1. Sécurité physique (sortir du danger).
2. Contrôle (passer du dorsal au sympathique).
3. Sécurité affective (activer le ventral).
4. Sens (restructuration cognitive).
Quand l’imaginaire devient refuge
Prenons le cas d’Isabelle, 5 ans au moment des faits, victime d’inceste paternel. Dans la scène réparatrice :
• Un père de substitution ligote l’agresseur (sécurité physique).
• L’Isabelle adulte prend l’enfant dans ses bras (sécurité affective).
• La fillette donne des coups de pied au père ligoté (contrôle).
• La police emmène l’agresseur.
• Les figures protectrices emmènent l’enfant en promenade, jusqu’à un lieu sûr, ponctué de rires et d’histoires (mode ventral).
À la fin, l’enfant annonce vouloir devenir « Lisa » — son nom d’adulte. Elle s’est approprié un modèle interne sécurisant : elle-même, en version protectrice.
Le rôle actif du thérapeute
Si les solutions les plus puissantes viennent du patient, le thérapeute n’hésite pas à guider. Poser des questions ouvertes — « De quoi as-tu besoin pour te protéger ? » — favorise l’émergence des ressources. Mais face à une dissociation massive, il peut être directif : prendre les rênes pour éviter la dérive vers l’impuissance.
Tout au long de la séance, il veille à rester dans la fenêtre de tolérance. En hyperactivation (débordement émotionnel) ou hypoactivation (retrait), le travail s’interrompt pour revenir à une régulation optimale.
Bien plus qu’une technique : une réparation incarnée
L’efficacité des scénarios réparateurs tient à leur structure :
• Brève réactivation du souvenir.
• Injection de ressources absentes au moment des faits.
• Progression guidée sur l’échelle polyvagale.
Le patient ne nie pas son passé : il le traverse avec ses forces actuelles. L’image finale, imprégnée d’attachement sécure, devient tuteur de résilience et point d’ancrage intérieur.
« Revisiter le passé, oui. Mais cette fois, avec toutes les armes pour le traverser. »
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Le système nerveux, chef d’orchestre invisible
Pour comprendre la portée de cette méthode, il faut remonter aux bases : le système nerveux autonome. Longtemps décrit comme un duel entre le sympathique (mobilisation) et le parasympathique (repos), il s’avère plus subtil. Les travaux de Stephen Porges révèlent deux branches du parasympathique : ventrale (connexion, sécurité) et dorsale (retrait, figement).
Dans un état de sécurité — mode ventral —, l’individu dispose de ses ressources cognitives, émotionnelles et sociales. Face au danger, le sympathique prend le relais : combattre ou fuir. Mais quand la menace devient écrasante, la branche dorsale coupe tout : ralentissement cardiaque, anesthésie émotionnelle, dissociation.
« On ne saute pas du ventral au dorsal sans passer par le sympathique. »
Cette hiérarchie, visualisée comme une pyramide inversée, guide le thérapeute dans la manière d’accompagner la sortie d’un état figé vers la sécurité.
Réécrire le souvenir, ne pas le nier
Les neurosciences confirment qu’un souvenir se modifie chaque fois qu’il est réactivé. C’est la reconsolidation : une fenêtre de quelques minutes où il est possible de l’actualiser, de l’associer à de nouvelles ressources, avant qu’il ne se fixe à nouveau.
Le scénario réparateur utilise cette fenêtre : replacer le patient dans la scène douloureuse, lui permettre d’y introduire ce qui lui a manqué — protection, soutien, moyens d’action — afin de réduire la charge émotionnelle sans effacer la mémoire de l’événement.
Dissociation et parties en dialogue
La méthode s’appuie aussi sur le modèle de la dissociation structurelle :
• PE : la partie émotionnelle, bloquée dans l’événement, saturée de sensations et d’émotions.
• PAN : la partie apparemment normale, fonctionnelle au quotidien.
L’enjeu est de reconnecter ces parties, de sortir la PE du figement et de la panique, et de réactiver les ressources de la PAN.
Remonter l’échelle polyvagale
L’exposition directe au souvenir n’est pas toujours possible. Le thérapeute ajuste le rythme, utilise métaphores et histoires, et reste attentif aux signes de débordement émotionnel ou de dissociation. Les émotions dominantes orientent l’intervention :
• Colère / culpabilité → besoin d’action ou de défense.
• Peur → besoin de protection.
• Honte → besoin de dignité et de reconnaissance.
Chaque étape vise à faire gravir au patient les trois échelons :
1. Sécurité physique (sortir du danger).
2. Contrôle (passer du dorsal au sympathique).
3. Sécurité affective (activer le ventral).
4. Sens (restructuration cognitive).
Quand l’imaginaire devient refuge
Prenons le cas d’Isabelle, 5 ans au moment des faits, victime d’inceste paternel. Dans la scène réparatrice :
• Un père de substitution ligote l’agresseur (sécurité physique).
• L’Isabelle adulte prend l’enfant dans ses bras (sécurité affective).
• La fillette donne des coups de pied au père ligoté (contrôle).
• La police emmène l’agresseur.
• Les figures protectrices emmènent l’enfant en promenade, jusqu’à un lieu sûr, ponctué de rires et d’histoires (mode ventral).
À la fin, l’enfant annonce vouloir devenir « Lisa » — son nom d’adulte. Elle s’est approprié un modèle interne sécurisant : elle-même, en version protectrice.
Le rôle actif du thérapeute
Si les solutions les plus puissantes viennent du patient, le thérapeute n’hésite pas à guider. Poser des questions ouvertes — « De quoi as-tu besoin pour te protéger ? » — favorise l’émergence des ressources. Mais face à une dissociation massive, il peut être directif : prendre les rênes pour éviter la dérive vers l’impuissance.
Tout au long de la séance, il veille à rester dans la fenêtre de tolérance. En hyperactivation (débordement émotionnel) ou hypoactivation (retrait), le travail s’interrompt pour revenir à une régulation optimale.
Bien plus qu’une technique : une réparation incarnée
L’efficacité des scénarios réparateurs tient à leur structure :
• Brève réactivation du souvenir.
• Injection de ressources absentes au moment des faits.
• Progression guidée sur l’échelle polyvagale.
Le patient ne nie pas son passé : il le traverse avec ses forces actuelles. L’image finale, imprégnée d’attachement sécure, devient tuteur de résilience et point d’ancrage intérieur.
« Revisiter le passé, oui. Mais cette fois, avec toutes les armes pour le traverser. »
Crédit Photo © Xavier Montoy
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Urgences et psychotraumatisme : au cœur du choc
Notes de lecture d'EMDR.FR pour la formation, article du Dr Dr Virginie LAGRÉE, Praticien hospitalier aux urgences du CHU de Nantes. Formée à l’hypnose à l’ARePTA à Nantes ainsi qu’aux thérapies stratégiques, à l’HTSMA et aux thérapies narratives.
La nuit tombe sur le CHU de Nantes. Aux urgences psychiatriques, les histoires entrent avec fracas : bruits de freins, regards figés, larmes incontrôlables. Virginie Lagrée, médecin, en connaît le poids — celui que l’on porte dans le corps longtemps après la fin de la garde.
Quand l’accident ne s’arrête pas
Monsieur Pierre, chauffeur poids lourd, vient d’assister impuissant à la mort d’une conductrice. Il revoit ses yeux, entend les pneus crisser. « C’est comme si elle était résignée à mourir ». Aux urgences, on lui avait promis « les mots qui apaisent ». Mais aucun dictionnaire ne gomme l’irréversible.
Virginie lui parle simplement : injustice, fatalité… et la certitude que cet instant ne change pas ses valeurs. Pas de formule magique, juste la présence.
Les traces dans le corps du soignant
Un soir, après une intervention sanglante, des collègues du Samu rient, dissociés. Plutôt que de juger, Virginie les invite à prendre un café. Un geste banal qui ramène chacun à l’instant présent. Pas de technique sophistiquée : juste revenir au réel.
Oser utiliser ses outils
Patricia, 20 ans, violée quinze jours plus tôt, vit en hypervigilance. Virginie propose de l’EMDR. Les yeux suivent le doigt, les mots disent « ça va mieux », mais le corps raconte autre chose : alliance fragile, besoin de sécurité d’abord. L’apprentissage est là — il faut parfois attendre avant d’ouvrir la porte du trauma.
Histoires qui s’accrochent, histoires qui s’échappent
Julie, agressée sexuellement, revient chercher un certificat. Elle veut croire que « ça va revenir ». Un vacarme dans le couloir interrompt la séance. Elle ne reviendra pas. À l’inverse, Bernard, rescapé d’une tentative de meurtre commanditée par sa femme, reviendra pendant deux ans. Avec lui, Virginie observe les phases du traumatisme : sidération, révolte, abdication… et la force des ressources enfouies.
Entre technique et humanité
Les outils existent : HTSMA, TRE, EMDR. Mais aux urgences, il faut d’abord évaluer, orienter, assurer un filet de sécurité autour du patient. Parfois, prévenir des cauchemars et flashs normaux ; parfois, ne rien dire pour ne pas suggérer.
Et quand rien d’autre ne semble possible ? Une main sur l’épaule, un verre d’eau, un mot maladroit mais sincère.
« Finalement, au-delà de toutes les techniques, être simplement gentil. »
Crédit Photo © Xavier Montoy
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Monsieur Pierre, chauffeur poids lourd, vient d’assister impuissant à la mort d’une conductrice. Il revoit ses yeux, entend les pneus crisser. « C’est comme si elle était résignée à mourir ». Aux urgences, on lui avait promis « les mots qui apaisent ». Mais aucun dictionnaire ne gomme l’irréversible.
Virginie lui parle simplement : injustice, fatalité… et la certitude que cet instant ne change pas ses valeurs. Pas de formule magique, juste la présence.
Les traces dans le corps du soignant
Un soir, après une intervention sanglante, des collègues du Samu rient, dissociés. Plutôt que de juger, Virginie les invite à prendre un café. Un geste banal qui ramène chacun à l’instant présent. Pas de technique sophistiquée : juste revenir au réel.
Oser utiliser ses outils
Patricia, 20 ans, violée quinze jours plus tôt, vit en hypervigilance. Virginie propose de l’EMDR. Les yeux suivent le doigt, les mots disent « ça va mieux », mais le corps raconte autre chose : alliance fragile, besoin de sécurité d’abord. L’apprentissage est là — il faut parfois attendre avant d’ouvrir la porte du trauma.
Histoires qui s’accrochent, histoires qui s’échappent
Julie, agressée sexuellement, revient chercher un certificat. Elle veut croire que « ça va revenir ». Un vacarme dans le couloir interrompt la séance. Elle ne reviendra pas. À l’inverse, Bernard, rescapé d’une tentative de meurtre commanditée par sa femme, reviendra pendant deux ans. Avec lui, Virginie observe les phases du traumatisme : sidération, révolte, abdication… et la force des ressources enfouies.
Entre technique et humanité
Les outils existent : HTSMA, TRE, EMDR. Mais aux urgences, il faut d’abord évaluer, orienter, assurer un filet de sécurité autour du patient. Parfois, prévenir des cauchemars et flashs normaux ; parfois, ne rien dire pour ne pas suggérer.
Et quand rien d’autre ne semble possible ? Une main sur l’épaule, un verre d’eau, un mot maladroit mais sincère.
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De la transe traumatique à la transe thérapeutique : plongée au cœur de l’intime en TLMR
Notes de lecture d'EMDR.FR pour la formation, au sujet de la TLMR Thérapie du Lien et des Mondes Relationnels.
Et si l’on pouvait revivre, en toute sécurité, l’histoire précoce qui a façonné nos attachements ? C’est le pari de la Thérapie du lien et des mondes relationnels (TLMR), où le corps et la transe deviennent les vecteurs d’une réconciliation profonde avec soi-même.
Un monde relationnel dès avant la naissance
Pour le fœtus, l’utérus maternel n’est pas un simple cocon biologique. C’est déjà un monde relationnel, une enveloppe vivante où s’inscrivent les premiers liens d’attachement, filtrés par le vécu émotionnel et corporel de la mère. Mais quand ce vécu est marqué par la détresse, la violence ou le rejet, ce premier univers peut se construire sur des bases fragiles, voire traumatiques.
Les recherches, comme celles de Rachel Yehuda après le 11 septembre, montrent que le stress post-traumatique maternel se transmet au fœtus. Figement, contraction, dissociation peuvent devenir la première grammaire émotionnelle de l’enfant à naître. Plus tard, ces bases insécures s’incarneront dans un monde relationnel traumatique, nourri par les répétitions, les doubles liens et les transmissions transgénérationnelles.
Une modélisation qui donne corps à l’histoire
Lors d’une formation, H., 50 ans, accepte de revisiter son histoire prénatale. Elle décrit une enfance « difficile ». Les formateurs, Éric Bardot et Stéphane Roy, l’invitent à s’asseoir en position fœtale, les yeux bandés. Trois stagiaires forment autour d’elle un triangle : l’enveloppe placentaire.
Sans la toucher, elles se rapprochent, cherchant la posture la plus ajustée. H. sourit : « C’est ma mère qui vient… C’est bien… » Le corps se détend, le visage s’illumine. Premier contact réparateur avec cette enveloppe symbolique.
Quand l’intime et le collectif s’invitent
La scène évolue. Une stagiaire représentant le collectif intime (famille proche, amis) pose ses mains sur deux membres de l’enveloppe placentaire. Aussitôt, la structure se distend. « Comme si cette mère était seule… », dit l’une. H. confirme : « Mon père n’était pas là. » Un souvenir partagé de regard tendre entre ses parents vient resserrer la contenance. Premier réajustement.
Puis entre le collectif sociétal. Cette fois, H. s’étouffe. L’histoire surgit : « J’aurais dû être un garçon… Mon prénom veut dire Stop ! » Un message de non-existence transmis dès avant la naissance. Le corps réagit : douleur dans la jambe, tension. Mais une autre mémoire émerge : sa mère voulait lui donner un second prénom, signifiant « la protégée ». H. inspire ce prénom, et un relâchement s’installe. La transe hypnotique commence.
La rotation des mondes
Dans cet état modifié de conscience, le corps de H. se relâche. Les bras de l’enveloppe placentaire se mettent à bercer, puis à tourner doucement dans le sens des aiguilles d’une montre. Les mondes interne et externe s’accordent, comme deux systèmes vivants qui retrouvent leur unité.
Mais une douleur persiste. En explorant, une nouvelle figure surgit : le frère aîné, handicapé et décédé, absent du père retenu par la guerre. La stagiaire représentant l’histoire maternelle dit ressentir « comme si je portais un enfant mort ». L’émotion se propage. H. répond surtout par son corps, repartant dans une transe profonde. Les rotations reprennent, jusqu’à ce que les participants se détachent. Le cycle se clôt : H. sort du masque, souriante. « C’est le moment que je sorte. » Le geste évoque une naissance.
Naître avec un nouvel ancrage
À la demande du formateur, H. regarde toutes les personnes prêtes à l’accueillir. « Il y a du monde ! », dit-elle en riant. Ce moment symbolique vient reconfigurer la première empreinte relationnelle. Le passage de la transe traumatique (marquée par l’isolement, le rejet, la survie) à la transe thérapeutique (soutenante, accordée, sécurisante) est accompli.
Ce travail ne se limite pas à une métaphore : dans le langage sensorimoteur du corps, il reprogramme des réponses archaïques et réassocie ce qui avait été dissocié. L’enveloppement, le soutien, la présence collective deviennent des expériences vécues, intégrées au système relationnel interne.
La puissance du collectif dans le processus hypnotique
La TLMR exploite la dynamique du groupe pour matérialiser et réajuster les interactions entre différents « mondes » :
• l’histoire maternelle (avec ses blessures et ressources)
• le collectif intime (qui nourrit ou fragilise l’attachement)
• le collectif sociétal (normes, attentes, contextes culturels)
Lorsque ces systèmes s’alignent sur une intention commune – accueillir et soutenir l’enfant – ils créent les conditions optimales pour reconstruire une base relationnelle sécure. Dans le cas de H., cette harmonisation a permis de lever des blocages anciens, de relâcher des tensions corporelles et d’activer une confiance nouvelle dans les liens humains.
Sortir du double lien
La modélisation met en lumière ce qui parasite l’installation d’un attachement sécure : messages contradictoires, exigences normatives maltraitantes, absence de figures protectrices. Dans ces contextes, l’existence se construit autour du combat et de la méfiance, rendant l’aide et le contact affectif difficiles à accepter.
La TLMR, en mobilisant les phénomènes hypnotiques (transe d’observation, transe collective, transe hypnotique classique), offre un cadre pour lever ces dissociations et favoriser la réassociation : unité perceptive, sensorielle, affective. Le corps, acteur central, devient le terrain où l’expérience réparatrice s’inscrit durablement.
Une victoire intime
Pour H., cette séance a été une victoire : sortir accordée, accueillie, reliée. Dans l’espace de la formation, elle a pu vivre une expérience de confiance dans l’humain, mobilisant les ressources du collectif et la sécurité de la transe. Ce travail ouvre la voie à un processus de résilience et d’autonomie relationnelle, pierre angulaire de la reconstruction après un traumatisme développemental.
Crédit Photo © Xavier Montoy
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Un monde relationnel dès avant la naissance
Pour le fœtus, l’utérus maternel n’est pas un simple cocon biologique. C’est déjà un monde relationnel, une enveloppe vivante où s’inscrivent les premiers liens d’attachement, filtrés par le vécu émotionnel et corporel de la mère. Mais quand ce vécu est marqué par la détresse, la violence ou le rejet, ce premier univers peut se construire sur des bases fragiles, voire traumatiques.
Les recherches, comme celles de Rachel Yehuda après le 11 septembre, montrent que le stress post-traumatique maternel se transmet au fœtus. Figement, contraction, dissociation peuvent devenir la première grammaire émotionnelle de l’enfant à naître. Plus tard, ces bases insécures s’incarneront dans un monde relationnel traumatique, nourri par les répétitions, les doubles liens et les transmissions transgénérationnelles.
Une modélisation qui donne corps à l’histoire
Lors d’une formation, H., 50 ans, accepte de revisiter son histoire prénatale. Elle décrit une enfance « difficile ». Les formateurs, Éric Bardot et Stéphane Roy, l’invitent à s’asseoir en position fœtale, les yeux bandés. Trois stagiaires forment autour d’elle un triangle : l’enveloppe placentaire.
Sans la toucher, elles se rapprochent, cherchant la posture la plus ajustée. H. sourit : « C’est ma mère qui vient… C’est bien… » Le corps se détend, le visage s’illumine. Premier contact réparateur avec cette enveloppe symbolique.
Quand l’intime et le collectif s’invitent
La scène évolue. Une stagiaire représentant le collectif intime (famille proche, amis) pose ses mains sur deux membres de l’enveloppe placentaire. Aussitôt, la structure se distend. « Comme si cette mère était seule… », dit l’une. H. confirme : « Mon père n’était pas là. » Un souvenir partagé de regard tendre entre ses parents vient resserrer la contenance. Premier réajustement.
Puis entre le collectif sociétal. Cette fois, H. s’étouffe. L’histoire surgit : « J’aurais dû être un garçon… Mon prénom veut dire Stop ! » Un message de non-existence transmis dès avant la naissance. Le corps réagit : douleur dans la jambe, tension. Mais une autre mémoire émerge : sa mère voulait lui donner un second prénom, signifiant « la protégée ». H. inspire ce prénom, et un relâchement s’installe. La transe hypnotique commence.
La rotation des mondes
Dans cet état modifié de conscience, le corps de H. se relâche. Les bras de l’enveloppe placentaire se mettent à bercer, puis à tourner doucement dans le sens des aiguilles d’une montre. Les mondes interne et externe s’accordent, comme deux systèmes vivants qui retrouvent leur unité.
Mais une douleur persiste. En explorant, une nouvelle figure surgit : le frère aîné, handicapé et décédé, absent du père retenu par la guerre. La stagiaire représentant l’histoire maternelle dit ressentir « comme si je portais un enfant mort ». L’émotion se propage. H. répond surtout par son corps, repartant dans une transe profonde. Les rotations reprennent, jusqu’à ce que les participants se détachent. Le cycle se clôt : H. sort du masque, souriante. « C’est le moment que je sorte. » Le geste évoque une naissance.
Naître avec un nouvel ancrage
À la demande du formateur, H. regarde toutes les personnes prêtes à l’accueillir. « Il y a du monde ! », dit-elle en riant. Ce moment symbolique vient reconfigurer la première empreinte relationnelle. Le passage de la transe traumatique (marquée par l’isolement, le rejet, la survie) à la transe thérapeutique (soutenante, accordée, sécurisante) est accompli.
Ce travail ne se limite pas à une métaphore : dans le langage sensorimoteur du corps, il reprogramme des réponses archaïques et réassocie ce qui avait été dissocié. L’enveloppement, le soutien, la présence collective deviennent des expériences vécues, intégrées au système relationnel interne.
La puissance du collectif dans le processus hypnotique
La TLMR exploite la dynamique du groupe pour matérialiser et réajuster les interactions entre différents « mondes » :
• l’histoire maternelle (avec ses blessures et ressources)
• le collectif intime (qui nourrit ou fragilise l’attachement)
• le collectif sociétal (normes, attentes, contextes culturels)
Lorsque ces systèmes s’alignent sur une intention commune – accueillir et soutenir l’enfant – ils créent les conditions optimales pour reconstruire une base relationnelle sécure. Dans le cas de H., cette harmonisation a permis de lever des blocages anciens, de relâcher des tensions corporelles et d’activer une confiance nouvelle dans les liens humains.
Sortir du double lien
La modélisation met en lumière ce qui parasite l’installation d’un attachement sécure : messages contradictoires, exigences normatives maltraitantes, absence de figures protectrices. Dans ces contextes, l’existence se construit autour du combat et de la méfiance, rendant l’aide et le contact affectif difficiles à accepter.
La TLMR, en mobilisant les phénomènes hypnotiques (transe d’observation, transe collective, transe hypnotique classique), offre un cadre pour lever ces dissociations et favoriser la réassociation : unité perceptive, sensorielle, affective. Le corps, acteur central, devient le terrain où l’expérience réparatrice s’inscrit durablement.
Une victoire intime
Pour H., cette séance a été une victoire : sortir accordée, accueillie, reliée. Dans l’espace de la formation, elle a pu vivre une expérience de confiance dans l’humain, mobilisant les ressources du collectif et la sécurité de la transe. Ce travail ouvre la voie à un processus de résilience et d’autonomie relationnelle, pierre angulaire de la reconstruction après un traumatisme développemental.
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Tremblements neurogéniques : quand le corps ouvre la voie à la guérison du traumatisme.
Notes de lecture d'EMDR.FR pour la formation, article de MURIELLE FIGUREAU, Infirmière au CHU de Nantes, exerce au Centre régional du psychotraumatisme des Pays de la Loire. Hypnothérapeute formée à l’hypnose ericksonnienne et aux thérapies brèves et le Dr Alexandra PRINCÉ Psychiatre au CHU de Nantes, responsable d’une unité de psychiatrie adulte, exerce également au Centre régional du psychotraumatisme des Pays de la Loire. Formée à l’hypnose ericksonnienne et aux thérapies brèves.
Et si le corps détenait la clé pour dépasser le traumatisme là où les mots échouent ? Au Centre régional du psychotraumatisme (CRP) des Pays de la Loire, une approche innovante fait bouger les lignes : les tremblements neurogéniques thérapeutiques. Inspirée de la méthode Trauma Releasing Exercises (TRE) de David Berceli, elle utilise les réflexes naturels du corps pour dissoudre les tensions ancrées par le traumatisme et restaurer un équilibre émotionnel.
Quand le corps garde la mémoire.
Selon la théorie polyvagale de Stephen Porges, nos réactions au danger suivent trois modes : engagement social, fuite/combat ou figement. Lorsqu’aucune issue n’a été trouvée face à un événement terrifiant, le corps reste coincé dans ces réponses réflexes, piégé dans un état de vigilance extrême.
« Le corps devient alors le lieu d’expression des sensations liées au traumatisme », expliquent Murielle Figureau et Alexandra Princé, à l’origine du programme au CRP. Même sans mots pour décrire l’expérience, ces sensations peuvent ressurgir et réactiver le système d’alarme interne.
Une réponse physiologique oubliée.
David Berceli a observé, que dans des zones de guerre, tous les mammifères possèdent deux réflexes face au danger : la posture de protection (type position fœtale) et les tremblements musculaires spontanés pour relâcher la tension.
Chez l’humain, cette seconde réaction est souvent inhibée. Les exercices TRE visent à la réactiver, en mobilisant notamment les muscles psoas, souvent considérés comme la « poubelle émotionnelle » du corps.
La séance se conclut allongé, pieds l’un contre l’autre, pour laisser venir les tremblements, lesquels peuvent se diffuser des cuisses jusqu’au tronc.
« Cette technique simple en apparence nécessite un accompagnement formé, capable de créer un espace de sécurité et d’accueillir ce qui se manifeste », précisent les 2 praticiennes.
Co-régulation et sécurité.
La méthode repose sur la co-régulation : le corps du thérapeute influence celui du patient. Un professionnel calme et ancré facilite l’apaisement de l’autre.
Au CRP, le protocole en groupe comprend six séances hebdomadaires : pratique guidée, puis échanges. Chaque patient est d’abord reçu individuellement pour établir une relation de confiance. L’objectif : autonomiser la pratique pour prolonger les effets au quotidien.
Réapprendre à sentir.
Contrairement aux approches verbales, les séances se déroulent sans parler du trauma. Le travail se concentre sur la reconnexion au corps, l’accueil des sensations et la réactivation de l’auto-régulation émotionnelle. Les bénéfices observés sont multiples : baisse de l’hypervigilance, amélioration du sommeil, diminution des douleurs chroniques, et surtout un sentiment de sécurité intérieure retrouvé.
Cas clinique : retrouver sa place.
Monsieur V., 58 ans, ancien gendarme présent au Bataclan le 13 novembre 2015, vit encore avec anxiété, agoraphobie et isolement malgré une psychothérapie.
Dès la première séance, il accueille les tremblements avec surprise : « Qu’est-ce que mon corps met en place sans mon contrôle ? » Progressivement, il apprend à les réguler, à accueillir colère et tristesse jusqu’à sentir son corps « assemblé ».
Au fil des séances, de petits changements émergent : patience retrouvée, baisse de la peur dans l’espace public, meilleure relation à soi et aux autres. Le groupe agit comme un contenant sécurisant, facilitant la réappropriation du corps et le renforcement de l’estime de soi.
Cas clinique : apprivoiser l’incontrôlable
Un patient de 33 ans, victime d’abus sexuels dans l’enfance, présente un trouble de stress post-traumatique sévère. Les premières séances sont marquées par la peur et la crispation : les tremblements déclenchent un sentiment de perte de contrôle.
Le travail se fait alors par petites touches : régulation progressive des tremblements, respiration lente pour apaiser le système nerveux, et contact thérapeutique (main dans le dos) comme métaphore du soutien.
Résultat : au bout de cinq séances, moins de ruminations, disparition des attaques de panique, diminution de la boule dans la gorge. Il pratique désormais seul chez lui.
Le corps comme allié thérapeutique.
Les praticiennes insistent : cette méthode ne remplace pas les autres approches validées comme l’EMDR ou la thérapie cognitivo-comportementale (TCC), mais elle offre une porte d’entrée essentielle pour des patients coupés de leurs sensations ou en difficulté avec la verbalisation.
En travaillant sur les tremblements physiologiques, on apprend à faire confiance au corps pour guider le processus de guérison. « Continuer une pratique volontaire pour laisser place à quelque chose d’involontaire », résument-elles.
Des perspectives pour la pratique clinique.
L’expérience menée au CRP montre que cette approche peut être intégrée dans divers formats : individuel, groupe, complément à une thérapie existante.
Les professionnels intéressés doivent cependant être formés, non seulement à la technique, mais aussi à l’accompagnement de la régulation émotionnelle et à la gestion des réactions intenses.
Un support vidéo a été créé pour soutenir la pratique autonome et maintenir le lien après la prise en charge.
En résumé
Les tremblements neurogéniques sont une ressource physiologique universelle que la modernité a reléguée dans l’ombre. Restaurée dans un cadre sécurisant, elle devient un outil thérapeutique puissant :
• Accessible aux patients qui ne peuvent ou ne veulent pas verbaliser leur trauma
• Renforce la sécurité intérieure et l’autorégulation émotionnelle
• S’intègre facilement en complément d’autres approches
• Favorise l’autonomie et la continuité des bénéfices
« Le corps a sa propre sagesse. Encore faut-il lui redonner la parole. »
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Quand le corps garde la mémoire.
Selon la théorie polyvagale de Stephen Porges, nos réactions au danger suivent trois modes : engagement social, fuite/combat ou figement. Lorsqu’aucune issue n’a été trouvée face à un événement terrifiant, le corps reste coincé dans ces réponses réflexes, piégé dans un état de vigilance extrême.
« Le corps devient alors le lieu d’expression des sensations liées au traumatisme », expliquent Murielle Figureau et Alexandra Princé, à l’origine du programme au CRP. Même sans mots pour décrire l’expérience, ces sensations peuvent ressurgir et réactiver le système d’alarme interne.
Une réponse physiologique oubliée.
David Berceli a observé, que dans des zones de guerre, tous les mammifères possèdent deux réflexes face au danger : la posture de protection (type position fœtale) et les tremblements musculaires spontanés pour relâcher la tension.
Chez l’humain, cette seconde réaction est souvent inhibée. Les exercices TRE visent à la réactiver, en mobilisant notamment les muscles psoas, souvent considérés comme la « poubelle émotionnelle » du corps.
La séance se conclut allongé, pieds l’un contre l’autre, pour laisser venir les tremblements, lesquels peuvent se diffuser des cuisses jusqu’au tronc.
« Cette technique simple en apparence nécessite un accompagnement formé, capable de créer un espace de sécurité et d’accueillir ce qui se manifeste », précisent les 2 praticiennes.
Co-régulation et sécurité.
La méthode repose sur la co-régulation : le corps du thérapeute influence celui du patient. Un professionnel calme et ancré facilite l’apaisement de l’autre.
Au CRP, le protocole en groupe comprend six séances hebdomadaires : pratique guidée, puis échanges. Chaque patient est d’abord reçu individuellement pour établir une relation de confiance. L’objectif : autonomiser la pratique pour prolonger les effets au quotidien.
Réapprendre à sentir.
Contrairement aux approches verbales, les séances se déroulent sans parler du trauma. Le travail se concentre sur la reconnexion au corps, l’accueil des sensations et la réactivation de l’auto-régulation émotionnelle. Les bénéfices observés sont multiples : baisse de l’hypervigilance, amélioration du sommeil, diminution des douleurs chroniques, et surtout un sentiment de sécurité intérieure retrouvé.
Cas clinique : retrouver sa place.
Monsieur V., 58 ans, ancien gendarme présent au Bataclan le 13 novembre 2015, vit encore avec anxiété, agoraphobie et isolement malgré une psychothérapie.
Dès la première séance, il accueille les tremblements avec surprise : « Qu’est-ce que mon corps met en place sans mon contrôle ? » Progressivement, il apprend à les réguler, à accueillir colère et tristesse jusqu’à sentir son corps « assemblé ».
Au fil des séances, de petits changements émergent : patience retrouvée, baisse de la peur dans l’espace public, meilleure relation à soi et aux autres. Le groupe agit comme un contenant sécurisant, facilitant la réappropriation du corps et le renforcement de l’estime de soi.
Cas clinique : apprivoiser l’incontrôlable
Un patient de 33 ans, victime d’abus sexuels dans l’enfance, présente un trouble de stress post-traumatique sévère. Les premières séances sont marquées par la peur et la crispation : les tremblements déclenchent un sentiment de perte de contrôle.
Le travail se fait alors par petites touches : régulation progressive des tremblements, respiration lente pour apaiser le système nerveux, et contact thérapeutique (main dans le dos) comme métaphore du soutien.
Résultat : au bout de cinq séances, moins de ruminations, disparition des attaques de panique, diminution de la boule dans la gorge. Il pratique désormais seul chez lui.
Le corps comme allié thérapeutique.
Les praticiennes insistent : cette méthode ne remplace pas les autres approches validées comme l’EMDR ou la thérapie cognitivo-comportementale (TCC), mais elle offre une porte d’entrée essentielle pour des patients coupés de leurs sensations ou en difficulté avec la verbalisation.
En travaillant sur les tremblements physiologiques, on apprend à faire confiance au corps pour guider le processus de guérison. « Continuer une pratique volontaire pour laisser place à quelque chose d’involontaire », résument-elles.
Des perspectives pour la pratique clinique.
L’expérience menée au CRP montre que cette approche peut être intégrée dans divers formats : individuel, groupe, complément à une thérapie existante.
Les professionnels intéressés doivent cependant être formés, non seulement à la technique, mais aussi à l’accompagnement de la régulation émotionnelle et à la gestion des réactions intenses.
Un support vidéo a été créé pour soutenir la pratique autonome et maintenir le lien après la prise en charge.
En résumé
Les tremblements neurogéniques sont une ressource physiologique universelle que la modernité a reléguée dans l’ombre. Restaurée dans un cadre sécurisant, elle devient un outil thérapeutique puissant :
• Accessible aux patients qui ne peuvent ou ne veulent pas verbaliser leur trauma
• Renforce la sécurité intérieure et l’autorégulation émotionnelle
• S’intègre facilement en complément d’autres approches
• Favorise l’autonomie et la continuité des bénéfices
« Le corps a sa propre sagesse. Encore faut-il lui redonner la parole. »
Crédit Photo © Xavier Montoy
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EMDR et MESMAY : deux façons de regarder le traumatisme en face.
Quand l’hypnose se cache derrière les mouvements oculaires Notes de lecture d'EMDR.FR pour la formation.
L’EMDR : une « ruse hypnotique » au protocole scientifique.
Depuis sa découverte en 1987 par Francine Shapiro, l’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing) a conquis la planète psychothérapie. De nombreuses études montrent son efficacité dans environ deux tiers des cas de traumatisme.
Shapiro, initialement littéraire, s’est formée aux thérapies cognitivo-comportementales (TCC) et a bâti un protocole rigoureux : bilan pré/post, échelles d’évaluation, ressource de secours, consentement éclairé. Ce cadre scientifique a donné à l’EMDR la légitimité nécessaire pour se diffuser rapidement et obtenir en 2002 le prix Sigmund-Freud de psychothérapie.
Le cœur de la méthode ? Demander au patient de suivre des yeux les doigts du thérapeute allant rapidement de droite à gauche, tout en se concentrant sur l’image mentale de l’événement traumatique — rebaptisée « cible ».
Un paradoxe hypnotique : « On ne peut pas se focaliser en même temps sur l’extérieur et sur l’intérieur. Demander ces deux tâches simultanées fait décrocher l’esprit conscient, laissant l’inconscient engager ses mécanismes réparateurs », explique l’auteur.
Sous ses airs scientifiques, l’EMDR s’apparente ainsi à une induction hypnotique. Comme autrefois le métronome, les allers-retours oculaires plongent certains sujets en transe profonde. Et derrière ce dispositif, une autre ruse : amener la personne à ne plus fuir le souvenir, mais à le regarder en face, des centaines de fois, en reprenant ainsi un pouvoir d’action sur le trauma.
Quand l’EMDR atteint ses limites.
Si l’EMDR réussit dans deux tiers des cas, que faire pour le tiers restant ?
L’auteur pointe un double écueil :
• un protocole classique lourd (60 à 90 minutes, multiples étapes)
• une tendance à compliquer l’outil en inventant la notion de « traumatisme complexe » ou en ajoutant des réglages fins… au risque d’oublier la « ruse hypnotique » qui fait l’efficacité.
« Le traumatisme est toujours simple. Seuls les thérapeutes peuvent être complexes », souligne-t-il avec malice.
MESMAY : l’EMDR simplifié… et assumé
Face à ces limites, l’auteur propose MESMAY — pour Mes Mouvements Alternatifs des Yeux — une version allégée et plus hypnotique.
Durée : 20 à 30 minutes, pas plus. Structure : un prologue, deux actes, un entracte… et pas d’épilogue.
L’humour est au rendez-vous : « Le traitement du traumatisme, c’est MESMAY ; on va faire ça avec MESMAY », plaisante-t-il, laissant parfois le patient croire qu’il parle de sa grand-mère.
Prologue : poser le cadre
Trois étapes clés :
1. Expliquer brièvement la technique et la possibilité de pause (fatigue oculaire uniquement).
2. Définir la cible : l’image la plus marquante du traumatisme.
3. Prévenir qu’à la fin, on se quittera sans parler, pour laisser le cerveau « travailler ».
Cette mise en scène discrète renforce la confiance et l’impact de la séance.
Acte I : 240 allers-retours pour épuiser, "pourrir" le trauma
Le thérapeute se place de trois quarts pour rester hors du champ direct.
La séquence type :
• 24 allers-retours rapides (mais confortables à suivre)
• une question courte (« Qu’est-ce qui vous vient ? »)
• réponse en quelques mots
• répétée en écho par le thérapeute
• reprise immédiate de la stimulation oculaire.
Dix séquences de ce type composent l’acte I.
Le processus habituel :
• sensations physiques pénibles (localisées selon la nature du trauma : gorge après strangulation, poitrine après compression…)
• avalanche d’images mentales, parfois sans lien direct avec l’événement (souvenirs anodins, scènes du quotidien) — signe que « la vie mentale se remet en marche »
• surgissement des affects : tristesse et culpabilité, remplacées par colère ou haine, puis apaisement.
Peu à peu, le patient devient indifférent à l’événement : « C’est drôle, ça ne me fait plus rien »… voire incapable de s’y fixer. La charge émotionnelle est dissoute, la perception de l’agresseur change (« Quel pauvre type… »). L’événement n’est plus qu’un souvenir.
Entracte : ancrer la bascule
Le patient se lève, marche trente pas, revient s’asseoir. Implicitement, le trauma est considéré comme traité. Une nouvelle phase s’ouvre.
Acte II : du grand malheur au grand bonheur
L’ultime étape exploite l’effet de contraste.
Le thérapeute enchaîne : « Dans votre vie, il n’y a pas eu que des grands drames, non ? » Puis : « Donnez-moi un très grand moment, très agréable… Plongez-y trois minutes pleines. »
Souvent, les patientes évoquent la naissance de leur premier enfant. Cette immersion dans un bonheur intense rééquilibre la mémoire autobiographique : la vie ne se résume plus au trauma. « La blessure est résorbée », affirme l’auteur.
Un outil rapide, souple et hypnotique
MESMAY conserve le cœur efficace de l’EMDR — le paradoxe hypnotique et l’exposition répétée à la cible — tout en supprimant le poids protocolaire.
Avantages :
• gain de temps
• meilleure tolérance
• possibilité d’intégration facile pour les praticiens formés à l’hypnose.
Loin de se vouloir un remplacement strict de l’EMDR, cette approche se présente comme un outil complémentaire, à utiliser notamment lorsque l’EMDR classique montre ses limites.
En résumé : « Pas de traumatisme complexe, pas d’épilogue inutile. Juste l’essentiel : regarder le trauma en face, puis s’immerger dans un grand bonheur. »
Merci à Dominique MEGGLÉ, Ancien psychiatre des Hôpitaux des Armées, en pratique libérale depuis 1997. Cofondateur de la CFHTB Confédération Francophone d'Hypnose et Thérapies Brèves, président de l’Institut Erickson Méditerranée et président d’honneur de l’Institut Erickson de Normandie. Conférencier et formateur, il est l’auteur de plusieurs livres, dont : Erickson, hypnose et psychothérapie (Retz, 2005), Les Thérapies brèves (Satas, 2011), Douze conférences (Satas, 2011), Le traumatisme mental, signes, diagnostic, traitement (Satas, 2021), Les chaussettes trouées (Satas, 2023).
Crédit Photo © Xavier Montoy
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Depuis sa découverte en 1987 par Francine Shapiro, l’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing) a conquis la planète psychothérapie. De nombreuses études montrent son efficacité dans environ deux tiers des cas de traumatisme.
Shapiro, initialement littéraire, s’est formée aux thérapies cognitivo-comportementales (TCC) et a bâti un protocole rigoureux : bilan pré/post, échelles d’évaluation, ressource de secours, consentement éclairé. Ce cadre scientifique a donné à l’EMDR la légitimité nécessaire pour se diffuser rapidement et obtenir en 2002 le prix Sigmund-Freud de psychothérapie.
Le cœur de la méthode ? Demander au patient de suivre des yeux les doigts du thérapeute allant rapidement de droite à gauche, tout en se concentrant sur l’image mentale de l’événement traumatique — rebaptisée « cible ».
Un paradoxe hypnotique : « On ne peut pas se focaliser en même temps sur l’extérieur et sur l’intérieur. Demander ces deux tâches simultanées fait décrocher l’esprit conscient, laissant l’inconscient engager ses mécanismes réparateurs », explique l’auteur.
Sous ses airs scientifiques, l’EMDR s’apparente ainsi à une induction hypnotique. Comme autrefois le métronome, les allers-retours oculaires plongent certains sujets en transe profonde. Et derrière ce dispositif, une autre ruse : amener la personne à ne plus fuir le souvenir, mais à le regarder en face, des centaines de fois, en reprenant ainsi un pouvoir d’action sur le trauma.
Quand l’EMDR atteint ses limites.
Si l’EMDR réussit dans deux tiers des cas, que faire pour le tiers restant ?
L’auteur pointe un double écueil :
• un protocole classique lourd (60 à 90 minutes, multiples étapes)
• une tendance à compliquer l’outil en inventant la notion de « traumatisme complexe » ou en ajoutant des réglages fins… au risque d’oublier la « ruse hypnotique » qui fait l’efficacité.
« Le traumatisme est toujours simple. Seuls les thérapeutes peuvent être complexes », souligne-t-il avec malice.
MESMAY : l’EMDR simplifié… et assumé
Face à ces limites, l’auteur propose MESMAY — pour Mes Mouvements Alternatifs des Yeux — une version allégée et plus hypnotique.
Durée : 20 à 30 minutes, pas plus. Structure : un prologue, deux actes, un entracte… et pas d’épilogue.
L’humour est au rendez-vous : « Le traitement du traumatisme, c’est MESMAY ; on va faire ça avec MESMAY », plaisante-t-il, laissant parfois le patient croire qu’il parle de sa grand-mère.
Prologue : poser le cadre
Trois étapes clés :
1. Expliquer brièvement la technique et la possibilité de pause (fatigue oculaire uniquement).
2. Définir la cible : l’image la plus marquante du traumatisme.
3. Prévenir qu’à la fin, on se quittera sans parler, pour laisser le cerveau « travailler ».
Cette mise en scène discrète renforce la confiance et l’impact de la séance.
Acte I : 240 allers-retours pour épuiser, "pourrir" le trauma
Le thérapeute se place de trois quarts pour rester hors du champ direct.
La séquence type :
• 24 allers-retours rapides (mais confortables à suivre)
• une question courte (« Qu’est-ce qui vous vient ? »)
• réponse en quelques mots
• répétée en écho par le thérapeute
• reprise immédiate de la stimulation oculaire.
Dix séquences de ce type composent l’acte I.
Le processus habituel :
• sensations physiques pénibles (localisées selon la nature du trauma : gorge après strangulation, poitrine après compression…)
• avalanche d’images mentales, parfois sans lien direct avec l’événement (souvenirs anodins, scènes du quotidien) — signe que « la vie mentale se remet en marche »
• surgissement des affects : tristesse et culpabilité, remplacées par colère ou haine, puis apaisement.
Peu à peu, le patient devient indifférent à l’événement : « C’est drôle, ça ne me fait plus rien »… voire incapable de s’y fixer. La charge émotionnelle est dissoute, la perception de l’agresseur change (« Quel pauvre type… »). L’événement n’est plus qu’un souvenir.
Entracte : ancrer la bascule
Le patient se lève, marche trente pas, revient s’asseoir. Implicitement, le trauma est considéré comme traité. Une nouvelle phase s’ouvre.
Acte II : du grand malheur au grand bonheur
L’ultime étape exploite l’effet de contraste.
Le thérapeute enchaîne : « Dans votre vie, il n’y a pas eu que des grands drames, non ? » Puis : « Donnez-moi un très grand moment, très agréable… Plongez-y trois minutes pleines. »
Souvent, les patientes évoquent la naissance de leur premier enfant. Cette immersion dans un bonheur intense rééquilibre la mémoire autobiographique : la vie ne se résume plus au trauma. « La blessure est résorbée », affirme l’auteur.
Un outil rapide, souple et hypnotique
MESMAY conserve le cœur efficace de l’EMDR — le paradoxe hypnotique et l’exposition répétée à la cible — tout en supprimant le poids protocolaire.
Avantages :
• gain de temps
• meilleure tolérance
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Loin de se vouloir un remplacement strict de l’EMDR, cette approche se présente comme un outil complémentaire, à utiliser notamment lorsque l’EMDR classique montre ses limites.
En résumé : « Pas de traumatisme complexe, pas d’épilogue inutile. Juste l’essentiel : regarder le trauma en face, puis s’immerger dans un grand bonheur. »
Merci à Dominique MEGGLÉ, Ancien psychiatre des Hôpitaux des Armées, en pratique libérale depuis 1997. Cofondateur de la CFHTB Confédération Francophone d'Hypnose et Thérapies Brèves, président de l’Institut Erickson Méditerranée et président d’honneur de l’Institut Erickson de Normandie. Conférencier et formateur, il est l’auteur de plusieurs livres, dont : Erickson, hypnose et psychothérapie (Retz, 2005), Les Thérapies brèves (Satas, 2011), Douze conférences (Satas, 2011), Le traumatisme mental, signes, diagnostic, traitement (Satas, 2021), Les chaussettes trouées (Satas, 2023).
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Cette formation vous permettra d’intégrer cet outil avec les outils thérapeutiques que vous utilisez déjà en pratique clinique.
Alors, rendez-vous à Paris, Marseille, Bordeaux, Annecy, Nancy, Strasbourg, Lausanne et Genève, avec des instituts membres de la CFHTB, pour une formation en EMDR INTEGRATIVE.
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EMDR de groupe : la puissance des vécus partagés face aux traumatismes.
Notes de lecture d'EMDR.FR pour la formation.
Dans un monde où catastrophes naturelles, guerres, violences domestiques et crises migratoires se multiplient, les besoins en soins psychotraumatiques explosent. Les ressources médicales, elles, peinent à suivre.
Et si la réponse passait par la force du collectif ?
Les thérapies EMDR de groupe démontrent qu’en unissant des parcours de vie marqués par le traumatisme, on libère un potentiel unique de guérison.
Pourquoi le groupe change la donne
Bien plus qu’une solution économique, l’EMDR de groupe mobilise des ressources propres au collectif : solidarité, compassion, validation mutuelle.
Ces dynamiques créent un espace sécurisant où chacun peut traverser ses émotions douloureuses en étant soutenu par des pairs.
Dans certains cas, elles s’élargissent même à une dynamique communautaire de santé mentale, en impliquant proches, bénévoles ou associations pour former une véritable « équipe de protection émotionnelle ».
Des séjours thérapeutiques transformateurs
En Colombie, la psychologue franco-colombienne Susana Roque-Lopez accompagne depuis 2008 des enfants placés après des violences domestiques sévères.
Ses séjours très structurés combinent renforcement des ressources (méditation, cohérence cardiaque, yoga, reparentage de l’enfant intérieur) et médiations artistiques (musique, danse, arts plastiques, théâtre).
L’approche narrative, inspirée du « voyage des héroïnes » d’Arthur, aide les jeunes à se projeter dans une histoire de résilience.
Après quelques jours de préparation, le groupe passe au traitement EMDR :
« J’ai vu les nuages s’en aller… comme mes problèmes du passé. Et je me suis dit : je suis une femme forte. »
Depuis le début de l’action, plus de 400 jeunes ont bénéficié de ces séjours, avec une amélioration durable de l’estime de soi, de la régulation émotionnelle et des relations sociales.
Des effets jusque dans l’ADN
En 2019, la chercheuse Perla Kaliman a mesuré l’impact épigénétique d’un séjour EMDR : certains marqueurs de stress inscrits sur l’ADN avaient diminué, permettant une meilleure expression des gènes liés à la neuroplasticité.
Cette avancée laisse espérer une transmission intergénérationnelle de la résilience.
L’EMDR de groupe au service des plus précaires
En France, des praticiens EMDR interviennent auprès de réfugiés, bénéficiaires du RSA, personnes en réinsertion ou atteintes de cancer.
À Lyon, un partenariat entre thérapeutes et associations permet d’organiser des cycles de 5 à 6 séances pour une dizaine de participants.
L’usage du dessin facilite la confidentialité (en cas de violences sexuelles) et contourne les barrières linguistiques.
En cas de surcharge émotionnelle, un thérapeute assure un accompagnement individuel.
Les résultats sont encourageants : une baisse moyenne de 47 % des symptômes post-traumatiques et une amélioration globale de 57 %, même en contexte de grande précarité.
Des origines humanitaires
L’EMDR de groupe a d’abord été développé dans les zones de catastrophe naturelle, pour répondre à une demande massive avec peu de praticiens.
Depuis, il s’est adapté à des contextes variés :
Sa force réside dans sa simplicité et son acceptabilité interculturelle. Grâce au dessin, nul besoin de raconter les détails du trauma, ce qui protège les victimes.
Former les relais de terrain
Lors d’un congrès international en 2018, les praticiens ont soulevé une piste cruciale : former des para-professionnels (personnes reconnues dans leur communauté, mais non psychologues) aux protocoles EMDR simplifiés et à des exercices de stabilisation.
En République centrafricaine, 17 travailleurs psychosociaux ainsi formés ont accompagné plus de 500 enfants et adolescents traumatisés par la guerre civile.
Une réponse à l’échelle mondiale
Près de 500 millions de personnes souffriraient de troubles post-traumatiques dans le monde.
L’OMS recommande des interventions de santé mentale « à faible intensité » : auto-soin guidé en ligne, groupes animés par para-professionnels formés, supervision à distance.
Y intégrer l’EMDR de groupe, comme le fait le Traumatic Stress Relief (TSR), pourrait renforcer l’efficacité, même dans les contextes les plus difficiles.
En France, cette logique en « trois étages » s’esquisse déjà :
Et face à l’éco-anxiété ?
La montée de l’éco-anxiété, surtout chez les jeunes, appelle aussi une réponse collective.
En combinant EMDR de groupe, Travail qui relie (écopsychologie) et rituels de deuil, certains stages montrent qu’affronter ensemble des émotions intenses, agréables ou douloureuses, renforce puissamment les liens et le sentiment d’agir.
« Là où croît le péril, croît aussi ce qui sauve. » – Hölderlin
Crédit Photo © Xavier Montoy
Article rédigé par:
Emmanuel CONTAMIN, Psychiatre, pédopsychiatre et superviseur EMDR-Europe. Il est motivé par l’accessibilité des soins (responsable de la commission EMDR pour tous de l’association EMDR-France), la transmission d’outils d’auto-thérapie et les enjeux socio-écosystémiques de notre résilience collective, avec la problématique de l’éco-anxiété qui devient majeure.
Françoise CONTAMIN, médecin et praticienne EMDR-Europe,
et Laetitia DE SCHOUTHEETE, psychologue clinicienne et praticienne EMDR-Europe.
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Et si la réponse passait par la force du collectif ?
Les thérapies EMDR de groupe démontrent qu’en unissant des parcours de vie marqués par le traumatisme, on libère un potentiel unique de guérison.
Pourquoi le groupe change la donne
Bien plus qu’une solution économique, l’EMDR de groupe mobilise des ressources propres au collectif : solidarité, compassion, validation mutuelle.
Ces dynamiques créent un espace sécurisant où chacun peut traverser ses émotions douloureuses en étant soutenu par des pairs.
Dans certains cas, elles s’élargissent même à une dynamique communautaire de santé mentale, en impliquant proches, bénévoles ou associations pour former une véritable « équipe de protection émotionnelle ».
Des séjours thérapeutiques transformateurs
En Colombie, la psychologue franco-colombienne Susana Roque-Lopez accompagne depuis 2008 des enfants placés après des violences domestiques sévères.
Ses séjours très structurés combinent renforcement des ressources (méditation, cohérence cardiaque, yoga, reparentage de l’enfant intérieur) et médiations artistiques (musique, danse, arts plastiques, théâtre).
L’approche narrative, inspirée du « voyage des héroïnes » d’Arthur, aide les jeunes à se projeter dans une histoire de résilience.
Après quelques jours de préparation, le groupe passe au traitement EMDR :
- Dessin du souvenir le plus perturbant
- Évaluation de l’intensité émotionnelle
- Stimulation bilatérale alternée (mouvements oculaires ou « câlin du papillon »)
- Répétition du processus jusqu’à apaisement
« J’ai vu les nuages s’en aller… comme mes problèmes du passé. Et je me suis dit : je suis une femme forte. »
Depuis le début de l’action, plus de 400 jeunes ont bénéficié de ces séjours, avec une amélioration durable de l’estime de soi, de la régulation émotionnelle et des relations sociales.
Des effets jusque dans l’ADN
En 2019, la chercheuse Perla Kaliman a mesuré l’impact épigénétique d’un séjour EMDR : certains marqueurs de stress inscrits sur l’ADN avaient diminué, permettant une meilleure expression des gènes liés à la neuroplasticité.
Cette avancée laisse espérer une transmission intergénérationnelle de la résilience.
L’EMDR de groupe au service des plus précaires
En France, des praticiens EMDR interviennent auprès de réfugiés, bénéficiaires du RSA, personnes en réinsertion ou atteintes de cancer.
À Lyon, un partenariat entre thérapeutes et associations permet d’organiser des cycles de 5 à 6 séances pour une dizaine de participants.
L’usage du dessin facilite la confidentialité (en cas de violences sexuelles) et contourne les barrières linguistiques.
En cas de surcharge émotionnelle, un thérapeute assure un accompagnement individuel.
Les résultats sont encourageants : une baisse moyenne de 47 % des symptômes post-traumatiques et une amélioration globale de 57 %, même en contexte de grande précarité.
Des origines humanitaires
L’EMDR de groupe a d’abord été développé dans les zones de catastrophe naturelle, pour répondre à une demande massive avec peu de praticiens.
Depuis, il s’est adapté à des contextes variés :
- femmes victimes de viols de guerre en RDC
- rescapés d’attentats ou d’accidents majeurs
Sa force réside dans sa simplicité et son acceptabilité interculturelle. Grâce au dessin, nul besoin de raconter les détails du trauma, ce qui protège les victimes.
Former les relais de terrain
Lors d’un congrès international en 2018, les praticiens ont soulevé une piste cruciale : former des para-professionnels (personnes reconnues dans leur communauté, mais non psychologues) aux protocoles EMDR simplifiés et à des exercices de stabilisation.
En République centrafricaine, 17 travailleurs psychosociaux ainsi formés ont accompagné plus de 500 enfants et adolescents traumatisés par la guerre civile.
Une réponse à l’échelle mondiale
Près de 500 millions de personnes souffriraient de troubles post-traumatiques dans le monde.
L’OMS recommande des interventions de santé mentale « à faible intensité » : auto-soin guidé en ligne, groupes animés par para-professionnels formés, supervision à distance.
Y intégrer l’EMDR de groupe, comme le fait le Traumatic Stress Relief (TSR), pourrait renforcer l’efficacité, même dans les contextes les plus difficiles.
En France, cette logique en « trois étages » s’esquisse déjà :
- Psychoéducation et auto-soin (y compris Premiers secours en santé mentale)
- TSR animé par des soignants formés et supervisés
- Groupes EMDR par praticiens certifiés, avec recours à l’individuel pour les cas sévères.
Et face à l’éco-anxiété ?
La montée de l’éco-anxiété, surtout chez les jeunes, appelle aussi une réponse collective.
En combinant EMDR de groupe, Travail qui relie (écopsychologie) et rituels de deuil, certains stages montrent qu’affronter ensemble des émotions intenses, agréables ou douloureuses, renforce puissamment les liens et le sentiment d’agir.
« Là où croît le péril, croît aussi ce qui sauve. » – Hölderlin
Crédit Photo © Xavier Montoy
Article rédigé par:
Emmanuel CONTAMIN, Psychiatre, pédopsychiatre et superviseur EMDR-Europe. Il est motivé par l’accessibilité des soins (responsable de la commission EMDR pour tous de l’association EMDR-France), la transmission d’outils d’auto-thérapie et les enjeux socio-écosystémiques de notre résilience collective, avec la problématique de l’éco-anxiété qui devient majeure.
Françoise CONTAMIN, médecin et praticienne EMDR-Europe,
et Laetitia DE SCHOUTHEETE, psychologue clinicienne et praticienne EMDR-Europe.
Vous êtes à la recherche d’une Formation Certifiante et Officielle en EMDR IMO ® ?
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Formation Certifiée par France EMDR IMO ®.
La seule et unique Certification Officielle en EMDR IMO ® en Europe.
Cette formation vous permettra d’intégrer cet outil avec les outils thérapeutiques que vous utilisez déjà en pratique clinique.
Alors, rendez-vous à Paris, Marseille, Bordeaux, Annecy, Nancy, Strasbourg, Lausanne et Genève, avec des instituts membres de la CFHTB, pour une formation en EMDR INTEGRATIVE.
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Psychotraumatisme : comprendre pour accompagner vers la dévictimisation.
Notes de lecture d'EMDR.FR pour la formation, article du Dr Wilfrid MARTINEAU, Chef du pôle Psychiatrie et Santé mentale du CHU de Nantes. Formation à l’hypnose, EMDR, TOS, thérapie narrative et thérapie stratégique.
Solitude, honte, abandon, culpabilité, colère… Les victimes de psychotraumatisme vivent un bouleversement émotionnel profond. Derrière l’événement, c’est la façon dont le corps, l’esprit et l’entourage interagissent qui détermine l’ampleur de la blessure.
L’objectif thérapeutique ? Changer le regard porté sur l’événement, pour que la personne cesse d’être définie uniquement par lui.
Quand le corps se fige… et reste figé.
Chez l’animal, un traumatisme est souvent suivi de tremblements ou de décharges physiques qui permettent de retrouver un équilibre.
Chez l’humain, ces mécanismes existent aussi, mais sont souvent inhibés par la culture ou le regard d’autrui.
« Pleurer, trembler, se figer : autant de réactions naturelles… mais jugées et disqualifiées. »
Résultat : beaucoup se taisent, alimentant isolement, secret et ruminations. La mémoire traumatique, saturée de sensations brutes et d’émotions intenses, revient sous forme de reviviscences ou de réactions corporelles incontrôlées.
Un corps qui garde les stigmates.
Les signes physiques vont être nombreux : gorge nouée, ventre contracté, tensions musculaires, tachycardie, tremblements.
Le figement, réaction de survie immédiate, devient problématique lorsqu’il se répète ou surgit hors contexte.
Ce vécu s’accompagne souvent de honte ou de culpabilité, rendant l’événement indicible.
Une sécurité relationnelle brisée.
Après un trauma, le lien à l’autre sera profondément ébranlé.
Certains se replient, persuadés que personne ne peut comprendre leur détresse.
D’autres vivent un double choc : celui de l’agression et celui de l’absence – voire de la trahison – des proches. (défaillance de tiers sécure)
La conséquence la plus tenace reste l’hypervigilance : insomnie, réactions de fuite, peur constante, évitement de la nouveauté.
L’estime de soi en miettes.
L’impuissance ressentie au moment du drame fragilise l’image que la personne a d’elle-même.
La honte creuse la distance intérieure ; la culpabilité, qu’elle soit fondée ou non, enferme dans un passé rejoué en boucle :
« J’aurais dû… J’aurais pu… »
Parfois, la découverte brutale de sa vulnérabilité devient insupportable lorsqu’aucune ressource intérieure n’est perçue.
Quand les valeurs vacillent.
Le traumatisme ne touche pas seulement le corps ou l’estime de soi : il fissure aussi les fondations identitaires.
Haine, perte de foi en l’autre ou en la société, indifférence affective…
Chez certains, les petites joies n’ont plus de goût ; la capacité à se projeter disparaît.
La quête de justice ou de justification, souvent impossible, entretient la douleur et le sentiment d’injustice.
Ce que le soignant doit voir.
Les addictions, les troubles somatiques, le repli social ne sont que la partie émergée de l’iceberg.
L’enjeu, pour le soignant, est de se centrer sur le vécu présent, plutôt que sur la seule histoire passée.
Il se doit de valider les réactions corporelles, les expliquer, redonner un sens physiologique à ce qui est vécu comme une faiblesse : c’est déjà restaurer un peu de sécurité.
Le recadrage, pierre angulaire de la dévictimisation.
Recadrer ne signifie pas minimiser. C’est transformer la relation que la personne entretient avec son histoire.
Réactiver des souvenirs de soutien, identifier les moments d’action, retrouver des appuis, même infimes : chaque pas fissure le mur du trauma.
Toute injonction à « passer à autre chose » est à proscrire : elle risque de réactiver la blessure d’abandon.
Sortir de la seule identité de victime.
La « dévictimisation » ne nie pas le fait d’avoir été victime, mais refuse d’en faire l’unique prisme de lecture de soi.
C’est intégrer l’événement à son histoire tout en se redécouvrant comme une personne porteuse de ressources, capable d’agir et de se relier.
Alors, en pratique, il nous faut
Créer un espace sûr : une relation thérapeutique stable et sans jugement.
Travailler sur le corps : restaurer la sensation de sécurité par des techniques adaptées.
Remettre en mots : reconnecter le vécu à des valeurs personnelles encore présentes.
« Le rôle du soignant n’est pas d’effacer la cicatrice, mais de la rendre moins douloureuse, pour que la personne puisse se tenir à nouveau debout, avec une identité plus vaste que sa blessure. »
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Cette formation vous permettra d’intégrer cet outil avec les outils thérapeutiques que vous utilisez déjà en pratique clinique.
Alors, rendez-vous à Paris, Marseille, Bordeaux, Annecy, Nancy, Strasbourg, Lausanne et Genève, avec des instituts membres de la CFHTB, pour une formation en EMDR INTEGRATIVE.
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L’objectif thérapeutique ? Changer le regard porté sur l’événement, pour que la personne cesse d’être définie uniquement par lui.
Quand le corps se fige… et reste figé.
Chez l’animal, un traumatisme est souvent suivi de tremblements ou de décharges physiques qui permettent de retrouver un équilibre.
Chez l’humain, ces mécanismes existent aussi, mais sont souvent inhibés par la culture ou le regard d’autrui.
« Pleurer, trembler, se figer : autant de réactions naturelles… mais jugées et disqualifiées. »
Résultat : beaucoup se taisent, alimentant isolement, secret et ruminations. La mémoire traumatique, saturée de sensations brutes et d’émotions intenses, revient sous forme de reviviscences ou de réactions corporelles incontrôlées.
Un corps qui garde les stigmates.
Les signes physiques vont être nombreux : gorge nouée, ventre contracté, tensions musculaires, tachycardie, tremblements.
Le figement, réaction de survie immédiate, devient problématique lorsqu’il se répète ou surgit hors contexte.
Ce vécu s’accompagne souvent de honte ou de culpabilité, rendant l’événement indicible.
Une sécurité relationnelle brisée.
Après un trauma, le lien à l’autre sera profondément ébranlé.
Certains se replient, persuadés que personne ne peut comprendre leur détresse.
D’autres vivent un double choc : celui de l’agression et celui de l’absence – voire de la trahison – des proches. (défaillance de tiers sécure)
La conséquence la plus tenace reste l’hypervigilance : insomnie, réactions de fuite, peur constante, évitement de la nouveauté.
L’estime de soi en miettes.
L’impuissance ressentie au moment du drame fragilise l’image que la personne a d’elle-même.
La honte creuse la distance intérieure ; la culpabilité, qu’elle soit fondée ou non, enferme dans un passé rejoué en boucle :
« J’aurais dû… J’aurais pu… »
Parfois, la découverte brutale de sa vulnérabilité devient insupportable lorsqu’aucune ressource intérieure n’est perçue.
Quand les valeurs vacillent.
Le traumatisme ne touche pas seulement le corps ou l’estime de soi : il fissure aussi les fondations identitaires.
Haine, perte de foi en l’autre ou en la société, indifférence affective…
Chez certains, les petites joies n’ont plus de goût ; la capacité à se projeter disparaît.
La quête de justice ou de justification, souvent impossible, entretient la douleur et le sentiment d’injustice.
Ce que le soignant doit voir.
Les addictions, les troubles somatiques, le repli social ne sont que la partie émergée de l’iceberg.
L’enjeu, pour le soignant, est de se centrer sur le vécu présent, plutôt que sur la seule histoire passée.
Il se doit de valider les réactions corporelles, les expliquer, redonner un sens physiologique à ce qui est vécu comme une faiblesse : c’est déjà restaurer un peu de sécurité.
Le recadrage, pierre angulaire de la dévictimisation.
Recadrer ne signifie pas minimiser. C’est transformer la relation que la personne entretient avec son histoire.
Réactiver des souvenirs de soutien, identifier les moments d’action, retrouver des appuis, même infimes : chaque pas fissure le mur du trauma.
Toute injonction à « passer à autre chose » est à proscrire : elle risque de réactiver la blessure d’abandon.
Sortir de la seule identité de victime.
La « dévictimisation » ne nie pas le fait d’avoir été victime, mais refuse d’en faire l’unique prisme de lecture de soi.
C’est intégrer l’événement à son histoire tout en se redécouvrant comme une personne porteuse de ressources, capable d’agir et de se relier.
Alors, en pratique, il nous faut
Créer un espace sûr : une relation thérapeutique stable et sans jugement.
Travailler sur le corps : restaurer la sensation de sécurité par des techniques adaptées.
Remettre en mots : reconnecter le vécu à des valeurs personnelles encore présentes.
« Le rôle du soignant n’est pas d’effacer la cicatrice, mais de la rendre moins douloureuse, pour que la personne puisse se tenir à nouveau debout, avec une identité plus vaste que sa blessure. »
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Trauma : quand la qualité du lien change tout.
Travailler sur la sécurité de la relation. Notes de lecture d'EMDR.FR pour la formation, article du Dr Emmanuel MALPHETTES, chef de service de psychiatrie au CHU de Nantes. Responsable du centre régional sur le psychotraumatisme et d’une unité de consultation de post-urgence. Formateur au DU d’hypnose, au DIU de prise en charge de la douleur.
Le texte suivant est en partie composé d’extraits d’un chapitre du « Grand livre du trauma complexe » (Dunod, 2023). Il présente le cas d’une femme au vécu difficile qui a dû fuir un père maltraitant...
Comment le soutien ou l’abandon façonnent-ils la guérison après une épreuve.
Deux soirées, deux jeunes femmes, deux histoires qui, sur le papier, se ressemblent. Pourtant, leurs trajectoires après l’événement n’auraient pas pu être plus différentes. Ce que révèle cette comparaison, c’est une vérité trop souvent sous-estimée : en matière de traumatisme, ce n’est pas seulement ce qui arrive qui marque une vie, mais aussi — et parfois surtout — la manière dont l’entourage réagit. (Notion de tiers sécure, dont on parle à chaque instant).
Mme M : un traumatisme pris au sérieux, dès les premières heures
Mme M a 20 ans. Lors d’un week-end d’intégration, l’alcool coule à flots. L’ambiance festive bascule brutalement lorsqu’elle subit une agression sexuelle, suivie d’un vol. Choquée, elle parvient tout de même à en parler immédiatement à ses amis.
Et là, un détail change tout : ses proches réagissent. Ils contactent ses parents, qui se déplacent immédiatement. Soutien, présence, écoute — aucun jugement, seulement la certitude qu’elle n’est pas seule.
Les jours suivants, ses parents portent plainte, sont reçus rapidement par le directeur de l’école, et des mesures sont prises. Un rendez-vous médical est organisé.
Cette prise en charge rapide et enveloppante limite l’installation de symptômes traumatiques durables. Certes, Mme M vit quelques moments de reviviscence, mais une séance d’EMDR — une technique thérapeutique basée sur l’intégration par les mouvements oculaires (IMO)— l’aide à mobiliser ses ressources. Elle reprend ses études, ses liens sociaux, et continue d’avancer.
Mlle K : le traumatisme aggravé par le regard des autres
Mlle K, 23 ans, vit un scénario similaire. Une soirée entre amis, de l’alcool, puis l’agression par un inconnu. Mais au moment de chercher du réconfort, le décor change radicalement.
Ses amis ne lui tendent pas la main. Au contraire, ils pointent du doigt son comportement : « Tu avais trop bu », « Tu étais habillée comment ? ». L’insinuation est claire : elle est en partie responsable de ce qui lui est arrivé.
Cette absence de soutien agit comme un coup de massue supplémentaire. Isolée, Mlle K met des mois à trouver quelqu’un à qui parler. Lorsqu’elle consulte enfin, le lien de confiance est fragile. Son sentiment d’insécurité est profond, sa méfiance constante. Le travail thérapeutique, entravé par cette défiance, s’annonce long et semé d’embûches.
Quand l’entourage devient facteur de guérison… ou de rechute.
Ces deux récits montrent l’importance cruciale du « contexte relationnel » après un traumatisme. L’événement initial compte, bien sûr, mais la blessure émotionnelle est modelée, amplifiée ou apaisée par la réaction des proches.
Une oreille attentive, une présence non jugeante, des actes concrets (porter plainte, consulter, protéger) peuvent amortir le choc psychologique. À l’inverse, le jugement, l’isolement ou l’inaction peuvent transformer une blessure en fracture durable.
La thérapie comme “réducteur de complexité”
Dans les situations de crise, tout devient flou. Les émotions débordent, la perception du danger reste à vif, et l’avenir semble hors de portée. La thérapie agit alors comme un « réducteur de complexité » : elle aide à trier, à mettre de l’ordre dans ce chaos émotionnel, à reconstruire des repères de sécurité.
Les approches comme l’EMDR permettent de revisiter le souvenir traumatique sans le revivre, de désamorcer l’intensité émotionnelle et de réinscrire l’événement dans une histoire de vie plus large. Mais pour que ce processus fonctionne, la personne doit se sentir en sécurité dans la relation thérapeutique — un défi majeur pour ceux dont la confiance a été brisée.
Un enjeu de société.
Ces histoires ne concernent pas seulement Mme M, Mlle K et leur cercle proche. Elles nous interpellent tous. Combien de victimes n’osent pas parler, de peur d’être jugées ou rejetées ? Combien voient leur souffrance prolongée non pas par l’événement lui-même, mais par l’absence de soutien après coup ?
Dans un monde où la parole se libère mais où les réflexes de jugement persistent, comprendre le rôle de l’entourage est essentiel. Savoir accueillir un récit douloureux, c’est parfois sauver une trajectoire de vie.
Que pouvons-nous faire, concrètement ?
Face à une personne ayant vécu un événement traumatique, notre réaction peut faire la différence :
• Écouter sans interrompre : laisser la personne raconter, à son rythme.
• Éviter tout jugement ou question culpabilisante du genre: « Pourquoi étais-tu là ? » ou « Tu avais bu combien ? » ne font que renforcer la honte.
• Soutenir dans les démarches : accompagner chez le médecin, aider à porter plainte, être présent physiquement.
• Répéter que ce n’est pas sa faute : un message simple, mais qui peut briser un cercle de culpabilité.
L’espoir, même après des débuts difficiles.
Le chemin de Mlle K sera plus long que celui de Mme M. Mais il existe. La confiance peut se reconstruire, même après des trahisons relationnelles. La thérapie, lorsqu’elle parvient à créer un espace de sécurité, peut devenir le point d’appui qui manquait.
Pour Mme M, la rapidité et la qualité du soutien ont agi comme un amortisseur puissant. Elle a pu éviter la spirale traumatique chronique. Pour Mlle K, ce soutien devra se construire plus tard, mais il n’est pas trop tard pour écrire une suite différente.
Changer le récit collectif.
Ces histoires sont aussi un appel à changer notre culture du regard. Tant que l’on continuera à examiner les comportements des victimes au lieu des actes des agresseurs, on continuera à multiplier les Mlle K — des trajectoires où la blessure s’aggrave faute de soutien.
À l’inverse, si chaque personne qui reçoit un témoignage sait réagir avec écoute, non-jugement et action, nous multiplierons les Mme M — des histoires où, malgré le choc, la vie reprend plus vite et plus solidement.
En résumé : un traumatisme n’est pas qu’une affaire individuelle. C’est un événement qui se joue dans un réseau de liens, et c’est dans ce réseau que se joue aussi la guérison. La qualité du premier accueil, la présence ou l’absence de soutien, peuvent transformer un futur. Et parfois, il suffit d’un geste juste, d’une parole bienveillante, pour faire toute la différence.
Crédit Photo © Xavier Montoy
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Comment le soutien ou l’abandon façonnent-ils la guérison après une épreuve.
Deux soirées, deux jeunes femmes, deux histoires qui, sur le papier, se ressemblent. Pourtant, leurs trajectoires après l’événement n’auraient pas pu être plus différentes. Ce que révèle cette comparaison, c’est une vérité trop souvent sous-estimée : en matière de traumatisme, ce n’est pas seulement ce qui arrive qui marque une vie, mais aussi — et parfois surtout — la manière dont l’entourage réagit. (Notion de tiers sécure, dont on parle à chaque instant).
Mme M : un traumatisme pris au sérieux, dès les premières heures
Mme M a 20 ans. Lors d’un week-end d’intégration, l’alcool coule à flots. L’ambiance festive bascule brutalement lorsqu’elle subit une agression sexuelle, suivie d’un vol. Choquée, elle parvient tout de même à en parler immédiatement à ses amis.
Et là, un détail change tout : ses proches réagissent. Ils contactent ses parents, qui se déplacent immédiatement. Soutien, présence, écoute — aucun jugement, seulement la certitude qu’elle n’est pas seule.
Les jours suivants, ses parents portent plainte, sont reçus rapidement par le directeur de l’école, et des mesures sont prises. Un rendez-vous médical est organisé.
Cette prise en charge rapide et enveloppante limite l’installation de symptômes traumatiques durables. Certes, Mme M vit quelques moments de reviviscence, mais une séance d’EMDR — une technique thérapeutique basée sur l’intégration par les mouvements oculaires (IMO)— l’aide à mobiliser ses ressources. Elle reprend ses études, ses liens sociaux, et continue d’avancer.
Mlle K : le traumatisme aggravé par le regard des autres
Mlle K, 23 ans, vit un scénario similaire. Une soirée entre amis, de l’alcool, puis l’agression par un inconnu. Mais au moment de chercher du réconfort, le décor change radicalement.
Ses amis ne lui tendent pas la main. Au contraire, ils pointent du doigt son comportement : « Tu avais trop bu », « Tu étais habillée comment ? ». L’insinuation est claire : elle est en partie responsable de ce qui lui est arrivé.
Cette absence de soutien agit comme un coup de massue supplémentaire. Isolée, Mlle K met des mois à trouver quelqu’un à qui parler. Lorsqu’elle consulte enfin, le lien de confiance est fragile. Son sentiment d’insécurité est profond, sa méfiance constante. Le travail thérapeutique, entravé par cette défiance, s’annonce long et semé d’embûches.
Quand l’entourage devient facteur de guérison… ou de rechute.
Ces deux récits montrent l’importance cruciale du « contexte relationnel » après un traumatisme. L’événement initial compte, bien sûr, mais la blessure émotionnelle est modelée, amplifiée ou apaisée par la réaction des proches.
Une oreille attentive, une présence non jugeante, des actes concrets (porter plainte, consulter, protéger) peuvent amortir le choc psychologique. À l’inverse, le jugement, l’isolement ou l’inaction peuvent transformer une blessure en fracture durable.
La thérapie comme “réducteur de complexité”
Dans les situations de crise, tout devient flou. Les émotions débordent, la perception du danger reste à vif, et l’avenir semble hors de portée. La thérapie agit alors comme un « réducteur de complexité » : elle aide à trier, à mettre de l’ordre dans ce chaos émotionnel, à reconstruire des repères de sécurité.
Les approches comme l’EMDR permettent de revisiter le souvenir traumatique sans le revivre, de désamorcer l’intensité émotionnelle et de réinscrire l’événement dans une histoire de vie plus large. Mais pour que ce processus fonctionne, la personne doit se sentir en sécurité dans la relation thérapeutique — un défi majeur pour ceux dont la confiance a été brisée.
Un enjeu de société.
Ces histoires ne concernent pas seulement Mme M, Mlle K et leur cercle proche. Elles nous interpellent tous. Combien de victimes n’osent pas parler, de peur d’être jugées ou rejetées ? Combien voient leur souffrance prolongée non pas par l’événement lui-même, mais par l’absence de soutien après coup ?
Dans un monde où la parole se libère mais où les réflexes de jugement persistent, comprendre le rôle de l’entourage est essentiel. Savoir accueillir un récit douloureux, c’est parfois sauver une trajectoire de vie.
Que pouvons-nous faire, concrètement ?
Face à une personne ayant vécu un événement traumatique, notre réaction peut faire la différence :
• Écouter sans interrompre : laisser la personne raconter, à son rythme.
• Éviter tout jugement ou question culpabilisante du genre: « Pourquoi étais-tu là ? » ou « Tu avais bu combien ? » ne font que renforcer la honte.
• Soutenir dans les démarches : accompagner chez le médecin, aider à porter plainte, être présent physiquement.
• Répéter que ce n’est pas sa faute : un message simple, mais qui peut briser un cercle de culpabilité.
L’espoir, même après des débuts difficiles.
Le chemin de Mlle K sera plus long que celui de Mme M. Mais il existe. La confiance peut se reconstruire, même après des trahisons relationnelles. La thérapie, lorsqu’elle parvient à créer un espace de sécurité, peut devenir le point d’appui qui manquait.
Pour Mme M, la rapidité et la qualité du soutien ont agi comme un amortisseur puissant. Elle a pu éviter la spirale traumatique chronique. Pour Mlle K, ce soutien devra se construire plus tard, mais il n’est pas trop tard pour écrire une suite différente.
Changer le récit collectif.
Ces histoires sont aussi un appel à changer notre culture du regard. Tant que l’on continuera à examiner les comportements des victimes au lieu des actes des agresseurs, on continuera à multiplier les Mlle K — des trajectoires où la blessure s’aggrave faute de soutien.
À l’inverse, si chaque personne qui reçoit un témoignage sait réagir avec écoute, non-jugement et action, nous multiplierons les Mme M — des histoires où, malgré le choc, la vie reprend plus vite et plus solidement.
En résumé : un traumatisme n’est pas qu’une affaire individuelle. C’est un événement qui se joue dans un réseau de liens, et c’est dans ce réseau que se joue aussi la guérison. La qualité du premier accueil, la présence ou l’absence de soutien, peuvent transformer un futur. Et parfois, il suffit d’un geste juste, d’une parole bienveillante, pour faire toute la différence.
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Trauma, désamour et doute en thérapie.
Exister malgré tout. Quand l’amour manque, le doute s’installe. Notes de lecture d'EMDR.FR pour la formation, un texte de Vera LIKAJ qui est psychologue clinicienne, psychothérapeute, praticienne en thérapies brèves, hypnose et mouvements alternatifs et intervenante au DU d’hypnose médicale de Lille. (Cette thérapeute fait partie des praticiennes que nous affectionnons, rendant simples des notions relativement complexes).
Il y a ces blessures invisibles, celles qui ne laissent ni cicatrice ni fracture, mais qui fissurent l’âme.
Grandir sans amour, ou dans un amour imprévisible, c’est vivre dans un monde où rien n’est jamais sûr — ni la tendresse, ni sa propre valeur.
Et quand ces manques se combinent à un traumatisme, la personne ne doute pas seulement des autres : elle doute de son droit même à exister !
C’est là que commence l’histoire racontée dans ce texte : celle d’une patiente qui avance en thérapie avec, en toile de fond, le poids de ses blessures précoces et de ses épreuves ultérieures.
Des traces profondes
Le traumatisme, ici, dans cet article, n’est pas seulement l’accident ou l’agression.
C’est aussi et surtout l’absence de regard bienveillant dans l’enfance, la solitude face à la peur, le sentiment de n’avoir été ni vu ni entendu.
Et ces expériences vont laisser un héritage complexe :
• Une image de soi fragilisée.
• Une méfiance quasi instinctive envers les liens.
• Une vigilance constante pour prévenir la douleur.
En thérapie, cela va se traduire très souvent par un mouvement d’approche-retrait : envie de se confier, mais peur d’être blessée à nouveau.
Une relation thérapeutique sous tension.
Le texte de Vera LIKAJ, décrit avec finesse le jeu délicat qui s’installe entre patiente et thérapeute.
La patiente teste, doute, et observe.
Le thérapeute avance avec patience, sachant que chaque geste, chaque silence, peut être interprété à travers le filtre du passé.
La moindre dissonance peut réveiller une tempête : un retard, un changement d’intonation, une question mal perçue…
Dans cet espace, la confiance n’est pas donnée : elle se gagne millimètre par millimètre.
Entre lucidité et espoir.
Le récit ne cède ni au pessimisme, ni à l’angélisme.
Oui, le trauma laisse des empreintes durables.
Oui, certaines blessures restent sensibles, même après un long travail.
Mais la thérapie offre un lieu rare : un espace où la patiente peut essayer d’exister autrement.
Le texte montre comment, dans le meilleur des cas, la relation thérapeutique devient un laboratoire, c'est à dire un endroit pour tester de nouvelles manières d’être en lien, de nouvelles façons de se percevoir, d’oser se dire sans craindre la sanction.
Le poids du désamour.
Vivre sans amour stable, c’est vivre dans un monde où la chaleur humaine est perçue comme provisoire ou conditionnelle.
La patiente apprend à se protéger en ne demandant rien — ou en demandant trop tard.
Le thérapeute, lui, doit composer avec ce paradoxe : répondre aux besoins tout en aidant le patient à les exprimer.
Ce travail est lent et Il implique d’affronter les défenses qui, autrefois, ont sauvé la personne mais qui, aujourd’hui, l’isolent au contraire.
Quand le doute ronge le lien.
Le doute est un compagnon obstiné :
• Doute sur la sincérité de l’autre.
• Doute sur ses propres perceptions.
• Doute sur la possibilité même du changement.
Le texte de Vera LIKAJ explore comment ce doute peut se glisser dans la thérapie elle-même.
La patiente peut penser : “Ce qu’il ou elle me dit, le pense-t-il vraiment ?”
Ou encore : “Si je montre qui je suis, sera-t-il encore là ?”
Ces questions, douloureuses mais légitimes, font partie intégrante du processus.
Le rôle du thérapeute, bien plus qu’une technique.
Face à ces histoires de désamour et de trauma, la technique ne suffit certainement pas.
Ce qui compte, c’est la qualité de la présence, c'est à dire la constance, la capacité à accueillir la colère aussi bien que la tendresse, à rester là, même lorsque la relation tangue.
Le thérapeute doit accepter d’être mis à l’épreuve, parfois critiqué, parfois rejeté.
Et pourtant, toujours tenir le fil.
Parce que, pour le patient, chaque fois que le lien survit à la tempête, une expérience nouvelle s’inscrit.
Exister malgré tout
Peu à peu, la thérapie devient un lieu où le patient peut sentir qu’il a droit à une place, pas parce qu’il a bien agi, pas parce qu’il a “mérité” l’amour, mais juste parce qu’il est. Et cela ne se fait pas en ligne droite.
Les rechutes, les silences, les moments de retrait font partie du chemin.
Mais chaque retour, chaque reprise du dialogue, vient nourrir une nouvelle expérience.
Un texte qui parle à tous.
Si cette histoire touche, c’est parce qu’elle parle de quelque chose de profondément humain, c'est à dire le besoin d’être vu, entendu, reconnu.
Et la difficulté de croire à l’amour quand on a grandi dans son absence.
C’est un rappel que la thérapie n’est pas seulement une question de réparation, et c’est aussi apprendre à habiter pleinement son existence, même quand le passé a tout fait pour nous en écarter.
Lire l'article...
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Grandir sans amour, ou dans un amour imprévisible, c’est vivre dans un monde où rien n’est jamais sûr — ni la tendresse, ni sa propre valeur.
Et quand ces manques se combinent à un traumatisme, la personne ne doute pas seulement des autres : elle doute de son droit même à exister !
C’est là que commence l’histoire racontée dans ce texte : celle d’une patiente qui avance en thérapie avec, en toile de fond, le poids de ses blessures précoces et de ses épreuves ultérieures.
Des traces profondes
Le traumatisme, ici, dans cet article, n’est pas seulement l’accident ou l’agression.
C’est aussi et surtout l’absence de regard bienveillant dans l’enfance, la solitude face à la peur, le sentiment de n’avoir été ni vu ni entendu.
Et ces expériences vont laisser un héritage complexe :
• Une image de soi fragilisée.
• Une méfiance quasi instinctive envers les liens.
• Une vigilance constante pour prévenir la douleur.
En thérapie, cela va se traduire très souvent par un mouvement d’approche-retrait : envie de se confier, mais peur d’être blessée à nouveau.
Une relation thérapeutique sous tension.
Le texte de Vera LIKAJ, décrit avec finesse le jeu délicat qui s’installe entre patiente et thérapeute.
La patiente teste, doute, et observe.
Le thérapeute avance avec patience, sachant que chaque geste, chaque silence, peut être interprété à travers le filtre du passé.
La moindre dissonance peut réveiller une tempête : un retard, un changement d’intonation, une question mal perçue…
Dans cet espace, la confiance n’est pas donnée : elle se gagne millimètre par millimètre.
Entre lucidité et espoir.
Le récit ne cède ni au pessimisme, ni à l’angélisme.
Oui, le trauma laisse des empreintes durables.
Oui, certaines blessures restent sensibles, même après un long travail.
Mais la thérapie offre un lieu rare : un espace où la patiente peut essayer d’exister autrement.
Le texte montre comment, dans le meilleur des cas, la relation thérapeutique devient un laboratoire, c'est à dire un endroit pour tester de nouvelles manières d’être en lien, de nouvelles façons de se percevoir, d’oser se dire sans craindre la sanction.
Le poids du désamour.
Vivre sans amour stable, c’est vivre dans un monde où la chaleur humaine est perçue comme provisoire ou conditionnelle.
La patiente apprend à se protéger en ne demandant rien — ou en demandant trop tard.
Le thérapeute, lui, doit composer avec ce paradoxe : répondre aux besoins tout en aidant le patient à les exprimer.
Ce travail est lent et Il implique d’affronter les défenses qui, autrefois, ont sauvé la personne mais qui, aujourd’hui, l’isolent au contraire.
Quand le doute ronge le lien.
Le doute est un compagnon obstiné :
• Doute sur la sincérité de l’autre.
• Doute sur ses propres perceptions.
• Doute sur la possibilité même du changement.
Le texte de Vera LIKAJ explore comment ce doute peut se glisser dans la thérapie elle-même.
La patiente peut penser : “Ce qu’il ou elle me dit, le pense-t-il vraiment ?”
Ou encore : “Si je montre qui je suis, sera-t-il encore là ?”
Ces questions, douloureuses mais légitimes, font partie intégrante du processus.
Le rôle du thérapeute, bien plus qu’une technique.
Face à ces histoires de désamour et de trauma, la technique ne suffit certainement pas.
Ce qui compte, c’est la qualité de la présence, c'est à dire la constance, la capacité à accueillir la colère aussi bien que la tendresse, à rester là, même lorsque la relation tangue.
Le thérapeute doit accepter d’être mis à l’épreuve, parfois critiqué, parfois rejeté.
Et pourtant, toujours tenir le fil.
Parce que, pour le patient, chaque fois que le lien survit à la tempête, une expérience nouvelle s’inscrit.
Exister malgré tout
Peu à peu, la thérapie devient un lieu où le patient peut sentir qu’il a droit à une place, pas parce qu’il a bien agi, pas parce qu’il a “mérité” l’amour, mais juste parce qu’il est. Et cela ne se fait pas en ligne droite.
Les rechutes, les silences, les moments de retrait font partie du chemin.
Mais chaque retour, chaque reprise du dialogue, vient nourrir une nouvelle expérience.
Un texte qui parle à tous.
Si cette histoire touche, c’est parce qu’elle parle de quelque chose de profondément humain, c'est à dire le besoin d’être vu, entendu, reconnu.
Et la difficulté de croire à l’amour quand on a grandi dans son absence.
C’est un rappel que la thérapie n’est pas seulement une question de réparation, et c’est aussi apprendre à habiter pleinement son existence, même quand le passé a tout fait pour nous en écarter.
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Traitement stratégique du syndrome de stress post-traumatique.
Ou remettre le passé à sa place. Notes de lecture d'EMDR.FR pour les formations.
Un accident, une agression, un attentat… ou parfois un événement que d’autres jugeraient anodin. Le traumatisme psychologique n’obéit pas à des règles objectives : il dépend de ce que la personne a ressenti. Pour certains, un seul instant suffit à fissurer leur rapport au monde, à briser la continuité entre un « avant » rassurant et un « après » dominé par la peur. C’est là que le syndrome de stress post-traumatique (SSPT, PTSD) s’installe.
Roberta Milanese est psychologue et spécialiste des thérapies brèves stratégiques, et propose une approche singulière : le roman du traumatisme. Une technique qui invite non pas à fuir ou oublier l’événement, mais au contraire à l’affronter par l’écriture, jusqu’à le reléguer définitivement dans le passé.
Quand le passé envahit le présent.
Le mot « traumatisme » vient du grec et signifie « blessure ». Lorsqu’elle est psychique, cette blessure se manifeste par des symptômes envahissants : souvenirs intrusifs, flashbacks, cauchemars, insomnie, irritabilité, anxiété diffuse… Mais aussi par un retrait progressif de la vie sociale et un détachement émotionnel vis-à-vis des autres.
Pour la victime, l’événement reste présent, comme figé dans un éternel maintenant. Ce n’est pas la gravité objective qui compte : un choc peut être déclenché par un accident de voiture ou… la découverte d’un message compromettant sur le téléphone de son conjoint.
Des réactions qui souvent aggravent le problème.
Face à cette douleur, des mécanismes de défense se mettent en place, souvent de façon inconsciente.
• Essayer d’oublier : lutter contre les pensées liées au trauma ne fait que les renforcer. Comme l’avait écrit Montaigne : « Rien ne fixe si intensément une chose dans la mémoire que le désir de l’oublier. »
• L'évitement : fuir les lieux, les personnes ou même les émotions qui rappellent l’événement. Un soulagement immédiat… mais qui, à long terme, élargit le champ de ce que l’on redoute.
• Chercher constamment du réconfort : avoir toujours quelqu’un pour rassurer ou protéger peut sembler apaisant, mais finit par confirmer une incapacité à gérer seul les situations.
Ces stratégies, censées protéger, entretiennent en réalité la blessure. Pire, elles peuvent mener à un isolement profond ou à la dépression.
C'est pourquoi, l'EMDR obtient aujourd'hui de tels bons résultats par rapport aux "thérapies bisounours" telles que la sophrologie ou l'hypnose.
L’alliance essentielle thérapeute-patient
Quand une personne en PTSD franchit la porte d’un cabinet, elle arrive avec une motivation forte… mais une sensation d’impuissance totale. Le rôle du thérapeute va être double :
A la fois être un technicien précis, capable de guider efficacement vers l'amélioration.
A la fois offrir une coparticipation émotionnelle réelle, afin que le patient se sente compris. Le patient devenant cothérapeute.
Cette relation est cruciale et fondamentale: une attitude trop froide ou médicalisante compromet l’adhésion au traitement. Le thérapeute doit savoir osciller entre proximité et distance, savoir-faire et empathie, tout en adaptant sa communication verbale et non verbale.
Écrire pour se libérer : le roman du traumatisme
Au cœur de l'approche de Roberta Milanese, une prescription étonnante : à la fin de la première séance, le patient est invité à écrire chaque jour le récit complet de son traumatisme. Comme un roman, avec tous les détails possibles : images, sensations, pensées, émotions.
Le processus suit une logique simple mais puissante :
• Extérioriser : mettre sur papier ce qui hante l’esprit.
• Répéter : relire et réécrire chaque jour déclenche un phénomène d’habituation, d'intégration, réduisant la charge émotionnelle.
• Reclasser : l’événement retrouve sa place dans la chronologie de vie, et cesse d’envahir le présent.
• Ritualiser : remettre les écrits au thérapeute devient un acte symbolique de passage.
Au fil des jours, le souvenir perd de sa force, la peur s’atténue, et la blessure devient cicatrice.
Un protocole à l’efficacité remarquable.
Les chiffres sont frappants : dans environ 95 % des cas, cette approche permet de résoudre le SSPT en moyenne en sept séances. Et dans la moitié des situations, les premiers effets se font sentir entre la première et la deuxième rencontre.
À l’inverse, les patients qui refusent de pratiquer l’exercice ne constatent généralement que peu d'amélioration. Pour Milanese, c’est une preuve : pour sortir du tunnel, il faut accepter d’y entrer.
Le défi pour le thérapeute est donc de vaincre la résistance initiale du patient à replonger dans un souvenir douloureux. Cela passe par l’usage d’images parlantes : la plaie infectée qu’il faut désinfecter chaque jour malgré la douleur, ou le médicament amer qui soigne vraiment.
Le patient passe alors du mode plaignant au mode co-thérapeute.
Et après ?
Le roman du traumatisme n’est que la première étape. Une fois l’événement repositionné dans le passé, il faut encore travailler sur les autres comportements dysfonctionnels, comme l’évitement ou la dépendance au réconfort.
Dans certains cas, le traumatisme est « pur » : une fois traité, tout rentre dans l’ordre. Mais souvent, il a ouvert la porte à d’autres troubles — phobies, addictions, troubles alimentaires, dépression. C’est alors un travail « poupées russes » dans lequel on retire une couche, puis une autre, jusqu’à ce que les problèmes soient entièrement résolus.
Traverser pour revoir le soleil
La force de cette approche réside dans sa clarté : il ne s’agit pas d’oublier ou de contourner le trauma, mais de le traverser volontairement pour en réduire le pouvoir destructeur.
Comme le rappelle Shakespeare, « Il n’y a pas de nuit si longue que le jour ne vienne. » Avec un accompagnement solide, la lumière revient, et le passé retrouve enfin sa place, et de pouvoir ainsi le ranger dans le tiroir des mauvais souvenirs.
Crédit Photo © Xavier Montoy
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Roberta Milanese est psychologue et spécialiste des thérapies brèves stratégiques, et propose une approche singulière : le roman du traumatisme. Une technique qui invite non pas à fuir ou oublier l’événement, mais au contraire à l’affronter par l’écriture, jusqu’à le reléguer définitivement dans le passé.
Quand le passé envahit le présent.
Le mot « traumatisme » vient du grec et signifie « blessure ». Lorsqu’elle est psychique, cette blessure se manifeste par des symptômes envahissants : souvenirs intrusifs, flashbacks, cauchemars, insomnie, irritabilité, anxiété diffuse… Mais aussi par un retrait progressif de la vie sociale et un détachement émotionnel vis-à-vis des autres.
Pour la victime, l’événement reste présent, comme figé dans un éternel maintenant. Ce n’est pas la gravité objective qui compte : un choc peut être déclenché par un accident de voiture ou… la découverte d’un message compromettant sur le téléphone de son conjoint.
Des réactions qui souvent aggravent le problème.
Face à cette douleur, des mécanismes de défense se mettent en place, souvent de façon inconsciente.
• Essayer d’oublier : lutter contre les pensées liées au trauma ne fait que les renforcer. Comme l’avait écrit Montaigne : « Rien ne fixe si intensément une chose dans la mémoire que le désir de l’oublier. »
• L'évitement : fuir les lieux, les personnes ou même les émotions qui rappellent l’événement. Un soulagement immédiat… mais qui, à long terme, élargit le champ de ce que l’on redoute.
• Chercher constamment du réconfort : avoir toujours quelqu’un pour rassurer ou protéger peut sembler apaisant, mais finit par confirmer une incapacité à gérer seul les situations.
Ces stratégies, censées protéger, entretiennent en réalité la blessure. Pire, elles peuvent mener à un isolement profond ou à la dépression.
C'est pourquoi, l'EMDR obtient aujourd'hui de tels bons résultats par rapport aux "thérapies bisounours" telles que la sophrologie ou l'hypnose.
L’alliance essentielle thérapeute-patient
Quand une personne en PTSD franchit la porte d’un cabinet, elle arrive avec une motivation forte… mais une sensation d’impuissance totale. Le rôle du thérapeute va être double :
A la fois être un technicien précis, capable de guider efficacement vers l'amélioration.
A la fois offrir une coparticipation émotionnelle réelle, afin que le patient se sente compris. Le patient devenant cothérapeute.
Cette relation est cruciale et fondamentale: une attitude trop froide ou médicalisante compromet l’adhésion au traitement. Le thérapeute doit savoir osciller entre proximité et distance, savoir-faire et empathie, tout en adaptant sa communication verbale et non verbale.
Écrire pour se libérer : le roman du traumatisme
Au cœur de l'approche de Roberta Milanese, une prescription étonnante : à la fin de la première séance, le patient est invité à écrire chaque jour le récit complet de son traumatisme. Comme un roman, avec tous les détails possibles : images, sensations, pensées, émotions.
Le processus suit une logique simple mais puissante :
• Extérioriser : mettre sur papier ce qui hante l’esprit.
• Répéter : relire et réécrire chaque jour déclenche un phénomène d’habituation, d'intégration, réduisant la charge émotionnelle.
• Reclasser : l’événement retrouve sa place dans la chronologie de vie, et cesse d’envahir le présent.
• Ritualiser : remettre les écrits au thérapeute devient un acte symbolique de passage.
Au fil des jours, le souvenir perd de sa force, la peur s’atténue, et la blessure devient cicatrice.
Un protocole à l’efficacité remarquable.
Les chiffres sont frappants : dans environ 95 % des cas, cette approche permet de résoudre le SSPT en moyenne en sept séances. Et dans la moitié des situations, les premiers effets se font sentir entre la première et la deuxième rencontre.
À l’inverse, les patients qui refusent de pratiquer l’exercice ne constatent généralement que peu d'amélioration. Pour Milanese, c’est une preuve : pour sortir du tunnel, il faut accepter d’y entrer.
Le défi pour le thérapeute est donc de vaincre la résistance initiale du patient à replonger dans un souvenir douloureux. Cela passe par l’usage d’images parlantes : la plaie infectée qu’il faut désinfecter chaque jour malgré la douleur, ou le médicament amer qui soigne vraiment.
Le patient passe alors du mode plaignant au mode co-thérapeute.
Et après ?
Le roman du traumatisme n’est que la première étape. Une fois l’événement repositionné dans le passé, il faut encore travailler sur les autres comportements dysfonctionnels, comme l’évitement ou la dépendance au réconfort.
Dans certains cas, le traumatisme est « pur » : une fois traité, tout rentre dans l’ordre. Mais souvent, il a ouvert la porte à d’autres troubles — phobies, addictions, troubles alimentaires, dépression. C’est alors un travail « poupées russes » dans lequel on retire une couche, puis une autre, jusqu’à ce que les problèmes soient entièrement résolus.
Traverser pour revoir le soleil
La force de cette approche réside dans sa clarté : il ne s’agit pas d’oublier ou de contourner le trauma, mais de le traverser volontairement pour en réduire le pouvoir destructeur.
Comme le rappelle Shakespeare, « Il n’y a pas de nuit si longue que le jour ne vienne. » Avec un accompagnement solide, la lumière revient, et le passé retrouve enfin sa place, et de pouvoir ainsi le ranger dans le tiroir des mauvais souvenirs.
Crédit Photo © Xavier Montoy
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Le protocole EMDR - PROPARA pour les primo-intervenants.
Journal of EMDR Practice and Research, 2013, Carolina Amaya
1. Pourquoi une telle étude ?
Les primo-intervenants (pompiers, policiers, secouristes, ambulanciers, opérateurs des numéros d’urgence, personnels hospitaliers d’urgences, équipes de sauvetage, etc…) sont en première ligne lors des catastrophes, accidents ou situations de crise.
Ils font face quotidiennement à des situations traumatisantes, qu’il s’agisse de violences, de décès, de catastrophes naturelles ou d’accidents graves. Cette exposition répétée peut avoir un impact lourd sur leur santé mentale, avec des risques accrus de :
* ESPT : État de stress post-traumatique, (appelé aussi SSPT Syndrome de Stress Post-Traumatique ou PTSD)
* Dépression
* Burn-out
* Troubles liés à l’alcool ou aux drogues
Ces troubles ne touchent pas seulement les personnes elles-mêmes : ils affectent aussi bien leurs familles, leurs collègues, la qualité de leur travail et, in fine, la sécurité et le bien-être des communautés qu’ils servent. Ce sont des dommages collatéraux que l’on ne peut plus ignorer de nos jours.
2. Comprendre le trauma aigu et ses formes.
L’étude entreprise va distinguer trois notions importantes :
1. État de stress aigu :
Survient dans les jours qui suivent un événement traumatisant, avec entre autre des symptômes comme de l’hypervigilance, de l’évitement, des reviviscences et/ou de la dissociation
Les symptômes vont persister au-delà de quelques jours
2. Événement récent :
Il s’agit d’un traumatisme vécu dans les 2 à 3 derniers mois
La personne va connaître une période de sécurité (très relative), après l’événement
3. Réseau de souvenirs d’exposition traumatique cumulative :
Enchaînement d’événements stressants sur une longue période (plus de 3 mois)
Pas de période de sécurité
Ceci est souvent observé chez les militaires ou primo-intervenants en service actif.
Les souvenirs traumatiques restent « ouverts » et réactivés à chaque nouvelle situation stressante, augmentant potentiellement le risque de troubles graves.
Cette dernière situation est particulièrement problématique : l’absence de « pause » empêche le cerveau de traiter, de digérer, d’intégrer correctement le souvenir. C’est un peu comme si une blessure restait sans pansement et continuait à être irritée chaque jour.
3. L’EMDR - PROPARA : qu’est-ce que c’est ?
L’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing, ou désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires) est une méthode développée initialement par Francine Shapiro.
Elle consiste comme nous le savons bien, à aider la personne à retraiter un souvenir traumatisant en l’évoquant, tout en effectuant des stimulations bilatérales alternées.
Le protocole EMDR-PROPARA est une adaptation pour une utilisation paraprofessionnelle, c’est-à-dire qu’il peut être appliqué dans des contextes où il n’y a pas forcément un psychothérapeute spécialisé sur place, mais avec un cadre précis et sécurisé.
Dans cette étude, il a été appliqué par des thérapeutes EMDR expérimentés.
4. Au sujet de l’étude :
- Participants : 39 premiers intervenants en service actif ayant subi des traumatismes
- Méthode : répartition aléatoire en deux groupes
- Groupe EMDR-PROPARA : séances de 90 minutes d’EMDR spécifique
- Groupe thérapie de soutien : séances de soutien psychologique classique
Durée : traitement + suivi à 3 mois
Mesure : questionnaire SPRINT (Short PTSD Rating Interview) pour évaluer la gravité des symptômes
5. Les résultats obtenus :
- Groupe EMDR-PROPARA :
Amélioration nette immédiatement après le traitement.
Poursuite de la baisse des symptômes au suivi de 3 mois.
- Groupe thérapie de soutien :
Amélioration faible et non significative après traitement.
Recrudescence des symptômes au suivi de 3 mois
Conclusion de cette étude: la différence entre les deux traitements est significative.
L’EMDR-PROPARA semble réduire efficacement les symptômes post-traumatiques et améliorer le bien-être global.
6. Pourquoi est-ce si important ?
Cette étude apporte un premier soutien scientifique à l’utilisation de l’EMDR-PROPARA pour :
- Intervenir rapidement après un trauma.
- Éviter l’installation de troubles chroniques.
- Offrir une aide plus efficace que le soutien classique.
Pour les premiers intervenants, cela pourrait signifier :
- Moins de souffrance psychologique
- Un retour plus rapide à un fonctionnement optimal
- Une meilleure résilience face aux crises futures
7. Limites et perspectives
Les auteurs soulignent tout de même que :
- L’échantillon était petit (39 personnes).
- L’étude doit être reproduite avec plus de participants et dans différents contextes.
- Il est nécessaire d’évaluer si des intervenants non psychothérapeutes mais formés spécifiquement peuvent obtenir les mêmes résultats. (à ce sujet, France EMDR IMO est en train de mener une étude spécifique en formant des non professionnels de santé à certains protocoles et d'évaluer l'efficacité d'un autre protocole).
8. En résumé
L’EMDR - PROPARA est un protocole court et ciblé qui pourrait devenir un outil précieux pour protéger la santé mentale des premiers intervenants.
En agissant rapidement après un événement traumatisant, il pourrait prévenir l’aggravation des symptômes et améliorer la qualité de vie, tant sur le plan personnel que professionnel.
Lire l'étude complète publiée par Academia.edu
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Ils font face quotidiennement à des situations traumatisantes, qu’il s’agisse de violences, de décès, de catastrophes naturelles ou d’accidents graves. Cette exposition répétée peut avoir un impact lourd sur leur santé mentale, avec des risques accrus de :
* ESPT : État de stress post-traumatique, (appelé aussi SSPT Syndrome de Stress Post-Traumatique ou PTSD)
* Dépression
* Burn-out
* Troubles liés à l’alcool ou aux drogues
Ces troubles ne touchent pas seulement les personnes elles-mêmes : ils affectent aussi bien leurs familles, leurs collègues, la qualité de leur travail et, in fine, la sécurité et le bien-être des communautés qu’ils servent. Ce sont des dommages collatéraux que l’on ne peut plus ignorer de nos jours.
2. Comprendre le trauma aigu et ses formes.
L’étude entreprise va distinguer trois notions importantes :
1. État de stress aigu :
Survient dans les jours qui suivent un événement traumatisant, avec entre autre des symptômes comme de l’hypervigilance, de l’évitement, des reviviscences et/ou de la dissociation
Les symptômes vont persister au-delà de quelques jours
2. Événement récent :
Il s’agit d’un traumatisme vécu dans les 2 à 3 derniers mois
La personne va connaître une période de sécurité (très relative), après l’événement
3. Réseau de souvenirs d’exposition traumatique cumulative :
Enchaînement d’événements stressants sur une longue période (plus de 3 mois)
Pas de période de sécurité
Ceci est souvent observé chez les militaires ou primo-intervenants en service actif.
Les souvenirs traumatiques restent « ouverts » et réactivés à chaque nouvelle situation stressante, augmentant potentiellement le risque de troubles graves.
Cette dernière situation est particulièrement problématique : l’absence de « pause » empêche le cerveau de traiter, de digérer, d’intégrer correctement le souvenir. C’est un peu comme si une blessure restait sans pansement et continuait à être irritée chaque jour.
3. L’EMDR - PROPARA : qu’est-ce que c’est ?
L’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing, ou désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires) est une méthode développée initialement par Francine Shapiro.
Elle consiste comme nous le savons bien, à aider la personne à retraiter un souvenir traumatisant en l’évoquant, tout en effectuant des stimulations bilatérales alternées.
Le protocole EMDR-PROPARA est une adaptation pour une utilisation paraprofessionnelle, c’est-à-dire qu’il peut être appliqué dans des contextes où il n’y a pas forcément un psychothérapeute spécialisé sur place, mais avec un cadre précis et sécurisé.
Dans cette étude, il a été appliqué par des thérapeutes EMDR expérimentés.
4. Au sujet de l’étude :
- Participants : 39 premiers intervenants en service actif ayant subi des traumatismes
- Méthode : répartition aléatoire en deux groupes
- Groupe EMDR-PROPARA : séances de 90 minutes d’EMDR spécifique
- Groupe thérapie de soutien : séances de soutien psychologique classique
Durée : traitement + suivi à 3 mois
Mesure : questionnaire SPRINT (Short PTSD Rating Interview) pour évaluer la gravité des symptômes
5. Les résultats obtenus :
- Groupe EMDR-PROPARA :
Amélioration nette immédiatement après le traitement.
Poursuite de la baisse des symptômes au suivi de 3 mois.
- Groupe thérapie de soutien :
Amélioration faible et non significative après traitement.
Recrudescence des symptômes au suivi de 3 mois
Conclusion de cette étude: la différence entre les deux traitements est significative.
L’EMDR-PROPARA semble réduire efficacement les symptômes post-traumatiques et améliorer le bien-être global.
6. Pourquoi est-ce si important ?
Cette étude apporte un premier soutien scientifique à l’utilisation de l’EMDR-PROPARA pour :
- Intervenir rapidement après un trauma.
- Éviter l’installation de troubles chroniques.
- Offrir une aide plus efficace que le soutien classique.
Pour les premiers intervenants, cela pourrait signifier :
- Moins de souffrance psychologique
- Un retour plus rapide à un fonctionnement optimal
- Une meilleure résilience face aux crises futures
7. Limites et perspectives
Les auteurs soulignent tout de même que :
- L’échantillon était petit (39 personnes).
- L’étude doit être reproduite avec plus de participants et dans différents contextes.
- Il est nécessaire d’évaluer si des intervenants non psychothérapeutes mais formés spécifiquement peuvent obtenir les mêmes résultats. (à ce sujet, France EMDR IMO est en train de mener une étude spécifique en formant des non professionnels de santé à certains protocoles et d'évaluer l'efficacité d'un autre protocole).
8. En résumé
L’EMDR - PROPARA est un protocole court et ciblé qui pourrait devenir un outil précieux pour protéger la santé mentale des premiers intervenants.
En agissant rapidement après un événement traumatisant, il pourrait prévenir l’aggravation des symptômes et améliorer la qualité de vie, tant sur le plan personnel que professionnel.
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La greffe mythique en psychotraumatologie.
Notes de lecture d'EMDR.FR pour les formations. Un article d'Hélène Dellucci, formatrice EMDR Europe, docteur en psychologie, psychothérapeute reconnue au niveau fédéral (Suisse) d’orientation systémique. Greffer des valeurs pour réparer les blessures invisibles : un voyage thérapeutique en huit étapes.
Et si l’on pouvait, même dans une famille marquée par le silence, la distance ou la douleur, retrouver un fil vivant de transmission ?
Et si des valeurs puissantes, issues de figures symboliques inspirantes, pouvaient circuler à nouveau dans les liens familiaux, comme une sève qui nourrit et répare ?
C’est le pari audacieux d’une méthode en huit étapes, née de la rencontre entre la psychotraumatologie classique et l’approche centrée compétences.
Cette démarche s’appuie sur le génogramme revisité de Marie-Christine Cabié, outil familial orienté solution, et sur une ressource étonnante : les figures symboliques.
Qu’elles soient personnages historiques, héros de fiction, animaux, ancêtres jamais rencontrés ou même arbres centenaires, elles deviennent des alliées précieuses pour restaurer la sécurité intérieure et retisser les liens d’appartenance.
L’idée est simple et puissante : quand les ressources familiales semblent absentes ou inaccessibles, on invite le patient à choisir une figure qui l’inspire profondément. On explore ensuite les qualités et valeurs qu’il lui attribue – courage, persévérance, douceur, liberté… – pour « greffer » ces valeurs sur son histoire familiale. Cette greffe se fait en douceur, par le biais d’images mentales, de dialogues imaginés, et d’un transfert symbolique vers un membre de la famille (réel ou décédé) qui aurait pu incarner cette valeur.
Les quatre premières étapes installent la figure symbolique :
1. Choisir la figure – humaine, animale, spirituelle ou végétale – capable de soutenir le patient.
2. Identifier les valeurs existentielles qu’elle incarne.
3. Dialoguer avec elle, recueillir ses paroles de soutien.
4. Demander conseil pour une situation précise.
Puis viennent les quatre étapes spécifiques à la « greffe mythique » :
5. Trouver un lien familial susceptible de porter cette valeur.
6. Transférer la valeur de la figure à ce membre.
7. La transmettre à des descendants ou à d’autres proches.
8. Reconnaître et remercier le patient pour ce geste envers son clan.
Le processus est profondément émotionnel : il ne s’agit pas seulement de réparer l’histoire personnelle, mais aussi de contribuer au patrimoine affectif de la famille. Cette installation de ressources collectives renforce ce que les auteurs appellent la « légitimité constructrice » : le sentiment d’avoir apporté quelque chose de juste et structurant à ses proches, présents, passés ou futurs.
L’histoire de Justine, 39 ans, en est un exemple frappant. Isolée de sa famille et marquée par des traumatismes complexes, elle choisit comme figure… Gengis Khan ! À travers le dialogue imaginaire avec ce guerrier, elle identifie deux valeurs essentielles : force et combativité. Guidée par la thérapeute, elle relie ces valeurs à son arrière-grand-père qu’elle n’a jamais connu, puis imagine leur transmission à travers sa lignée, jusqu’à ressentir une appartenance profonde : « Nous sommes des combattants, et je veux continuer cela de façon constructive ». Pour elle, ce fut un soulagement, une reconnexion inattendue et un apaisement des blessures liées au sentiment de vide familial.
En conclusion, cette approche offre un cadre sécurisant pour travailler sur les blessures relationnelles sans rompre la loyauté familiale. Elle permet d’installer, avant même d’aborder les souvenirs douloureux, des points d’ancrage émotionnels solides, ancrés dans des valeurs choisies et vécues. En cultivant ces ressources collectives, on donne au patient la force d’avancer, relié à quelque chose de plus vaste que lui : une filiation symbolique nourrissante, qui irrigue sa vie et celle de sa communauté.
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C’est le pari audacieux d’une méthode en huit étapes, née de la rencontre entre la psychotraumatologie classique et l’approche centrée compétences.
Cette démarche s’appuie sur le génogramme revisité de Marie-Christine Cabié, outil familial orienté solution, et sur une ressource étonnante : les figures symboliques.
Qu’elles soient personnages historiques, héros de fiction, animaux, ancêtres jamais rencontrés ou même arbres centenaires, elles deviennent des alliées précieuses pour restaurer la sécurité intérieure et retisser les liens d’appartenance.
L’idée est simple et puissante : quand les ressources familiales semblent absentes ou inaccessibles, on invite le patient à choisir une figure qui l’inspire profondément. On explore ensuite les qualités et valeurs qu’il lui attribue – courage, persévérance, douceur, liberté… – pour « greffer » ces valeurs sur son histoire familiale. Cette greffe se fait en douceur, par le biais d’images mentales, de dialogues imaginés, et d’un transfert symbolique vers un membre de la famille (réel ou décédé) qui aurait pu incarner cette valeur.
Les quatre premières étapes installent la figure symbolique :
1. Choisir la figure – humaine, animale, spirituelle ou végétale – capable de soutenir le patient.
2. Identifier les valeurs existentielles qu’elle incarne.
3. Dialoguer avec elle, recueillir ses paroles de soutien.
4. Demander conseil pour une situation précise.
Puis viennent les quatre étapes spécifiques à la « greffe mythique » :
5. Trouver un lien familial susceptible de porter cette valeur.
6. Transférer la valeur de la figure à ce membre.
7. La transmettre à des descendants ou à d’autres proches.
8. Reconnaître et remercier le patient pour ce geste envers son clan.
Le processus est profondément émotionnel : il ne s’agit pas seulement de réparer l’histoire personnelle, mais aussi de contribuer au patrimoine affectif de la famille. Cette installation de ressources collectives renforce ce que les auteurs appellent la « légitimité constructrice » : le sentiment d’avoir apporté quelque chose de juste et structurant à ses proches, présents, passés ou futurs.
L’histoire de Justine, 39 ans, en est un exemple frappant. Isolée de sa famille et marquée par des traumatismes complexes, elle choisit comme figure… Gengis Khan ! À travers le dialogue imaginaire avec ce guerrier, elle identifie deux valeurs essentielles : force et combativité. Guidée par la thérapeute, elle relie ces valeurs à son arrière-grand-père qu’elle n’a jamais connu, puis imagine leur transmission à travers sa lignée, jusqu’à ressentir une appartenance profonde : « Nous sommes des combattants, et je veux continuer cela de façon constructive ». Pour elle, ce fut un soulagement, une reconnexion inattendue et un apaisement des blessures liées au sentiment de vide familial.
En conclusion, cette approche offre un cadre sécurisant pour travailler sur les blessures relationnelles sans rompre la loyauté familiale. Elle permet d’installer, avant même d’aborder les souvenirs douloureux, des points d’ancrage émotionnels solides, ancrés dans des valeurs choisies et vécues. En cultivant ces ressources collectives, on donne au patient la force d’avancer, relié à quelque chose de plus vaste que lui : une filiation symbolique nourrissante, qui irrigue sa vie et celle de sa communauté.
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Trouble fonctionnel intestinal et syndrome anxiodépressif. Revue Hypnose & Thérapies Brèves HS19.
SIGNAUX IDÉOMOTEURS ET PSYCHOSOMATIQUES par Stéphane RADOYKOV pour la Revue Hypnose & Thérapies Brèves.
Présentation d’un patient souffrant de douleurs abdominales chroniques à qui sont proposées des séances d’hypnose avec utilisation des signaux idéomoteurs (SIM). Il s’agit d’explorer les conflits intérieurs qui le rongent... jusqu’à diminution des douleurs.
Un homme était adressé par son psychiatre pour de l’hypnothérapie. Le patient, 54 ans, avait reçu le diagnostic de trouble fonctionnel intestinal chronique associé à un trouble anxieux. Il avait développé plusieurs épisodes dépressifs et fait deux tentatives de suicide pour lesquelles il avait été hospitalisé en psychiatrie. Il prenait régulièrement des antalgiques opiacés et des anxiolytiques. La première séance a servi d’anamnèse et de réajustement des objectifs thérapeutiques attendus avec l’hypnose. La deuxième séance contenait l’exercice hypnotique des « mains de Rossi », centré sur l’ambivalence entre le changement et l’homéostasie. Au troisième rendez-vous, il rapportait être moins anxieux, prendre un peu moins d’anxiolytiques, mais aucun changement sur la douleur abdominale. En lui proposant de continuer à l’aide de l’hypnothérapie avec les signaux idéomoteurs (SIM), il disait « oui », mais sa tête montrait plutôt « non ». Cela a permis de continuer à explorer l’ambivalence au changement. Il utilisait la phrase « on peut essayer... », qui sous-entend déjà l’échec. Après le lui avoir fait remarquer, il se positionne pour continuer et nous mettons en place les quatre SIM dans les doigts d’une main en catalepsie. Pour rappel, ces signaux sont : OUI, NON, JSP (je ne sais pas) et JVPR (je ne veux pas répondre ou je ne suis pas prêt à répondre pour le moment).
- Thérapeute : « Sentez-vous que vos douleurs abdominales sont liées à un tiraillement dans plusieurs directions ?
- Patient : OUI.
- Th. : Serait-ce acceptable de rendre conscient ce conflit intérieur aujourd’hui ?
- P. : NON.
- Th. : Sentez-vous qu’il faudrait libérer une émotion avant de le rendre conscient ?
- P. : OUI.
- Th. : Sentez-vous qu’il serait acceptable de savoir quelle émotion doit être libérée ?
- P. : NON.
- Th. : Sentez-vous qu’il doit se passer quelque chose entre aujourd’hui et le prochain rendez-vous, pour qu’il soit possible de rendre cette émotion consciente ?
- P. : OUI.
- Th. : Allez-y, dites-moi ?
- P. : Il faudrait que je liste mes traumatismes.
- Th. : Entendu, faites cela, et on reprendra la prochaine fois. »
Lors de la quatrième consultation, il n’en avait pas dressé la liste, mais y avait « beaucoup pensé ».
Pour lire la suite...
Dr Stéphane Radoykov Médecin psychiatre, ancien chef de clinique assistant, praticien contractuel (Hôpital Cochin) et remplaçant libéral. Formateur. Directeur adjoint de l’Institut Emergences. Cofondateur du comité jeunesse de l’ISH.
Soigner les troubles psychosomatiques Sommaire du hors-série n°19
Merci à Eric Bardot et Stéphane Roy d’avoir co-dirigé ce « Hors-Série » de 196 pages sur les troubles psychosomatiques : chacun pourra y découvrir l’importance de la psychodynamique relationnelle et de l’imaginaire pour soutenir la démarche thérapeutique et permettre à chacun d’habiter son corps.
Les trois premiers articles s’ouvrent sur la clinique dermatologique... A travers l’histoire très émouvante de Lucas, 4 ans, souffrant d’eczéma, Virginie Bardot propose de mettre en forme le monde relationnel familial figé dans lequel les symptômes de l’enfant sont tout puissants. En réintroduisant le jeu, et en s’appuyant sur un scénario imaginaire co-construit avec l’enfant, les parents pourront se reconnecter à la souffrance de leur fils, retrouver leur capacité à prendre soin de lui de façon inconditionnelle et lui permettre de retrouver des relations sécures.
Stéphane Roy nous rappelle comment le déficit de l’imaginaire et des affects nécessite de travailler d’une manière relationnelle, émotionnelle et systémique. Il nous fait comprendre comment la TLMR (Thérapie du Lien et des Mondes Relationnels) est une technique de choix dans le traitement des troubles psychosomatiques. Avec Martine, atteinte de psoriasis à plaques géant, nous voyons comment la capacité de donner une existence symbolique au symptôme physique va lui permettre de se reconnecter à une histoire de vie porteuse de sens.
Véronique Bonnet nous fait partager son expérience relationnelle de dermatologue avec deux patientes : l’une souffrant de rougeurs chroniques du visage, et l’autre de douleurs à type de brûlures post-zona. Lisez ces beaux témoignages et vous découvrirez comment le « vertige de l’amour » d’Alain Bashung nous fait sentir le lien vivant entre la peau et le cœur.
Avec Eric Bardot, vous ferez la connaissance de Marie, 34 ans, qui rêve d’être une fille parfaite et une employée modèle. Malheureusement, elle s’enferme dans le silence et une boule dans la gorge ainsi que des maux de tête l’envahissent depuis de nombreux mois. L’auteur, concepteur de la TLMR, nous montre son savoir-faire et sa pédagogie pour créer un chemin qui donne le droit à Marie de respirer et d’exister.
Gérard Ostermann nous rappelle l’importance de dépasser la dichotomie corps-esprit pour s’engager dans une médecine plus holistique bio-psycho-sociale. Il nous ouvre à la compréhension de la psychosomatique intégrative développée par le professeur Jean Benjamin Stora. Vous lirez la présentation et l’interview de ce chercheur et clinicien, figure majeure dans le domaine de la psychosomatique.
Pour Gérald Brassine la psychosomatique rejoint la liste des phénomènes hypnotiques dotés d’une fonction protectrice puissante. A partir d’un cas de polyarthrite rhumatoïde, il met expérimentalement en évidence comment la douleur somatique protège de douleurs émotionnelles que le sujet ne parvient pas à assimiler. Le travail en PTR (Psychothérapie Trauma Réassociative) consiste à transformer le souvenir traumatique et les émotions afférentes pour sortir de la rigidité des défenses psychosomatiques.
Dans son article, Mady Faucoup aborde la question de la honte en psychosomatique, à propos de deux patientes de 50 ans à la recherche d’une plus grande liberté et qui souffrent de sensations de brûlures au cou. Nous saisissons l’importance d’externaliser le problème sur une scène métaphorique et d’utiliser des mouvements alternatifs pour permettre à ces femmes de retrouver une expérience d’unité corporelle.
Pierre Pétillot, ostéopathe et praticien en hypnose, insiste sur le lien entre les douleurs et les émotions. A travers deux situations cliniques (algodystrophie du genou et douleurs abdominales), nous découvrons une pratique où l’accordage, les temps de réflexion et de co-construction d’un espace commun permettent une prise en charge holistique du soin, le sujet devenant pleinement acteur de sa guérison.
Les kinésithérapeutes sont également confrontés à des patients souffrant de douleurs figées dans des constructions identitaires. Marie-Anne Jolly nous présente le cas d’un homme ayant des douleurs sur tout le côté gauche de son corps. Elle insiste sur l’authenticité des échanges afin que le patient perçoive le thérapeute comme un témoin de vie lui permettant de se relier à sa mobilité relationnelle.
L’article suivant concerne le diagnostic de trouble fonctionnel intestinal chronique associé à un syndrome anxiodépressif atteignant de nombreux patients. Dans ce cadre, Stéphane Radoykov nous présente l’utilisation des signaux idéomoteurs en hypnothérapie pour faire émerger un contexte où la prise de décision sera le premier pas vers un grand changement.
Pour terminer le voyage, Pierre Kivits nous emmène dans l’œuvre de Marcel Proust, un des plus grands auteurs du XXe siècle. Comme avec tous les grands écrivains, le lecteur rentre en transe et vit les expériences intérieures et sensorielles du héros engagé dans une quête de vérité. L’originalité de cet article est de nous faire découvrir le VAKOG de Proust, ou comment l’écrivain asthmatique a pu libérer sa créativité en se connectant à sa sensorialité.
Enfin, pour clore toutes ces riches réflexions, Eric Bardot, Julien Betbèze et Stéphane Roy nous proposent un échange à trois voix pour comprendre la transe comme un processus de protection et d’activation de l’autonomie relationnelle. Encore merci à tous les auteurs : leur expérience, leur créativité et leur complémentarité ont permis de construire un numéro passionnant.
Un homme était adressé par son psychiatre pour de l’hypnothérapie. Le patient, 54 ans, avait reçu le diagnostic de trouble fonctionnel intestinal chronique associé à un trouble anxieux. Il avait développé plusieurs épisodes dépressifs et fait deux tentatives de suicide pour lesquelles il avait été hospitalisé en psychiatrie. Il prenait régulièrement des antalgiques opiacés et des anxiolytiques. La première séance a servi d’anamnèse et de réajustement des objectifs thérapeutiques attendus avec l’hypnose. La deuxième séance contenait l’exercice hypnotique des « mains de Rossi », centré sur l’ambivalence entre le changement et l’homéostasie. Au troisième rendez-vous, il rapportait être moins anxieux, prendre un peu moins d’anxiolytiques, mais aucun changement sur la douleur abdominale. En lui proposant de continuer à l’aide de l’hypnothérapie avec les signaux idéomoteurs (SIM), il disait « oui », mais sa tête montrait plutôt « non ». Cela a permis de continuer à explorer l’ambivalence au changement. Il utilisait la phrase « on peut essayer... », qui sous-entend déjà l’échec. Après le lui avoir fait remarquer, il se positionne pour continuer et nous mettons en place les quatre SIM dans les doigts d’une main en catalepsie. Pour rappel, ces signaux sont : OUI, NON, JSP (je ne sais pas) et JVPR (je ne veux pas répondre ou je ne suis pas prêt à répondre pour le moment).
- Thérapeute : « Sentez-vous que vos douleurs abdominales sont liées à un tiraillement dans plusieurs directions ?
- Patient : OUI.
- Th. : Serait-ce acceptable de rendre conscient ce conflit intérieur aujourd’hui ?
- P. : NON.
- Th. : Sentez-vous qu’il faudrait libérer une émotion avant de le rendre conscient ?
- P. : OUI.
- Th. : Sentez-vous qu’il serait acceptable de savoir quelle émotion doit être libérée ?
- P. : NON.
- Th. : Sentez-vous qu’il doit se passer quelque chose entre aujourd’hui et le prochain rendez-vous, pour qu’il soit possible de rendre cette émotion consciente ?
- P. : OUI.
- Th. : Allez-y, dites-moi ?
- P. : Il faudrait que je liste mes traumatismes.
- Th. : Entendu, faites cela, et on reprendra la prochaine fois. »
Lors de la quatrième consultation, il n’en avait pas dressé la liste, mais y avait « beaucoup pensé ».
Pour lire la suite...
Dr Stéphane Radoykov Médecin psychiatre, ancien chef de clinique assistant, praticien contractuel (Hôpital Cochin) et remplaçant libéral. Formateur. Directeur adjoint de l’Institut Emergences. Cofondateur du comité jeunesse de l’ISH.
Soigner les troubles psychosomatiques Sommaire du hors-série n°19
Merci à Eric Bardot et Stéphane Roy d’avoir co-dirigé ce « Hors-Série » de 196 pages sur les troubles psychosomatiques : chacun pourra y découvrir l’importance de la psychodynamique relationnelle et de l’imaginaire pour soutenir la démarche thérapeutique et permettre à chacun d’habiter son corps.
Les trois premiers articles s’ouvrent sur la clinique dermatologique... A travers l’histoire très émouvante de Lucas, 4 ans, souffrant d’eczéma, Virginie Bardot propose de mettre en forme le monde relationnel familial figé dans lequel les symptômes de l’enfant sont tout puissants. En réintroduisant le jeu, et en s’appuyant sur un scénario imaginaire co-construit avec l’enfant, les parents pourront se reconnecter à la souffrance de leur fils, retrouver leur capacité à prendre soin de lui de façon inconditionnelle et lui permettre de retrouver des relations sécures.
Stéphane Roy nous rappelle comment le déficit de l’imaginaire et des affects nécessite de travailler d’une manière relationnelle, émotionnelle et systémique. Il nous fait comprendre comment la TLMR (Thérapie du Lien et des Mondes Relationnels) est une technique de choix dans le traitement des troubles psychosomatiques. Avec Martine, atteinte de psoriasis à plaques géant, nous voyons comment la capacité de donner une existence symbolique au symptôme physique va lui permettre de se reconnecter à une histoire de vie porteuse de sens.
Véronique Bonnet nous fait partager son expérience relationnelle de dermatologue avec deux patientes : l’une souffrant de rougeurs chroniques du visage, et l’autre de douleurs à type de brûlures post-zona. Lisez ces beaux témoignages et vous découvrirez comment le « vertige de l’amour » d’Alain Bashung nous fait sentir le lien vivant entre la peau et le cœur.
Avec Eric Bardot, vous ferez la connaissance de Marie, 34 ans, qui rêve d’être une fille parfaite et une employée modèle. Malheureusement, elle s’enferme dans le silence et une boule dans la gorge ainsi que des maux de tête l’envahissent depuis de nombreux mois. L’auteur, concepteur de la TLMR, nous montre son savoir-faire et sa pédagogie pour créer un chemin qui donne le droit à Marie de respirer et d’exister.
Gérard Ostermann nous rappelle l’importance de dépasser la dichotomie corps-esprit pour s’engager dans une médecine plus holistique bio-psycho-sociale. Il nous ouvre à la compréhension de la psychosomatique intégrative développée par le professeur Jean Benjamin Stora. Vous lirez la présentation et l’interview de ce chercheur et clinicien, figure majeure dans le domaine de la psychosomatique.
Pour Gérald Brassine la psychosomatique rejoint la liste des phénomènes hypnotiques dotés d’une fonction protectrice puissante. A partir d’un cas de polyarthrite rhumatoïde, il met expérimentalement en évidence comment la douleur somatique protège de douleurs émotionnelles que le sujet ne parvient pas à assimiler. Le travail en PTR (Psychothérapie Trauma Réassociative) consiste à transformer le souvenir traumatique et les émotions afférentes pour sortir de la rigidité des défenses psychosomatiques.
Dans son article, Mady Faucoup aborde la question de la honte en psychosomatique, à propos de deux patientes de 50 ans à la recherche d’une plus grande liberté et qui souffrent de sensations de brûlures au cou. Nous saisissons l’importance d’externaliser le problème sur une scène métaphorique et d’utiliser des mouvements alternatifs pour permettre à ces femmes de retrouver une expérience d’unité corporelle.
Pierre Pétillot, ostéopathe et praticien en hypnose, insiste sur le lien entre les douleurs et les émotions. A travers deux situations cliniques (algodystrophie du genou et douleurs abdominales), nous découvrons une pratique où l’accordage, les temps de réflexion et de co-construction d’un espace commun permettent une prise en charge holistique du soin, le sujet devenant pleinement acteur de sa guérison.
Les kinésithérapeutes sont également confrontés à des patients souffrant de douleurs figées dans des constructions identitaires. Marie-Anne Jolly nous présente le cas d’un homme ayant des douleurs sur tout le côté gauche de son corps. Elle insiste sur l’authenticité des échanges afin que le patient perçoive le thérapeute comme un témoin de vie lui permettant de se relier à sa mobilité relationnelle.
L’article suivant concerne le diagnostic de trouble fonctionnel intestinal chronique associé à un syndrome anxiodépressif atteignant de nombreux patients. Dans ce cadre, Stéphane Radoykov nous présente l’utilisation des signaux idéomoteurs en hypnothérapie pour faire émerger un contexte où la prise de décision sera le premier pas vers un grand changement.
Pour terminer le voyage, Pierre Kivits nous emmène dans l’œuvre de Marcel Proust, un des plus grands auteurs du XXe siècle. Comme avec tous les grands écrivains, le lecteur rentre en transe et vit les expériences intérieures et sensorielles du héros engagé dans une quête de vérité. L’originalité de cet article est de nous faire découvrir le VAKOG de Proust, ou comment l’écrivain asthmatique a pu libérer sa créativité en se connectant à sa sensorialité.
Enfin, pour clore toutes ces riches réflexions, Eric Bardot, Julien Betbèze et Stéphane Roy nous proposent un échange à trois voix pour comprendre la transe comme un processus de protection et d’activation de l’autonomie relationnelle. Encore merci à tous les auteurs : leur expérience, leur créativité et leur complémentarité ont permis de construire un numéro passionnant.
Asthme et créativité: les suggestions post-hypnotiques de Proust.
Grande œuvre de Marcel Proust, « A la recherche du temps perdu » est un roman dont le contenu fictionnel et les procédés stylistiques évoquent le cheminement thérapeutique de l’hypnose. Dans ce récit à la première personne, la plume virtuose de l’écrivain excelle à nous faire vivre les expériences intérieures et sensorielles du héros engagé dans une quête de vérité. Qui peut aussi devenir la nôtre...
Marcel Proust pratiquait-il une forme d’autohypnose ? Recelant une part de mystère, sa biographie nous autorise à imaginer une scène de sa vie quotidienne. Reclus dans sa chambre capitonnée de liège, accablé par les crises d’asthme et la crainte de leur survenue, et tandis que le monde réel se réduit aux dimensions de son appartement obscurci par les fumigations, le romancier laisse peut-être ses paupières se fermer afin de colliger ses souvenirs, guider le cours de son imagination et nourrir l’intrigue de son roman. Quels qu’en soient les étais et les échafaudages, l’œuvre en construction, qu’il compare lui-même à une cathédrale, déploie progressivement toute la richesse imaginaire de son monde intérieur. Comme dans ce jeu japonais où les petits morceaux de papiers « jusque-là indistincts », une fois plongés dans l’eau « s’étirent, se contournent, se colorent, se différencient, deviennent des fleurs, des maisons, des personnages... » (I, p. 91) (1).
Un intense travail de l’esprit mobilisant les ressources intérieures, pour faire émerger le sens et la saveur de la vie malgré l’âpreté et les déceptions de l’existence... n’est-ce pas une voie thérapeutique sur laquelle l’hypnothérapeute engage aussi son patient ? S’il est permis d’esquisser un rapprochement entre l’hypnose et l’œuvre de Proust, c’est toutefois dans les procédés stylistiques et l’histoire même du roman, dont on sait les emprunts inspirés de la vie de l’auteur, que nous trouverons les points d’affinité les plus surprenants.
La lecture, une expérience dissociante.
À la recherche du temps perdu est un récit à la première personne. Le lecteur s’identifie au héros, ce personnage de fiction qui se dédouble en « narrateur » pour nous conter rétrospectivement, sur un mode autobiographique, les expériences et les réflexions qui jalonnent son parcours dans le monde. Proust y déploie ses idées sur des thèmes éternels : l’amour, le désir, la jalousie, le deuil, l’art, la course inexorable du Temps qui marque son empreinte sur toute chose. Après avoir envisagé l’écriture d’un essai (dont il reste l’ébauche dans un livre posthume intitulé Contre Sainte-Beuve), il choisit le roman, c’est-à-dire un procédé métaphorique qui dévoile ces idées à travers l’histoire d’une vie, et permet ainsi au lecteur de s’approprier leur genèse existentielle. Au fil des pages, nous partageons le regard du narrateur, nous éprouvons son évolution, sa quête initiatique, nous devenons cette quête. Et tel un hypnothérapeute usant d’une technique d’induction, le romancier, dans une ouverture quasi dissociante, prépare notre esprit à entrer dans le récit. « Longtemps, je me suis couché de bonne heure. Parfois, à peine ma bougie éteinte, mes yeux se fermaient si vite que je n’avais pas le temps de me dire : je m’endors. Et, une demi-heure après, la pensée qu’il était temps de chercher le sommeil m’éveillait... » (I, p. 45).
Le célèbre incipit et les trente premières pages du roman mettent en scène un personnage insomniaque, qui se souvient du temps où il « se couchait de bonne heure » et se réveillait dans la pénombre d’une chambre qu’il mettait quelque temps à reconnaître. Aussitôt plongés dans le livre, nous voilà associés à l’être-au-monde de ce héros coupé de son présent, qui oscille entre le rêve et l’éveil, entre l’abstraction imaginaire et le ressenti corporel, entre l’ici et l’ailleurs, entre le temps de la narration et le passé relaté. Le caractère dissociant de la lecture est renforcé par la phrase proustienne, élégante, mais longue et sinueuse, émaillée d’incidentes et de parenthèses. Enchâssements d’images, de précisions, de distinguos... Toutes ces nuances créent une forme de confusion transitoire qui déconcerte autant qu’elle accentue l’attention du lecteur. Sollicitant l’imagination, les nombreuses métaphores – autre caractéristique de l’écriture proustienne –, donnent une forme transmissible à l’indicible d’une vérité subjective. Notre transe de lecteurs ne saurait cependant être complète sans une certaine distorsion temporelle...
Voyage temporel et kairos
« Car l’homme est cet être sans âge fixe, cet être qui a la faculté de redevenir en quelques secondes de beaucoup d’années plus jeune, et qui, entouré des parois du temps où il a vécu, y flotte, mais comme dans un bassin dont le niveau changerait constamment et le mettrait à portée tantôt d’une époque, tantôt d’une autre » (VI, p. 301). Le Temps est la grande affaire de Proust. Mais ne nous fions pas à l’apparente chronologie du roman. Si l’affaire Dreyfus et la Première Guerre mondiale situent l’histoire dans l’Histoire, en vain chercherions-nous des repères plus précis ou une quelconque date chiffrée. Car nous entrons dans une aventure singulière, où le temps est le temps vécu, subjectivé par la progression saltatoire, les juxtapositions, les allers-retours, les régressions... et les moments de grâce. Ces instants de kairos constituent le cœur de l’expérience proustienne. Ils sont toujours suscités par des perceptions sensorielles qui troublent le héros en le faisant brièvement accéder à un éprouvé extratemporel, comme s’il vivait « un peu d’éternité » au sein de l’éphémère. Les moments de grâce résident aussi dans le surgissement d’un souvenir involontaire, à la faveur d’une sensation actuelle. Cette collusion entre le moment présent et la reviviscence du passé éveille une joie inattendue, qui sort le narrateur de la routine des jours, de cette « habitude » qui l’avait rendu insensible à sa propre existence. « Qu’un bruit, qu’une odeur, déjà entendu et respirée jadis le soient de nouveau, à la fois dans le présent et dans le passé, réels sans être actuels, idéaux sans être abstraits, aussitôt l’essence permanente et habituellement cachée des choses se trouve libérée et notre vrai moi qui parfois depuis longtemps, semblait mort, mais ne l’était pas autrement, s’éveille, s’anime en recevant la céleste nourriture qui lui est apportée » (VII, p. 228). En provoquant une étrange félicité, ces rencontres furtives et fortuites avec un élément sensible de la vie excitent son imagination et deviennent autant de signes à déchiffrer. « ... De nouveau la vision éblouissante et indistincte me frôlait comme si elle m’avait dit : “Saisis-moi au passage si tu en as la force et tâche à résoudre l’énigme du bonheur que je te propose” » (VII, p. 222). La quête initiatique du narrateur est donc un chemin sensoriel et herméneutique, qui nous apprend que le dévoilement de notre moi véritable ne procède pas primordialement de l’intelligence mais de notre capacité à éprouver, à ressentir. « C’est pourquoi la meilleure part de notre mémoire est hors de nous, dans un souffle pluvieux, dans l’odeur de renfermé d’une chambre ou dans l’odeur d’une première flambée, partout où nous retrouvons de nous-même ce que notre intelligence, n’en ayant pas l’emploi, avait dédaigné... » (II, p.266).
Le VAKOG de Proust.
Voir, entendre, ressentir, sentir, goûter... C’est donc une clé sensorielle qui ouvre l’esprit du narrateur aux révélations intérieures. Illustration non exhaustive de ce VAKOG proustien.
- Voir... Lors d’un retour de promenade en voiture, la perception visuelle des clochers qui se déplacent à l’horizon et se superposent par instants, alors qu’ils sont géographiquement distants, trouble le narrateur et provoque en lui un « plaisir spécial ». Voici que le lointain coïncide avec le proche... Dans la perspective déformante du temps et de l’espace que joue la « danse des clochers », serait-il en train de saisir une sorte de réalité extratemporelle ? (I, 226).
- Entendre... C’est une autre forme de superposition qui affecte l’âme du héros, celle des phrases mélodiques qui s’entrecroisent dans la sonate de Vinteuil, du nom de son compositeur. Tout en avivant ses émotions, la mélodie en vient à lui procurer une « joie supra-terrestre » qui transcende l’éphémère moment de l’écoute. « Enfin le motif joyeux resta triomphant ; ce n’était plus un appel presque inquiet lancé derrière un ciel vide, c’était une joie ineffable qui semblait venir du Paradis (...). Je savais que cette nuance nouvelle de la joie, cet appel vers une joie supra-terrestre, je ne l’oublierais jamais. Mais serait-elle jamais réalisable pour moi ? » (V, 360).
- Ressentir... Tandis qu’il se rend à la prestigieuse matinée de la Princesse de Guermantes, le narrateur, distrait et perdu dans une triste pensée, trébuche sur les pavés mal équarris de la cour de l’hôtel particulier. Cette expérience « kinesthésique » suscite en lui une sensation étrange qui soudainement le réjouit et qu’il ne comprend pas d’emblée. Surgit alors le souvenir des dalles inégales du baptistère de Saint-Marc à Venise, ville qu’il a visitée quelques années auparavant. La superposition mnésique et sensorielle d’un moment présent et d’un moment passé lui procure à nouveau une joie intense. Le narrateur rapproche cet événement à d’autres expériences similaires, comme celle de la « petite madeleine ».
« Mais au moment où, me remettant d’aplomb, je posai mon pied sur un pavé qui était un peu moins élevé que le précédent, tout mon découragement s’évanouit devant la même félicité qu’à diverses époques de ma vie m’avaient donnée la vue d’arbres que j’avais cru reconnaître dans une promenade en voiture autour de Balbec, la vue des clochers de Martinville, la saveur d’une madeleine trempée dans une infusion, tant d’autres sensations dont j’ai parlé et que les dernières œuvres de Vinteuil m’avaient paru synthétiser » (VII, p. 221).
- Sentir et goûter... C’est un jour d’hiver, « accablé par la morne journée et la perspective d’un triste lendemain », que la saveur d’une petite madeleine trempée dans une tasse de thé lui rend présents des souvenirs qui lui semblent revêtir une intensité merveilleuse et régénératrice, alors qu’ils lui paraissaient indifférents tant qu’ils s’adressaient à sa seule intelligence. Magistralement décrit dans le premier tome du roman (I, pp. 88-91), cet épisode constitue une première expérience de souvenir involontaire. Ne serait-ce pas une forme de transe spontanée qui, provoquée par une sensation olfactive et gustative, transporte le héros dans le lieu sûr et enchanteur de son enfance ? Une partie de lui-même voyage en effet dans le temps et l’espace pour rejoindre le village de Combray, son église et ses bonnes gens, ses promenades et ses fleurs...
De la transe au temps retrouvé.
La profondeur et l’impact...
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Dr Pierre Kivits Psychiatre, chef de service de la filière de soins institutionnels et de réhabilitation du centre hospitalier Sainte-Marie à Rodez. Formé à hypnose ericksonienne institut émergences et à la thérapie systémique institut d'études de la famille à Toulouse.
Soigner les troubles psychosomatiques Merci à Eric Bardot et Stéphane Roy d’avoir co-dirigé ce « Hors-Série » de 196 pages sur les troubles psychosomatiques : chacun pourra y découvrir l’importance de la psychodynamique relationnelle et de l’imaginaire pour soutenir la démarche thérapeutique et permettre à chacun d’habiter son corps.
Les trois premiers articles s’ouvrent sur la clinique dermatologique... A travers l’histoire très émouvante de Lucas, 4 ans, souffrant d’eczéma, Virginie Bardot propose de mettre en forme le monde relationnel familial figé dans lequel les symptômes de l’enfant sont tout puissants. En réintroduisant le jeu, et en s’appuyant sur un scénario imaginaire co-construit avec l’enfant, les parents pourront se reconnecter à la souffrance de leur fils, retrouver leur capacité à prendre soin de lui de façon inconditionnelle et lui permettre de retrouver des relations sécures.
Stéphane Roy nous rappelle comment le déficit de l’imaginaire et des affects nécessite de travailler d’une manière relationnelle, émotionnelle et systémique. Il nous fait comprendre comment la TLMR (Thérapie du Lien et des Mondes Relationnels) est une technique de choix dans le traitement des troubles psychosomatiques. Avec Martine, atteinte de psoriasis à plaques géant, nous voyons comment la capacité de donner une existence symbolique au symptôme physique va lui permettre de se reconnecter à une histoire de vie porteuse de sens.
Véronique Bonnet nous fait partager son expérience relationnelle de dermatologue avec deux patientes : l’une souffrant de rougeurs chroniques du visage, et l’autre de douleurs à type de brûlures post-zona. Lisez ces beaux témoignages et vous découvrirez comment le « vertige de l’amour » d’Alain Bashung nous fait sentir le lien vivant entre la peau et le cœur.
Avec Eric Bardot, vous ferez la connaissance de Marie, 34 ans, qui rêve d’être une fille parfaite et une employée modèle. Malheureusement, elle s’enferme dans le silence et une boule dans la gorge ainsi que des maux de tête l’envahissent depuis de nombreux mois. L’auteur, concepteur de la TLMR, nous montre son savoir-faire et sa pédagogie pour créer un chemin qui donne le droit à Marie de respirer et d’exister.
Gérard Ostermann nous rappelle l’importance de dépasser la dichotomie corps-esprit pour s’engager dans une médecine plus holistique bio-psycho-sociale. Il nous ouvre à la compréhension de la psychosomatique intégrative développée par le professeur Jean Benjamin Stora. Vous lirez la présentation et l’interview de ce chercheur et clinicien, figure majeure dans le domaine de la psychosomatique.
Pour Gérald Brassine la psychosomatique rejoint la liste des phénomènes hypnotiques dotés d’une fonction protectrice puissante. A partir d’un cas de polyarthrite rhumatoïde, il met expérimentalement en évidence comment la douleur somatique protège de douleurs émotionnelles que le sujet ne parvient pas à assimiler. Le travail en PTR (Psychothérapie Trauma Réassociative) consiste à transformer le souvenir traumatique et les émotions afférentes pour sortir de la rigidité des défenses psychosomatiques.
Dans son article, Mady Faucoup aborde la question de la honte en psychosomatique, à propos de deux patientes de 50 ans à la recherche d’une plus grande liberté et qui souffrent de sensations de brûlures au cou. Nous saisissons l’importance d’externaliser le problème sur une scène métaphorique et d’utiliser des mouvements alternatifs pour permettre à ces femmes de retrouver une expérience d’unité corporelle.
Pierre Pétillot, ostéopathe et praticien en hypnose, insiste sur le lien entre les douleurs et les émotions. A travers deux situations cliniques (algodystrophie du genou et douleurs abdominales), nous découvrons une pratique où l’accordage, les temps de réflexion et de co-construction d’un espace commun permettent une prise en charge holistique du soin, le sujet devenant pleinement acteur de sa guérison.
Les kinésithérapeutes sont également confrontés à des patients souffrant de douleurs figées dans des constructions identitaires. Marie-Anne Jolly nous présente le cas d’un homme ayant des douleurs sur tout le côté gauche de son corps. Elle insiste sur l’authenticité des échanges afin que le patient perçoive le thérapeute comme un témoin de vie lui permettant de se relier à sa mobilité relationnelle.
L’article suivant concerne le diagnostic de trouble fonctionnel intestinal chronique associé à un syndrome anxiodépressif atteignant de nombreux patients. Dans ce cadre, Stéphane Radoykov nous présente l’utilisation des signaux idéomoteurs en hypnothérapie pour faire émerger un contexte où la prise de décision sera le premier pas vers un grand changement.
Pour terminer le voyage, Pierre Kivits nous emmène dans l’œuvre de Marcel Proust, un des plus grands auteurs du XXe siècle. Comme avec tous les grands écrivains, le lecteur rentre en transe et vit les expériences intérieures et sensorielles du héros engagé dans une quête de vérité. L’originalité de cet article est de nous faire découvrir le VAKOG de Proust, ou comment l’écrivain asthmatique a pu libérer sa créativité en se connectant à sa sensorialité.Enfin, pour clore toutes ces riches réflexions, Eric Bardot, Julien Betbèze et Stéphane Roy nous proposent un échange à trois voix pour comprendre la transe comme un processus de protection et d’activation de l’autonomie relationnelle. Encore merci à tous les auteurs : leur expérience, leur créativité et leur complémentarité ont permis de construire un numéro passionnant.
Livre en préparation: Il n'y a pas d'EMDR sans Proust ! Par jean MAINIL et Laurent GROSS
Marcel Proust pratiquait-il une forme d’autohypnose ? Recelant une part de mystère, sa biographie nous autorise à imaginer une scène de sa vie quotidienne. Reclus dans sa chambre capitonnée de liège, accablé par les crises d’asthme et la crainte de leur survenue, et tandis que le monde réel se réduit aux dimensions de son appartement obscurci par les fumigations, le romancier laisse peut-être ses paupières se fermer afin de colliger ses souvenirs, guider le cours de son imagination et nourrir l’intrigue de son roman. Quels qu’en soient les étais et les échafaudages, l’œuvre en construction, qu’il compare lui-même à une cathédrale, déploie progressivement toute la richesse imaginaire de son monde intérieur. Comme dans ce jeu japonais où les petits morceaux de papiers « jusque-là indistincts », une fois plongés dans l’eau « s’étirent, se contournent, se colorent, se différencient, deviennent des fleurs, des maisons, des personnages... » (I, p. 91) (1).
Un intense travail de l’esprit mobilisant les ressources intérieures, pour faire émerger le sens et la saveur de la vie malgré l’âpreté et les déceptions de l’existence... n’est-ce pas une voie thérapeutique sur laquelle l’hypnothérapeute engage aussi son patient ? S’il est permis d’esquisser un rapprochement entre l’hypnose et l’œuvre de Proust, c’est toutefois dans les procédés stylistiques et l’histoire même du roman, dont on sait les emprunts inspirés de la vie de l’auteur, que nous trouverons les points d’affinité les plus surprenants.
La lecture, une expérience dissociante.
À la recherche du temps perdu est un récit à la première personne. Le lecteur s’identifie au héros, ce personnage de fiction qui se dédouble en « narrateur » pour nous conter rétrospectivement, sur un mode autobiographique, les expériences et les réflexions qui jalonnent son parcours dans le monde. Proust y déploie ses idées sur des thèmes éternels : l’amour, le désir, la jalousie, le deuil, l’art, la course inexorable du Temps qui marque son empreinte sur toute chose. Après avoir envisagé l’écriture d’un essai (dont il reste l’ébauche dans un livre posthume intitulé Contre Sainte-Beuve), il choisit le roman, c’est-à-dire un procédé métaphorique qui dévoile ces idées à travers l’histoire d’une vie, et permet ainsi au lecteur de s’approprier leur genèse existentielle. Au fil des pages, nous partageons le regard du narrateur, nous éprouvons son évolution, sa quête initiatique, nous devenons cette quête. Et tel un hypnothérapeute usant d’une technique d’induction, le romancier, dans une ouverture quasi dissociante, prépare notre esprit à entrer dans le récit. « Longtemps, je me suis couché de bonne heure. Parfois, à peine ma bougie éteinte, mes yeux se fermaient si vite que je n’avais pas le temps de me dire : je m’endors. Et, une demi-heure après, la pensée qu’il était temps de chercher le sommeil m’éveillait... » (I, p. 45).
Le célèbre incipit et les trente premières pages du roman mettent en scène un personnage insomniaque, qui se souvient du temps où il « se couchait de bonne heure » et se réveillait dans la pénombre d’une chambre qu’il mettait quelque temps à reconnaître. Aussitôt plongés dans le livre, nous voilà associés à l’être-au-monde de ce héros coupé de son présent, qui oscille entre le rêve et l’éveil, entre l’abstraction imaginaire et le ressenti corporel, entre l’ici et l’ailleurs, entre le temps de la narration et le passé relaté. Le caractère dissociant de la lecture est renforcé par la phrase proustienne, élégante, mais longue et sinueuse, émaillée d’incidentes et de parenthèses. Enchâssements d’images, de précisions, de distinguos... Toutes ces nuances créent une forme de confusion transitoire qui déconcerte autant qu’elle accentue l’attention du lecteur. Sollicitant l’imagination, les nombreuses métaphores – autre caractéristique de l’écriture proustienne –, donnent une forme transmissible à l’indicible d’une vérité subjective. Notre transe de lecteurs ne saurait cependant être complète sans une certaine distorsion temporelle...
Voyage temporel et kairos
« Car l’homme est cet être sans âge fixe, cet être qui a la faculté de redevenir en quelques secondes de beaucoup d’années plus jeune, et qui, entouré des parois du temps où il a vécu, y flotte, mais comme dans un bassin dont le niveau changerait constamment et le mettrait à portée tantôt d’une époque, tantôt d’une autre » (VI, p. 301). Le Temps est la grande affaire de Proust. Mais ne nous fions pas à l’apparente chronologie du roman. Si l’affaire Dreyfus et la Première Guerre mondiale situent l’histoire dans l’Histoire, en vain chercherions-nous des repères plus précis ou une quelconque date chiffrée. Car nous entrons dans une aventure singulière, où le temps est le temps vécu, subjectivé par la progression saltatoire, les juxtapositions, les allers-retours, les régressions... et les moments de grâce. Ces instants de kairos constituent le cœur de l’expérience proustienne. Ils sont toujours suscités par des perceptions sensorielles qui troublent le héros en le faisant brièvement accéder à un éprouvé extratemporel, comme s’il vivait « un peu d’éternité » au sein de l’éphémère. Les moments de grâce résident aussi dans le surgissement d’un souvenir involontaire, à la faveur d’une sensation actuelle. Cette collusion entre le moment présent et la reviviscence du passé éveille une joie inattendue, qui sort le narrateur de la routine des jours, de cette « habitude » qui l’avait rendu insensible à sa propre existence. « Qu’un bruit, qu’une odeur, déjà entendu et respirée jadis le soient de nouveau, à la fois dans le présent et dans le passé, réels sans être actuels, idéaux sans être abstraits, aussitôt l’essence permanente et habituellement cachée des choses se trouve libérée et notre vrai moi qui parfois depuis longtemps, semblait mort, mais ne l’était pas autrement, s’éveille, s’anime en recevant la céleste nourriture qui lui est apportée » (VII, p. 228). En provoquant une étrange félicité, ces rencontres furtives et fortuites avec un élément sensible de la vie excitent son imagination et deviennent autant de signes à déchiffrer. « ... De nouveau la vision éblouissante et indistincte me frôlait comme si elle m’avait dit : “Saisis-moi au passage si tu en as la force et tâche à résoudre l’énigme du bonheur que je te propose” » (VII, p. 222). La quête initiatique du narrateur est donc un chemin sensoriel et herméneutique, qui nous apprend que le dévoilement de notre moi véritable ne procède pas primordialement de l’intelligence mais de notre capacité à éprouver, à ressentir. « C’est pourquoi la meilleure part de notre mémoire est hors de nous, dans un souffle pluvieux, dans l’odeur de renfermé d’une chambre ou dans l’odeur d’une première flambée, partout où nous retrouvons de nous-même ce que notre intelligence, n’en ayant pas l’emploi, avait dédaigné... » (II, p.266).
Le VAKOG de Proust.
Voir, entendre, ressentir, sentir, goûter... C’est donc une clé sensorielle qui ouvre l’esprit du narrateur aux révélations intérieures. Illustration non exhaustive de ce VAKOG proustien.
- Voir... Lors d’un retour de promenade en voiture, la perception visuelle des clochers qui se déplacent à l’horizon et se superposent par instants, alors qu’ils sont géographiquement distants, trouble le narrateur et provoque en lui un « plaisir spécial ». Voici que le lointain coïncide avec le proche... Dans la perspective déformante du temps et de l’espace que joue la « danse des clochers », serait-il en train de saisir une sorte de réalité extratemporelle ? (I, 226).
- Entendre... C’est une autre forme de superposition qui affecte l’âme du héros, celle des phrases mélodiques qui s’entrecroisent dans la sonate de Vinteuil, du nom de son compositeur. Tout en avivant ses émotions, la mélodie en vient à lui procurer une « joie supra-terrestre » qui transcende l’éphémère moment de l’écoute. « Enfin le motif joyeux resta triomphant ; ce n’était plus un appel presque inquiet lancé derrière un ciel vide, c’était une joie ineffable qui semblait venir du Paradis (...). Je savais que cette nuance nouvelle de la joie, cet appel vers une joie supra-terrestre, je ne l’oublierais jamais. Mais serait-elle jamais réalisable pour moi ? » (V, 360).
- Ressentir... Tandis qu’il se rend à la prestigieuse matinée de la Princesse de Guermantes, le narrateur, distrait et perdu dans une triste pensée, trébuche sur les pavés mal équarris de la cour de l’hôtel particulier. Cette expérience « kinesthésique » suscite en lui une sensation étrange qui soudainement le réjouit et qu’il ne comprend pas d’emblée. Surgit alors le souvenir des dalles inégales du baptistère de Saint-Marc à Venise, ville qu’il a visitée quelques années auparavant. La superposition mnésique et sensorielle d’un moment présent et d’un moment passé lui procure à nouveau une joie intense. Le narrateur rapproche cet événement à d’autres expériences similaires, comme celle de la « petite madeleine ».
« Mais au moment où, me remettant d’aplomb, je posai mon pied sur un pavé qui était un peu moins élevé que le précédent, tout mon découragement s’évanouit devant la même félicité qu’à diverses époques de ma vie m’avaient donnée la vue d’arbres que j’avais cru reconnaître dans une promenade en voiture autour de Balbec, la vue des clochers de Martinville, la saveur d’une madeleine trempée dans une infusion, tant d’autres sensations dont j’ai parlé et que les dernières œuvres de Vinteuil m’avaient paru synthétiser » (VII, p. 221).
- Sentir et goûter... C’est un jour d’hiver, « accablé par la morne journée et la perspective d’un triste lendemain », que la saveur d’une petite madeleine trempée dans une tasse de thé lui rend présents des souvenirs qui lui semblent revêtir une intensité merveilleuse et régénératrice, alors qu’ils lui paraissaient indifférents tant qu’ils s’adressaient à sa seule intelligence. Magistralement décrit dans le premier tome du roman (I, pp. 88-91), cet épisode constitue une première expérience de souvenir involontaire. Ne serait-ce pas une forme de transe spontanée qui, provoquée par une sensation olfactive et gustative, transporte le héros dans le lieu sûr et enchanteur de son enfance ? Une partie de lui-même voyage en effet dans le temps et l’espace pour rejoindre le village de Combray, son église et ses bonnes gens, ses promenades et ses fleurs...
De la transe au temps retrouvé.
La profondeur et l’impact...
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Dr Pierre Kivits Psychiatre, chef de service de la filière de soins institutionnels et de réhabilitation du centre hospitalier Sainte-Marie à Rodez. Formé à hypnose ericksonienne institut émergences et à la thérapie systémique institut d'études de la famille à Toulouse.
Soigner les troubles psychosomatiques Merci à Eric Bardot et Stéphane Roy d’avoir co-dirigé ce « Hors-Série » de 196 pages sur les troubles psychosomatiques : chacun pourra y découvrir l’importance de la psychodynamique relationnelle et de l’imaginaire pour soutenir la démarche thérapeutique et permettre à chacun d’habiter son corps.
Les trois premiers articles s’ouvrent sur la clinique dermatologique... A travers l’histoire très émouvante de Lucas, 4 ans, souffrant d’eczéma, Virginie Bardot propose de mettre en forme le monde relationnel familial figé dans lequel les symptômes de l’enfant sont tout puissants. En réintroduisant le jeu, et en s’appuyant sur un scénario imaginaire co-construit avec l’enfant, les parents pourront se reconnecter à la souffrance de leur fils, retrouver leur capacité à prendre soin de lui de façon inconditionnelle et lui permettre de retrouver des relations sécures.
Stéphane Roy nous rappelle comment le déficit de l’imaginaire et des affects nécessite de travailler d’une manière relationnelle, émotionnelle et systémique. Il nous fait comprendre comment la TLMR (Thérapie du Lien et des Mondes Relationnels) est une technique de choix dans le traitement des troubles psychosomatiques. Avec Martine, atteinte de psoriasis à plaques géant, nous voyons comment la capacité de donner une existence symbolique au symptôme physique va lui permettre de se reconnecter à une histoire de vie porteuse de sens.
Véronique Bonnet nous fait partager son expérience relationnelle de dermatologue avec deux patientes : l’une souffrant de rougeurs chroniques du visage, et l’autre de douleurs à type de brûlures post-zona. Lisez ces beaux témoignages et vous découvrirez comment le « vertige de l’amour » d’Alain Bashung nous fait sentir le lien vivant entre la peau et le cœur.
Avec Eric Bardot, vous ferez la connaissance de Marie, 34 ans, qui rêve d’être une fille parfaite et une employée modèle. Malheureusement, elle s’enferme dans le silence et une boule dans la gorge ainsi que des maux de tête l’envahissent depuis de nombreux mois. L’auteur, concepteur de la TLMR, nous montre son savoir-faire et sa pédagogie pour créer un chemin qui donne le droit à Marie de respirer et d’exister.
Gérard Ostermann nous rappelle l’importance de dépasser la dichotomie corps-esprit pour s’engager dans une médecine plus holistique bio-psycho-sociale. Il nous ouvre à la compréhension de la psychosomatique intégrative développée par le professeur Jean Benjamin Stora. Vous lirez la présentation et l’interview de ce chercheur et clinicien, figure majeure dans le domaine de la psychosomatique.
Pour Gérald Brassine la psychosomatique rejoint la liste des phénomènes hypnotiques dotés d’une fonction protectrice puissante. A partir d’un cas de polyarthrite rhumatoïde, il met expérimentalement en évidence comment la douleur somatique protège de douleurs émotionnelles que le sujet ne parvient pas à assimiler. Le travail en PTR (Psychothérapie Trauma Réassociative) consiste à transformer le souvenir traumatique et les émotions afférentes pour sortir de la rigidité des défenses psychosomatiques.
Dans son article, Mady Faucoup aborde la question de la honte en psychosomatique, à propos de deux patientes de 50 ans à la recherche d’une plus grande liberté et qui souffrent de sensations de brûlures au cou. Nous saisissons l’importance d’externaliser le problème sur une scène métaphorique et d’utiliser des mouvements alternatifs pour permettre à ces femmes de retrouver une expérience d’unité corporelle.
Pierre Pétillot, ostéopathe et praticien en hypnose, insiste sur le lien entre les douleurs et les émotions. A travers deux situations cliniques (algodystrophie du genou et douleurs abdominales), nous découvrons une pratique où l’accordage, les temps de réflexion et de co-construction d’un espace commun permettent une prise en charge holistique du soin, le sujet devenant pleinement acteur de sa guérison.
Les kinésithérapeutes sont également confrontés à des patients souffrant de douleurs figées dans des constructions identitaires. Marie-Anne Jolly nous présente le cas d’un homme ayant des douleurs sur tout le côté gauche de son corps. Elle insiste sur l’authenticité des échanges afin que le patient perçoive le thérapeute comme un témoin de vie lui permettant de se relier à sa mobilité relationnelle.
L’article suivant concerne le diagnostic de trouble fonctionnel intestinal chronique associé à un syndrome anxiodépressif atteignant de nombreux patients. Dans ce cadre, Stéphane Radoykov nous présente l’utilisation des signaux idéomoteurs en hypnothérapie pour faire émerger un contexte où la prise de décision sera le premier pas vers un grand changement.
Pour terminer le voyage, Pierre Kivits nous emmène dans l’œuvre de Marcel Proust, un des plus grands auteurs du XXe siècle. Comme avec tous les grands écrivains, le lecteur rentre en transe et vit les expériences intérieures et sensorielles du héros engagé dans une quête de vérité. L’originalité de cet article est de nous faire découvrir le VAKOG de Proust, ou comment l’écrivain asthmatique a pu libérer sa créativité en se connectant à sa sensorialité.Enfin, pour clore toutes ces riches réflexions, Eric Bardot, Julien Betbèze et Stéphane Roy nous proposent un échange à trois voix pour comprendre la transe comme un processus de protection et d’activation de l’autonomie relationnelle. Encore merci à tous les auteurs : leur expérience, leur créativité et leur complémentarité ont permis de construire un numéro passionnant.
Livre en préparation: Il n'y a pas d'EMDR sans Proust ! Par jean MAINIL et Laurent GROSS
Catégories: Hypnose Paris,EMDR,Thérapie Brève Paris
Dans les sanctuaires du SHINTŌ. Revue Hypnose et Thérapies Brèves 77.
L’ÉNERGIE DES FORCES VITALES BRUNO BRÉCHEMIER
Pour découvrir le Japon, la meilleure approche est de lâcher le mental et s’ouvrir aux sensations, comme en hypnose. Il suffit de se poser, en silence, et se laisser imprégner par l’atmosphère des lieux, en particulier ceux qui semblent les plus mystérieux. Parmi eux, les sanctuaires shintō, appelés jinja en japonais. Le shintō (voie des dieux), religion autochtone propre à l’archipel, incarne l’âme la plus ancienne et profonde du Japon. Véritable socle culturel millénaire, il tisse un lien vivant entre le présent et les origines du pays. A la fois communion avec la nature, célébration de la vie et espace de régénération, le shintō entre en résonance avec les aspects les plus fondamentaux de l’hypnose.
A l’entrée du sanctuaire se dresse un grand portique, souvent rouge vermillon, l’une des images emblématiques du Japon. Il marque symboliquement la transition entre le monde extérieur et l’espace sacré. « Chaque visite d’un jinja est une expérience unique et inoubliable.
Comme en hypnose, où chaque séance, chaque transe, a ses propres caractéristiques, sa propre atmosphère, ses propres connexions multiples. En se promenant dans ces lieux à l’énergie profonde, où des cèdres souvent centenaires nous invitent dans leurs ombres mystérieuses, on entre dans une autre dimension, dans une transe (autohypnose) souvent surprenante. On ne peut alors que s’imprégner de la beauté des lieux, de leur silence si particulier » (1).
Cela fait écho à la construction du lieu ressource en hypnose, où l’on guide la personne vers la création d’un espace mental sécurisant, un sanctuaire intérieur. De la même manière, les sanctuaires naturels du shintō – forêts sacrées, sources limpides, cascades – rappellent certaines métaphores thérapeutiques couramment utilisées en hypnose : marcher dans une forêt intérieure, écouter le murmure d’une rivière imaginaire, ou se laisser envelopper par une cascade bienfaisante.
Dans le shintō, la connexion à la nature est essentielle pour préserver l’équilibre physique et mental. Se recueillir devant un arbre vénéré, se rendre dans un sanctuaire niché au cœur d’une forêt sacrée ou encore pratiquer le shinrin yoku (bain de forêt) sont autant de pratiques reconnues pour leurs bienfaits sur la santé. La vision japonaise du monde naturel ne repose pas sur un dualisme entre l’homme et son environnement, mais sur une relation intime, où humains et nature coexistent comme les membres d’une même grande famille. En hypnose, on observe combien la nature imprègne les perceptions des patients et joue un véritable rôle thérapeutique.
Les rituels de purification occupent une place importante dans le shintō. Ils visent à éliminer les impuretés (kegare) affectant l’équilibre physique, mental et spirituel. Dès l’entrée du sanctuaire, un bassin d’ablutions invite à un rituel codifié. Cette démarche trouve un parallèle en hypnothérapie lorsqu’au début de la séance on guide la personne à travers les couches du mental analytique, souvent agité, pour atteindre un état plus fluide, intuitif et profond. La purification par l’eau rappelle les inductions hypnotiques fondées sur des métaphores aquatiques, tandis que l’usage du sel ou du feu évoque certaines suggestions de purification par la lumière ou les flammes.
De nombreux sanctuaires shintō sont consacrés aux pratiques de guérison. Citons le Goō jinja (Kyōto), particulièrement fréquenté pour les prières liées à la guérison des blessures, et le Sai jinja (Nara) qui possède un puits contenant une eau médicinale utilisée dans certains traitements traditionnels. Lors de certaines
fêtes rituelles (matsuri), les prêtres récitent des prières adressées aux divinités pour éloigner la maladie et restaurer la vitalité. Ces cérémonies, rythmées par les tambours (taiko), la musique et la danse, représentent une forme de transe collective. Le Nagoshi no harae, en juin, est un rituel de purification où les participants traversent un grand cercle de paille pour se libérer des impuretés accumulées et renforcer leur énergie vitale.
Dans les sanctuaires, les fidèles accrochent des ema, petites plaques votives en bois, sur lesquelles ils inscrivent leurs prières et dessinent parfois la partie du corps à soigner pour guider l’aide des dieux. Ces plaques sont ensuite brûlées lors du dondoyaki, un festival du feu célébré mi-janvier dans tout le Japon, où l’on consume également les décorations du Nouvel An afin de symboliser un renouveau spirituel et de prier pour la prospérité de l’année à venir.
A travers ces rituels, le shintō illustre une approche holistique du soin, où le sacré et la guérison s’entrelacent dans une relation vivante entre l’homme et les forces spirituelles, les kami...
Pour lire la suite...
Dr Bruno Bréchemier Médecin, hypnothérapeute, à Paris. Formé à l’AFEHM, sa pratique clinique s’inscrit dans la lignée de François Roustang. Son intérêt pour
le Japon l’a amené à publier Hypnose-Japon. Rencontre en résonance (Satas, 2024) où l’hypnose thérapeutique rencontre la culture japonaise. Formateur en hypnose et en santé intégrative.
N°77 : Mai / Juin / Juillet 2025
Julien Betbèze, rédacteur en chef, nous présente ce numéro :
Editorial : « L’empathie et la compassion comme fil d’or du soin » Julien Betbèze
8 / En couverture : Anne Dayot De sable et d’algues Sophie Cohen
10 / Désamorcer les traumas et se replacer dans l’existence par la Psychothérapie du Trauma Réassociative (PTR) Marine Manouvrier et Gérald Brassine
20 / Chemsex, trauma et EMDR-IMO . L’échelle de mesure « croire en moi » Sophie Tournouër
28 / Cothérapie avec Romain Faire émerger les relations sécures Jérémie Roos
36 / La voie métaphorique en « super-inter-vision ». Comment développer la créativité. des soignants Claire Conte-Rossin et Catherine Martin
ESPACE DOULEUR DOUCEUR
46 / Introduction Gérard Ostermann
50 / Empathie et compassion Deux forces pour soigner autrement Olivier de Palézieux
61 / INTERVIEW Mylène Blasco Propos recueillis par Gérard Ostermann
68 / DOSSIER TOC
70 / La société contemporaine : Perfection et fabrique des TOC Grégoire Vitry et Emmanuelle Gallin
82 / La pensée magique dans les TOC Typologie des rituels magiques Claude Michel
QUIPROQUO
98 / Les obsessions S. Colombo, Muhuc
BONJOUR ET APRÈS...
102 / André et son ventre Pour une séance plus qu’émouvante Sophie Cohen
LES CHAMPS DU POSSIBLE
106 / Se cogner au réel Adrian Chaboche
CULTURE MONDE
114 / Dans les sanctuaires du shintō Bruno Bréchemier
LIVRES EN BOUCHE
120 / J. Betbèze et S. Cohen
125 ESPACE FORMATIONS
Illustrations: Anne DAYOT
A l’entrée du sanctuaire se dresse un grand portique, souvent rouge vermillon, l’une des images emblématiques du Japon. Il marque symboliquement la transition entre le monde extérieur et l’espace sacré. « Chaque visite d’un jinja est une expérience unique et inoubliable.
Comme en hypnose, où chaque séance, chaque transe, a ses propres caractéristiques, sa propre atmosphère, ses propres connexions multiples. En se promenant dans ces lieux à l’énergie profonde, où des cèdres souvent centenaires nous invitent dans leurs ombres mystérieuses, on entre dans une autre dimension, dans une transe (autohypnose) souvent surprenante. On ne peut alors que s’imprégner de la beauté des lieux, de leur silence si particulier » (1).
Cela fait écho à la construction du lieu ressource en hypnose, où l’on guide la personne vers la création d’un espace mental sécurisant, un sanctuaire intérieur. De la même manière, les sanctuaires naturels du shintō – forêts sacrées, sources limpides, cascades – rappellent certaines métaphores thérapeutiques couramment utilisées en hypnose : marcher dans une forêt intérieure, écouter le murmure d’une rivière imaginaire, ou se laisser envelopper par une cascade bienfaisante.
Dans le shintō, la connexion à la nature est essentielle pour préserver l’équilibre physique et mental. Se recueillir devant un arbre vénéré, se rendre dans un sanctuaire niché au cœur d’une forêt sacrée ou encore pratiquer le shinrin yoku (bain de forêt) sont autant de pratiques reconnues pour leurs bienfaits sur la santé. La vision japonaise du monde naturel ne repose pas sur un dualisme entre l’homme et son environnement, mais sur une relation intime, où humains et nature coexistent comme les membres d’une même grande famille. En hypnose, on observe combien la nature imprègne les perceptions des patients et joue un véritable rôle thérapeutique.
Les rituels de purification occupent une place importante dans le shintō. Ils visent à éliminer les impuretés (kegare) affectant l’équilibre physique, mental et spirituel. Dès l’entrée du sanctuaire, un bassin d’ablutions invite à un rituel codifié. Cette démarche trouve un parallèle en hypnothérapie lorsqu’au début de la séance on guide la personne à travers les couches du mental analytique, souvent agité, pour atteindre un état plus fluide, intuitif et profond. La purification par l’eau rappelle les inductions hypnotiques fondées sur des métaphores aquatiques, tandis que l’usage du sel ou du feu évoque certaines suggestions de purification par la lumière ou les flammes.
De nombreux sanctuaires shintō sont consacrés aux pratiques de guérison. Citons le Goō jinja (Kyōto), particulièrement fréquenté pour les prières liées à la guérison des blessures, et le Sai jinja (Nara) qui possède un puits contenant une eau médicinale utilisée dans certains traitements traditionnels. Lors de certaines
fêtes rituelles (matsuri), les prêtres récitent des prières adressées aux divinités pour éloigner la maladie et restaurer la vitalité. Ces cérémonies, rythmées par les tambours (taiko), la musique et la danse, représentent une forme de transe collective. Le Nagoshi no harae, en juin, est un rituel de purification où les participants traversent un grand cercle de paille pour se libérer des impuretés accumulées et renforcer leur énergie vitale.
Dans les sanctuaires, les fidèles accrochent des ema, petites plaques votives en bois, sur lesquelles ils inscrivent leurs prières et dessinent parfois la partie du corps à soigner pour guider l’aide des dieux. Ces plaques sont ensuite brûlées lors du dondoyaki, un festival du feu célébré mi-janvier dans tout le Japon, où l’on consume également les décorations du Nouvel An afin de symboliser un renouveau spirituel et de prier pour la prospérité de l’année à venir.
A travers ces rituels, le shintō illustre une approche holistique du soin, où le sacré et la guérison s’entrelacent dans une relation vivante entre l’homme et les forces spirituelles, les kami...
Pour lire la suite...
Dr Bruno Bréchemier Médecin, hypnothérapeute, à Paris. Formé à l’AFEHM, sa pratique clinique s’inscrit dans la lignée de François Roustang. Son intérêt pour
le Japon l’a amené à publier Hypnose-Japon. Rencontre en résonance (Satas, 2024) où l’hypnose thérapeutique rencontre la culture japonaise. Formateur en hypnose et en santé intégrative.
N°77 : Mai / Juin / Juillet 2025
Julien Betbèze, rédacteur en chef, nous présente ce numéro :
Editorial : « L’empathie et la compassion comme fil d’or du soin » Julien Betbèze
8 / En couverture : Anne Dayot De sable et d’algues Sophie Cohen
10 / Désamorcer les traumas et se replacer dans l’existence par la Psychothérapie du Trauma Réassociative (PTR) Marine Manouvrier et Gérald Brassine
20 / Chemsex, trauma et EMDR-IMO . L’échelle de mesure « croire en moi » Sophie Tournouër
28 / Cothérapie avec Romain Faire émerger les relations sécures Jérémie Roos
36 / La voie métaphorique en « super-inter-vision ». Comment développer la créativité. des soignants Claire Conte-Rossin et Catherine Martin
ESPACE DOULEUR DOUCEUR
46 / Introduction Gérard Ostermann
50 / Empathie et compassion Deux forces pour soigner autrement Olivier de Palézieux
61 / INTERVIEW Mylène Blasco Propos recueillis par Gérard Ostermann
68 / DOSSIER TOC
70 / La société contemporaine : Perfection et fabrique des TOC Grégoire Vitry et Emmanuelle Gallin
82 / La pensée magique dans les TOC Typologie des rituels magiques Claude Michel
QUIPROQUO
98 / Les obsessions S. Colombo, Muhuc
BONJOUR ET APRÈS...
102 / André et son ventre Pour une séance plus qu’émouvante Sophie Cohen
LES CHAMPS DU POSSIBLE
106 / Se cogner au réel Adrian Chaboche
CULTURE MONDE
114 / Dans les sanctuaires du shintō Bruno Bréchemier
LIVRES EN BOUCHE
120 / J. Betbèze et S. Cohen
125 ESPACE FORMATIONS
Illustrations: Anne DAYOT
La société contemporaine: perfection et fabrique des TOC
GRÉGOIRE VITRY ET EMMANUELLE GALLIN pour la Revue Hypnose et Thérapies Brèves 77.
Sophie, Laura, Alexandre et Marie. Quatre patients et autant de cas d’étude qui nous plongent dans le monde complexe et chaotique des TOC. Parmi les facteurs favorisant ces troubles : pressions sociales, quête de la perfection, exigences envers les proches, peur de l’échec... avec pour effet le déclenchement de toutes sortes de rituels compulsifs.
Les troubles obsessionnels compulsifs (TOC) constituent une pathologie mentale complexe qui touche une proportion significative de la population mondiale. La prévalence de ces troubles semble en hausse, particulièrement dans les sociétés modernes où les pressions sociales et culturelles peuvent exacerber leur développement. Comme le montre le cas de Sophie exposé ci-dessous, des facteurs sociaux contribuent à la recrudescence des TOC dans une société prônant la perfection des corps et la réussite. On remarque ainsi que les personnes atteintes de TOC ont souvent du mal à accepter l’imperfection, tant dans leur propre vie que dans celle des autres. Cette intolérance à l’imperfection peut alimenter des obsessions et des rituels compulsifs. Des études indiquent que les patients souffrant de TOC présentent souvent des biais métacognitifs, comme la fusion pensée-action morale (Frontiers, 2024). Regardons de plus près pour comprendre les mécanismes psychologiques sous-jacents.
ÉTUDE DE CAS : SOPHIE,UNE JEUNE PROFESSIONNELLE DANS UNE GRANDE VILLE
Sophie a 28 ans. Elle vient consulter à la clinique des TOC (1). Depuis un an, elle travaille comme analyste financière dans une grande ville. Elle a toujours été une élève brillante et a réussi avec succès ses études universitaires dans une école de commerce prestigieuse. Mais depuis qu’elle a commencé à travailler, elle ressent une pression immense pour exceller dans son travail. Sophie vit seule dans un appartement qu’elle a récemment acheté et passe la plupart de son temps à travailler, souvent tard dans la nuit.
Symptômes et comportements
Depuis quelques mois, Sophie a remarqué une augmentation de son anxiété. Elle est constamment préoccupée par l’idée de faire des erreurs au travail et vérifie à plusieurs reprises ses calculs et rapports, même après les avoir revérifiés plusieurs fois. Et peu à peu, cette angoisse de l’imperfection a gagné tous les domaines de sa vie. A la maison, par exemple, elle se sent obligée de vérifier que toutes les portes et fenêtres sont fermées plusieurs fois avant de pouvoir se coucher. Elle passe également une quantité excessive de temps à nettoyer et à organiser son espace de vie, craignant que tout désordre ne reflète une incapacité à contrôler sa vie.
En interrogeant son environnement, plusieurs facteurs sociaux apparaissent nettement. Sophie ressent une pression intense pour être performante et compétente dans son travail. L’environnement compétitif de son entreprise, combiné à une culture de l’excellence continue, augmente son anxiété et contribue à ses comportements compulsifs. Les réseaux sociaux influencent également son anxiété. Lorsqu’elle n’est pas au travail, Sophie passe beaucoup de temps sur les réseaux sociaux, où elle voit constamment des images de ses collègues et amis qui semblent réussir parfaitement dans tous les aspects de leur vie. Cela renforce son sentiment de ne jamais en faire assez et son besoin de perfectionnisme.
En vivant seule et en consacrant la majorité de son temps au travail, Sophie se retrouve souvent isolée socialement. Ce manque de soutien social et d’interactions humaines significatives contribue à intensifier ses sentiments d’anxiété et ses comportements obsessionnels.
Processus psychologiques sous-jacents
Un perfectionnisme maladaptatif : Sophie souffre d’un perfectionnisme maladaptatif, croyant que tout écart par rapport à la perfection pourrait entraîner des conséquences négatives majeures, comme perdre son emploi ou être mal vue par ses collègues.
Un besoin de contrôle : pour Sophie, les rituels compulsifs (vérifications répétées, nettoyage excessif) sont une manière de gérer son anxiété. En contrôlant minutieusement certains aspects de sa vie, elle cherche à compenser un sentiment d’incertitude ou de perte de contrôle perçu dans d’autres domaines, comme au travail.
Un renforcement négatif : les comportements compulsifs de Sophie sont renforcés par une réduction temporaire de son anxiété. Par exemple, vérifier plusieurs fois que la porte est verrouillée réduit momentanément son inquiétude, ce qui renforce la probabilité qu’elle répète ce comportement.
Intervention et résultats
À travers des tâches comme « comment aggraver ? », « mettre un peu de désordre » et « faire un peu moins bien », Sophie apprend à identifier et à challenger ses pensées perfectionnistes et catastrophistes.
Prévalence et âge d’apparition
Chez les personnes recherchant un traitement pour les TOC, l’âge d’apparition des symptômes semble légèrement plus précoce chez les hommes que chez les femmes. Une étude par Lensi et al. en 1996 a rapporté que l’âge moyen d’apparition chez les hommes est de 21 ans et de 24 ans chez les femmes. Ces études montrent également que les symptômes apparaissent souvent avant l’âge de 15 ans pour environ un tiers des patients et avant 25 ans pour environ deux tiers d’entre eux.
Facteurs déclenchants et comorbidités
Plusieurs facteurs environnementaux peuvent déclencher les TOC. Rasmussen et Eisen (1988) ont mesuré que 29 % des patients attribuaient le début de leurs symptômes à des événements stressants tels que des responsabilités accrues ou des pertes importantes. De plus, une étude de Williams et Koran en 1997 a révélé que 62 % des femmes interrogées rapportaient une aggravation des symptômes prémenstruels.
Les TOC sont souvent associés à d’autres troubles mentaux. Une étude sur 100 patients souffrant de TOC a révélé une comorbidité élevée avec la dépression majeure (31 %), la phobie sociale (11 %) et les troubles
de l’alimentation (8 %). Cette comorbidité complique la prise en charge des patients et affecte négativement leur qualité de vie.
Impact sur la qualité de vie et le fonctionnement social
Les TOC altèrent significativement la qualité de vie des patients. Une étude menée par Koran, Thienemann et Davenport en 1996 a montré que les patients souffrant de TOC modérés à sévères et ne prenant pas de médicaments avaient des performances sociales et professionnelles inférieures à celles de la population générale et des patients diabétiques. Les TOC peuvent également entraîner des problèmes relationnels, une perte de vie sociale et des difficultés à maintenir des relations amoureuses.
Normes sociales et pression de réussite
Les sociétés modernes imposent souvent des normes élevées de réussite, de perfection et de conformité. Cette pression constante pour atteindre des objectifs irréalistes et inaccessibles peut conduire à un sentiment d’incapacité et d’insatisfaction, contribuant ainsi au développement des TOC. Les individus peuvent recourir à des comportements obsessionnels-compulsifs pour tenter de répondre à ces attentes irréalistes. Selon l’OCD-UK, les attentes sociales, en particu lier celles promues par les médias et la culture populaire, peuvent exacerber les symptômes des TOC en alimentant des standards inatteignables de perfection personnelle (OCDUK).
Des recherches montrent que les normes sociétales influencent la perception de soi et des autres, contribuant à des croyances rigides sur l’apparence physique et la perfection. Cette influence peut conduire à l’apparition de troubles obsessionnels, tels que le trouble dysmorphique corporel, où l’individu développe une obsession malsaine pour des défauts mineurs ou imaginaires de son apparence (MentalHelp.net).
Une société de la perfection :
influence des médias et des réseaux sociaux Les médias et les réseaux sociaux jouent un rôle majeur dans la propagation du perfectionnisme. Les plateformes comme Instagram, Facebook et LinkedIn sont inondées d’images de réussite personnelle et professionnelle, de corps parfaits, et de vies apparemment sans défauts. Cette exposition constante à des standards inatteignables crée une pression pour se conformer à ces idéaux. Une étude publiée par le Journal of Social and Clinical Psychology indique que l’utilisation des réseaux sociaux est corrélée à des niveaux
accrus de perfectionnisme et d’anxiété chez les jeunes adultes. Le cas de Laura illustre parfaitement comment cet « effet de miroir social » où les individus comparent leur propre vie à celle, filtrée et souvent embellie, des autres conduit à une vision déformée de la réalité, où les utilisateurs perçoivent leurs propres accomplissements comme insuffisants par rapport à ceux des autres.
ÉTUDE DE CAS : LAURA SUR INSTA
Laura est une utilisatrice active des réseaux sociaux. A 24 ans, elle passe en moyenne trois heures par jour sur Instagram. Elle utilise cette plateforme principalement pour rester en contact avec ses amis, suivre les actualités, et s’inspirer de personnes influentes dans son domaine professionnel. Cependant, au fil du temps, Laura a commencé à ressentir une pression croissante pour se conformer aux images et aux récits de réussite qu’elle voit en ligne.
Contexte et symptômes
Laura a toujours été une personne consciencieuse, soucieuse de bien faire, que ce soit dans ses études ou au travail. Cependant, depuis qu’elle a intensifié son utilisation des réseaux sociaux, elle remarque un changement dans sa perception de soi et dans ses attentes personnelles. Elle se compare constamment aux autres utilisateurs qui semblent mener des vies parfaites. Les photos de corps sculptés, de vacances de rêve et de réussites professionnelles étalées sur les réseaux sociaux ont fait naître en elle un sentiment d’insatisfaction et d’inadéquation.
Elle commence à se fixer des objectifs irréalistes, tant sur le plan personnel que professionnel. Par exemple, elle se sent obligée de suivre un régime strict et de faire du sport tous les jours pour atteindre le « corps parfait » qu’elle voit sur Instagram. Professionnellement, elle est constamment à la recherche de nouvelles compétences à acquérir pour être à la hauteur des profils qu’elle voit. Cette quête incessante de la perfection entraîne chez elle un stress et une anxiété croissants.
Conséquences psychologiques et sociales
Les effets sur la santé mentale de Laura deviennent de plus en plus apparents. Elle commence à éprouver des sentiments d’anxiété avant de publier des photos ou des mises à jour de statut, craignant de ne pas recevoir suffisamment de « likes » ou de commentaires positifs. Cette peur du jugement et de l’échec contribue à son sentiment de ne jamais être « assez bien ». Sa vie sociale en pâtit également. Laura commence à éviter les rencontres avec ses amis, de peur d’être jugée sur son apparence ou ses accomplissements. Elle se sent déconnectée et isolée, même en présence de ses proches. Sa relation avec son partenaire souffre également, car elle se concentre davantage sur l’image qu’elle projette en ligne plutôt que sur ses interactions réelles.
Lorsque le thérapeute a demandé à Laura « comment aggraver ? », la jeune fille a hésité, puis elle a conclu : « Plus je regarde ces photos, plus je m’empoisonne. Et dire que la majorité des photos sont fausses ou retravaillées... » En se concentrant sur des activités qui lui apportent un vrai bonheur, comme la lecture, la promenade et le temps passé avec des amis proches, elle s’est remise dans la vie réelle et a réduit son temps en ligne. Après cinq séances, elle a reconnu commencer à se libérer de la pression du perfectionnisme.
Manifestations du perfectionnisme : comportements et attitudes
Bien que le perfectionnisme puisse initialement sembler bénéfique dans le milieu professionnel, il peut en réalité réduire la productivité et la satisfaction au travail. Les perfectionnistes peuvent passer un temps excessif sur des détails insignifiants, retardant ainsi l’achèvement des tâches importantes. De plus, leur insatisfaction constante face à leur performance peut entraîner un épuisement professionnel et une baisse de motivation. Dans ce cas, le perfectionnisme se manifeste par des comportements et des attitudes tels que la procrastination, la peur de l’échec et une autocritique sévère. Les perfectionnistes ont tendance à éviter les situations où ils pourraient échouer ou être perçus comme imparfaits. Cette peur de l’échec peut les conduire à procrastiner, car ils préfèrent remettre à plus tard une tâche plutôt que de risquer de ne pas la réaliser parfaitement. C’est le cas d’Alexandre, un jeune homme de 28 ans travaillant dans le domaine du marketing digital, piégé par la peur de l’échec.
ÉTUDE DE CAS : ALEXANDRE VEUT ÊTRE PARFAIT
Dès le début de sa carrière, Alexandre s’est fixé des standards extrêmement élevés, espérant se distinguer par son travail impeccable. Toutefois, ces attentes élevées se sont rapidement transformées en un piège, générant une peur paralysante de l’échec, une tendance à la procrastination, et une autocritique sévère.
Contexte
Alexandre est employé par une agence de marketing reconnue et travaille sur des projets de grande envergure pour des clients importants. Depuis son embauche, il se sent constamment sous pression pour exceller et produire un travail sans défaut. Il passe de longues heures à analyser chaque détail, revoyant sans cesse ses propositions et ses campagnes avant de les présenter. Malgré le fait que ses supérieurs aient déjà exprimé leur satisfaction quant à la qualité de son travail, Alexandre est toujours convaincu qu’il pourrait faire mieux. Or, cette obsession de la perfection commence à influencer son comportement au travail. Alexandre a peur de soumettre son travail tant qu’il ne le considère pas parfait, ce qui le pousse à retarder la soumission de ses projets. Par conséquent, il se retrouve souvent à travailler sous une pression accrue pour respecter les délais, ce qui entraîne du stress et de l’anxiété.
Effets psychologiques
Professionnellement, Alexandre commence à se sentir submergé par le volume de travail accumulé à cause de son besoin devenu obsessionnel et compulsif de tout vérifier. Ses collègues et supérieurs commencent à remarquer ses retards constants et, bien que la qualité de son travail soit excellente, le manque de respect des délais affecte la dynamique de l’équipe et le flux de travail de l’agence. A la maison, Alexandre se critique sévèrement pour son incapacité à gérer son temps et son travail de manière plus efficace. Il ressent un profond sentiment d’échec chaque fois qu’il réalise qu’il a encore une fois repoussé une tâche importante. Son autocritique devient un cycle vicieux : il se blâme de ne pouvoir être parfait, ce qui le pousse à vérifier encore plus et à être en incapacité de rendre son travail dans les temps impartis. Tout cela le pousse à éviter les tâches par peur de nouvelles déceptions. Cette situation a également des effets néfastes sur son bien-être émotionnel. Alexandre commence à ressentir des symptômes de stress et d’anxiété. Il a des difficultés à dormir, passe ses nuits à ressasser ses erreurs passées et à anticiper des critiques futures. Sa confiance en lui s’effrite progressivement, et il commence à douter de ses compétences et de sa valeur en tant que professionnel.
Le cas d’Alexandre illustre comment le perfectionnisme peut conduire à l’obsession, à l’épuisement et à une peur intense de l’échec. Son besoin de produire un travail parfait le paralyse au point de ne plus pouvoir agir, créant une spirale d’autocritique. Le perfectionnisme de ce type est souvent basé sur des croyances irrationnelles, comme l’idée que toute erreur est inacceptable ou que chaque tâche doit être réalisée sans aucun défaut. Le thérapeute a prescrit à Alexandre son symptôme : « Si tu vérifies une fois, tu dois le faire cinq fois » qui a saturé l’habitude dysfonctionnelle du jeune homme. Parallèlement, la prescription « afficher un petit défaut » lui a peu à peu permis de baisser son niveau d’exigence. En apprenant à accepter l’imperfection comme une partie naturelle du processus créatif et professionnel, il a surmonté ses tendances perfectionnistes. Il en rit aujourd’hui.
Relations interpersonnelles
Dans les relations interpersonnelles, le perfectionnisme peut conduire à des attentes irréalistes envers les autres, entraînant des conflits et des déceptions. Les perfectionnistes peuvent également éprouver des difficultés à exprimer leurs émotions et à demander de l’aide, de peur de paraître faibles ou imparfaits. Prenons le cas de Marie, une femme de 32 ans travaillant dans le secteur de la finance, dont le perfectionnisme influence non seulement sa propre vie, mais aussi ses relations avec les autres. En appliquant ses attentes très élevées envers les personnes qui l’entourent, Marie est souvent confrontée à des conflits et des frustrations.
ÉTUDE DE CAS : MARIE ET LA TYRANNIE DE LA PERFECTION
Marie est en couple avec Julien depuis cinq ans. Ils ont une relation généralement stable, mais Marie a tendance à s’attendre à ce que Julien se conforme à ses standards élevés, que ce soit dans la gestion des tâches ménagères ou dans la manière dont il organise sa vie professionnelle et personnelle. Par exemple, elle insiste pour que tout soit rangé de manière impeccable dans leur maison et se montre critique lorsque Julien ne suit pas ses méthodes. Marie exprime rarement ses émotions de manière ouverte, de peur d’être perçue comme vulnérable ou imparfaite. Elle pense que demander de l’aide ou montrer ses faiblesses serait un signe de faiblesse, ce qui la conduit à refouler ses sentiments et à accumuler du ressentiment. Cela rend la communication difficile dans leur relation, car Julien ne sait souvent pas ce que Marie pense ou ressent vraiment...
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Grégoire Vitry PhD, systémicien, formateur, directeur et associé de LACT, directeur de SYPRENE. Docteur-chercheur en psychologie, diplômé de l’école de Palo Alto.
Travaille depuis plusieurs années avec Giorgio Nardone, Nathalie Duriez, Michael Hoyt, Teresa Garcia, Jean-Jacques Wittezaele, Wendel Ray et le MRI afin de promouvoir la recherche et la formation en approche systémique.
Il développe depuis 2016 SYPRENE, un réseau PRN (Vitry et al., 2021, 2022, 2023) en approche systémique permettant notamment d’améliorer sa pratique en étroite collaboration avec le monde universitaire. Il est également en charge de l’école internationale LACT et du congrès International Webinar Brief Therapy.
Auteur, coauteur ou directeur des ouvrages : Quand le travail fait mal, Stratégies de changement : 16 prescriptions thérapeutiques, Comprendre et soigner les addictions, Sortir de l’addiction ?, La thérapie brève systémique stratégique, Le grand livre du diagnostic systémique et de l’intervention stratégique.
Emmanuelle Gallin Thérapeute systémicienne, chargée de recherche à LACT et doctorante en sciences de gestion à l’université de Limoges. Ses recherches portent sur le rôle des croyances dans le modèle de Palo Alto.
Professeur de yoga spécialisée dans la régulation des troubles sensoriels, elle est l’auteure de TSA, TED, TDAH, ce yoga est pour vous, coauteure du Grand livre de diagnostic systémique et de l’intervention stratégique, auteure également d’articles de recherche.
Formation ACS Approche Centrée Solution au CHTIP COLLÈGE D’HYPNOSE ET THÉRAPIES INTÉGRATIVES DE PARIS, à l’Institut INDOLORE, à l’Institut HYPNOTIM.. Elle est Membre de France EMDR IMO.
Elle est formatrice entre autre sur l'Approche Centrée Solution dans le cadre du CHEMSEX.
Revue Hypnose et Thérapies Brèves 77 N°77 : Mai / Juin / Juillet 2025
Julien Betbèze, rédacteur en chef, nous présente ce numéro :
Editorial : « L’empathie et la compassion comme fil d’or du soin » Julien Betbèze
8 / En couverture : Anne Dayot De sable et d’algues Sophie Cohen
10 / Désamorcer les traumas et se replacer dans l’existence par la Psychothérapie du Trauma Réassociative (PTR) Marine Manouvrier et Gérald Brassine
20 / Chemsex, trauma et EMDR-IMO . L’échelle de mesure « croire en moi » Sophie Tournouër
28 / Cothérapie avec Romain Faire émerger les relations sécures Jérémie Roos
36 / La voie métaphorique en « super-inter-vision ». Comment développer la créativité. des soignants Claire Conte-Rossin et Catherine Martin
ESPACE DOULEUR DOUCEUR
46 / Introduction Gérard Ostermann
50 / Empathie et compassion Deux forces pour soigner autrement Olivier de Palézieux
61 / INTERVIEW Mylène Blasco Propos recueillis par Gérard Ostermann
68 / DOSSIER TOC
70 / La société contemporaine : Perfection et fabrique des TOC Grégoire Vitry et Emmanuelle Gallin
82 / La pensée magique dans les TOC Typologie des rituels magiques Claude Michel
QUIPROQUO
98 / Les obsessions S. Colombo, Muhuc
BONJOUR ET APRÈS...
102 / André et son ventre Pour une séance plus qu’émouvante Sophie Cohen
LES CHAMPS DU POSSIBLE
106 / Se cogner au réel Adrian Chaboche
CULTURE MONDE
114 / Dans les sanctuaires du shintō Bruno Bréchemier
LIVRES EN BOUCHE
120 / J. Betbèze et S. Cohen
125 ESPACE FORMATIONS
Illustrations: Anne DAYOT
Les troubles obsessionnels compulsifs (TOC) constituent une pathologie mentale complexe qui touche une proportion significative de la population mondiale. La prévalence de ces troubles semble en hausse, particulièrement dans les sociétés modernes où les pressions sociales et culturelles peuvent exacerber leur développement. Comme le montre le cas de Sophie exposé ci-dessous, des facteurs sociaux contribuent à la recrudescence des TOC dans une société prônant la perfection des corps et la réussite. On remarque ainsi que les personnes atteintes de TOC ont souvent du mal à accepter l’imperfection, tant dans leur propre vie que dans celle des autres. Cette intolérance à l’imperfection peut alimenter des obsessions et des rituels compulsifs. Des études indiquent que les patients souffrant de TOC présentent souvent des biais métacognitifs, comme la fusion pensée-action morale (Frontiers, 2024). Regardons de plus près pour comprendre les mécanismes psychologiques sous-jacents.
ÉTUDE DE CAS : SOPHIE,UNE JEUNE PROFESSIONNELLE DANS UNE GRANDE VILLE
Sophie a 28 ans. Elle vient consulter à la clinique des TOC (1). Depuis un an, elle travaille comme analyste financière dans une grande ville. Elle a toujours été une élève brillante et a réussi avec succès ses études universitaires dans une école de commerce prestigieuse. Mais depuis qu’elle a commencé à travailler, elle ressent une pression immense pour exceller dans son travail. Sophie vit seule dans un appartement qu’elle a récemment acheté et passe la plupart de son temps à travailler, souvent tard dans la nuit.
Symptômes et comportements
Depuis quelques mois, Sophie a remarqué une augmentation de son anxiété. Elle est constamment préoccupée par l’idée de faire des erreurs au travail et vérifie à plusieurs reprises ses calculs et rapports, même après les avoir revérifiés plusieurs fois. Et peu à peu, cette angoisse de l’imperfection a gagné tous les domaines de sa vie. A la maison, par exemple, elle se sent obligée de vérifier que toutes les portes et fenêtres sont fermées plusieurs fois avant de pouvoir se coucher. Elle passe également une quantité excessive de temps à nettoyer et à organiser son espace de vie, craignant que tout désordre ne reflète une incapacité à contrôler sa vie.
En interrogeant son environnement, plusieurs facteurs sociaux apparaissent nettement. Sophie ressent une pression intense pour être performante et compétente dans son travail. L’environnement compétitif de son entreprise, combiné à une culture de l’excellence continue, augmente son anxiété et contribue à ses comportements compulsifs. Les réseaux sociaux influencent également son anxiété. Lorsqu’elle n’est pas au travail, Sophie passe beaucoup de temps sur les réseaux sociaux, où elle voit constamment des images de ses collègues et amis qui semblent réussir parfaitement dans tous les aspects de leur vie. Cela renforce son sentiment de ne jamais en faire assez et son besoin de perfectionnisme.
En vivant seule et en consacrant la majorité de son temps au travail, Sophie se retrouve souvent isolée socialement. Ce manque de soutien social et d’interactions humaines significatives contribue à intensifier ses sentiments d’anxiété et ses comportements obsessionnels.
Processus psychologiques sous-jacents
Un perfectionnisme maladaptatif : Sophie souffre d’un perfectionnisme maladaptatif, croyant que tout écart par rapport à la perfection pourrait entraîner des conséquences négatives majeures, comme perdre son emploi ou être mal vue par ses collègues.
Un besoin de contrôle : pour Sophie, les rituels compulsifs (vérifications répétées, nettoyage excessif) sont une manière de gérer son anxiété. En contrôlant minutieusement certains aspects de sa vie, elle cherche à compenser un sentiment d’incertitude ou de perte de contrôle perçu dans d’autres domaines, comme au travail.
Un renforcement négatif : les comportements compulsifs de Sophie sont renforcés par une réduction temporaire de son anxiété. Par exemple, vérifier plusieurs fois que la porte est verrouillée réduit momentanément son inquiétude, ce qui renforce la probabilité qu’elle répète ce comportement.
Intervention et résultats
À travers des tâches comme « comment aggraver ? », « mettre un peu de désordre » et « faire un peu moins bien », Sophie apprend à identifier et à challenger ses pensées perfectionnistes et catastrophistes.
Prévalence et âge d’apparition
Chez les personnes recherchant un traitement pour les TOC, l’âge d’apparition des symptômes semble légèrement plus précoce chez les hommes que chez les femmes. Une étude par Lensi et al. en 1996 a rapporté que l’âge moyen d’apparition chez les hommes est de 21 ans et de 24 ans chez les femmes. Ces études montrent également que les symptômes apparaissent souvent avant l’âge de 15 ans pour environ un tiers des patients et avant 25 ans pour environ deux tiers d’entre eux.
Facteurs déclenchants et comorbidités
Plusieurs facteurs environnementaux peuvent déclencher les TOC. Rasmussen et Eisen (1988) ont mesuré que 29 % des patients attribuaient le début de leurs symptômes à des événements stressants tels que des responsabilités accrues ou des pertes importantes. De plus, une étude de Williams et Koran en 1997 a révélé que 62 % des femmes interrogées rapportaient une aggravation des symptômes prémenstruels.
Les TOC sont souvent associés à d’autres troubles mentaux. Une étude sur 100 patients souffrant de TOC a révélé une comorbidité élevée avec la dépression majeure (31 %), la phobie sociale (11 %) et les troubles
de l’alimentation (8 %). Cette comorbidité complique la prise en charge des patients et affecte négativement leur qualité de vie.
Impact sur la qualité de vie et le fonctionnement social
Les TOC altèrent significativement la qualité de vie des patients. Une étude menée par Koran, Thienemann et Davenport en 1996 a montré que les patients souffrant de TOC modérés à sévères et ne prenant pas de médicaments avaient des performances sociales et professionnelles inférieures à celles de la population générale et des patients diabétiques. Les TOC peuvent également entraîner des problèmes relationnels, une perte de vie sociale et des difficultés à maintenir des relations amoureuses.
Normes sociales et pression de réussite
Les sociétés modernes imposent souvent des normes élevées de réussite, de perfection et de conformité. Cette pression constante pour atteindre des objectifs irréalistes et inaccessibles peut conduire à un sentiment d’incapacité et d’insatisfaction, contribuant ainsi au développement des TOC. Les individus peuvent recourir à des comportements obsessionnels-compulsifs pour tenter de répondre à ces attentes irréalistes. Selon l’OCD-UK, les attentes sociales, en particu lier celles promues par les médias et la culture populaire, peuvent exacerber les symptômes des TOC en alimentant des standards inatteignables de perfection personnelle (OCDUK).
Des recherches montrent que les normes sociétales influencent la perception de soi et des autres, contribuant à des croyances rigides sur l’apparence physique et la perfection. Cette influence peut conduire à l’apparition de troubles obsessionnels, tels que le trouble dysmorphique corporel, où l’individu développe une obsession malsaine pour des défauts mineurs ou imaginaires de son apparence (MentalHelp.net).
Une société de la perfection :
influence des médias et des réseaux sociaux Les médias et les réseaux sociaux jouent un rôle majeur dans la propagation du perfectionnisme. Les plateformes comme Instagram, Facebook et LinkedIn sont inondées d’images de réussite personnelle et professionnelle, de corps parfaits, et de vies apparemment sans défauts. Cette exposition constante à des standards inatteignables crée une pression pour se conformer à ces idéaux. Une étude publiée par le Journal of Social and Clinical Psychology indique que l’utilisation des réseaux sociaux est corrélée à des niveaux
accrus de perfectionnisme et d’anxiété chez les jeunes adultes. Le cas de Laura illustre parfaitement comment cet « effet de miroir social » où les individus comparent leur propre vie à celle, filtrée et souvent embellie, des autres conduit à une vision déformée de la réalité, où les utilisateurs perçoivent leurs propres accomplissements comme insuffisants par rapport à ceux des autres.
ÉTUDE DE CAS : LAURA SUR INSTA
Laura est une utilisatrice active des réseaux sociaux. A 24 ans, elle passe en moyenne trois heures par jour sur Instagram. Elle utilise cette plateforme principalement pour rester en contact avec ses amis, suivre les actualités, et s’inspirer de personnes influentes dans son domaine professionnel. Cependant, au fil du temps, Laura a commencé à ressentir une pression croissante pour se conformer aux images et aux récits de réussite qu’elle voit en ligne.
Contexte et symptômes
Laura a toujours été une personne consciencieuse, soucieuse de bien faire, que ce soit dans ses études ou au travail. Cependant, depuis qu’elle a intensifié son utilisation des réseaux sociaux, elle remarque un changement dans sa perception de soi et dans ses attentes personnelles. Elle se compare constamment aux autres utilisateurs qui semblent mener des vies parfaites. Les photos de corps sculptés, de vacances de rêve et de réussites professionnelles étalées sur les réseaux sociaux ont fait naître en elle un sentiment d’insatisfaction et d’inadéquation.
Elle commence à se fixer des objectifs irréalistes, tant sur le plan personnel que professionnel. Par exemple, elle se sent obligée de suivre un régime strict et de faire du sport tous les jours pour atteindre le « corps parfait » qu’elle voit sur Instagram. Professionnellement, elle est constamment à la recherche de nouvelles compétences à acquérir pour être à la hauteur des profils qu’elle voit. Cette quête incessante de la perfection entraîne chez elle un stress et une anxiété croissants.
Conséquences psychologiques et sociales
Les effets sur la santé mentale de Laura deviennent de plus en plus apparents. Elle commence à éprouver des sentiments d’anxiété avant de publier des photos ou des mises à jour de statut, craignant de ne pas recevoir suffisamment de « likes » ou de commentaires positifs. Cette peur du jugement et de l’échec contribue à son sentiment de ne jamais être « assez bien ». Sa vie sociale en pâtit également. Laura commence à éviter les rencontres avec ses amis, de peur d’être jugée sur son apparence ou ses accomplissements. Elle se sent déconnectée et isolée, même en présence de ses proches. Sa relation avec son partenaire souffre également, car elle se concentre davantage sur l’image qu’elle projette en ligne plutôt que sur ses interactions réelles.
Lorsque le thérapeute a demandé à Laura « comment aggraver ? », la jeune fille a hésité, puis elle a conclu : « Plus je regarde ces photos, plus je m’empoisonne. Et dire que la majorité des photos sont fausses ou retravaillées... » En se concentrant sur des activités qui lui apportent un vrai bonheur, comme la lecture, la promenade et le temps passé avec des amis proches, elle s’est remise dans la vie réelle et a réduit son temps en ligne. Après cinq séances, elle a reconnu commencer à se libérer de la pression du perfectionnisme.
Manifestations du perfectionnisme : comportements et attitudes
Bien que le perfectionnisme puisse initialement sembler bénéfique dans le milieu professionnel, il peut en réalité réduire la productivité et la satisfaction au travail. Les perfectionnistes peuvent passer un temps excessif sur des détails insignifiants, retardant ainsi l’achèvement des tâches importantes. De plus, leur insatisfaction constante face à leur performance peut entraîner un épuisement professionnel et une baisse de motivation. Dans ce cas, le perfectionnisme se manifeste par des comportements et des attitudes tels que la procrastination, la peur de l’échec et une autocritique sévère. Les perfectionnistes ont tendance à éviter les situations où ils pourraient échouer ou être perçus comme imparfaits. Cette peur de l’échec peut les conduire à procrastiner, car ils préfèrent remettre à plus tard une tâche plutôt que de risquer de ne pas la réaliser parfaitement. C’est le cas d’Alexandre, un jeune homme de 28 ans travaillant dans le domaine du marketing digital, piégé par la peur de l’échec.
ÉTUDE DE CAS : ALEXANDRE VEUT ÊTRE PARFAIT
Dès le début de sa carrière, Alexandre s’est fixé des standards extrêmement élevés, espérant se distinguer par son travail impeccable. Toutefois, ces attentes élevées se sont rapidement transformées en un piège, générant une peur paralysante de l’échec, une tendance à la procrastination, et une autocritique sévère.
Contexte
Alexandre est employé par une agence de marketing reconnue et travaille sur des projets de grande envergure pour des clients importants. Depuis son embauche, il se sent constamment sous pression pour exceller et produire un travail sans défaut. Il passe de longues heures à analyser chaque détail, revoyant sans cesse ses propositions et ses campagnes avant de les présenter. Malgré le fait que ses supérieurs aient déjà exprimé leur satisfaction quant à la qualité de son travail, Alexandre est toujours convaincu qu’il pourrait faire mieux. Or, cette obsession de la perfection commence à influencer son comportement au travail. Alexandre a peur de soumettre son travail tant qu’il ne le considère pas parfait, ce qui le pousse à retarder la soumission de ses projets. Par conséquent, il se retrouve souvent à travailler sous une pression accrue pour respecter les délais, ce qui entraîne du stress et de l’anxiété.
Effets psychologiques
Professionnellement, Alexandre commence à se sentir submergé par le volume de travail accumulé à cause de son besoin devenu obsessionnel et compulsif de tout vérifier. Ses collègues et supérieurs commencent à remarquer ses retards constants et, bien que la qualité de son travail soit excellente, le manque de respect des délais affecte la dynamique de l’équipe et le flux de travail de l’agence. A la maison, Alexandre se critique sévèrement pour son incapacité à gérer son temps et son travail de manière plus efficace. Il ressent un profond sentiment d’échec chaque fois qu’il réalise qu’il a encore une fois repoussé une tâche importante. Son autocritique devient un cycle vicieux : il se blâme de ne pouvoir être parfait, ce qui le pousse à vérifier encore plus et à être en incapacité de rendre son travail dans les temps impartis. Tout cela le pousse à éviter les tâches par peur de nouvelles déceptions. Cette situation a également des effets néfastes sur son bien-être émotionnel. Alexandre commence à ressentir des symptômes de stress et d’anxiété. Il a des difficultés à dormir, passe ses nuits à ressasser ses erreurs passées et à anticiper des critiques futures. Sa confiance en lui s’effrite progressivement, et il commence à douter de ses compétences et de sa valeur en tant que professionnel.
Le cas d’Alexandre illustre comment le perfectionnisme peut conduire à l’obsession, à l’épuisement et à une peur intense de l’échec. Son besoin de produire un travail parfait le paralyse au point de ne plus pouvoir agir, créant une spirale d’autocritique. Le perfectionnisme de ce type est souvent basé sur des croyances irrationnelles, comme l’idée que toute erreur est inacceptable ou que chaque tâche doit être réalisée sans aucun défaut. Le thérapeute a prescrit à Alexandre son symptôme : « Si tu vérifies une fois, tu dois le faire cinq fois » qui a saturé l’habitude dysfonctionnelle du jeune homme. Parallèlement, la prescription « afficher un petit défaut » lui a peu à peu permis de baisser son niveau d’exigence. En apprenant à accepter l’imperfection comme une partie naturelle du processus créatif et professionnel, il a surmonté ses tendances perfectionnistes. Il en rit aujourd’hui.
Relations interpersonnelles
Dans les relations interpersonnelles, le perfectionnisme peut conduire à des attentes irréalistes envers les autres, entraînant des conflits et des déceptions. Les perfectionnistes peuvent également éprouver des difficultés à exprimer leurs émotions et à demander de l’aide, de peur de paraître faibles ou imparfaits. Prenons le cas de Marie, une femme de 32 ans travaillant dans le secteur de la finance, dont le perfectionnisme influence non seulement sa propre vie, mais aussi ses relations avec les autres. En appliquant ses attentes très élevées envers les personnes qui l’entourent, Marie est souvent confrontée à des conflits et des frustrations.
ÉTUDE DE CAS : MARIE ET LA TYRANNIE DE LA PERFECTION
Marie est en couple avec Julien depuis cinq ans. Ils ont une relation généralement stable, mais Marie a tendance à s’attendre à ce que Julien se conforme à ses standards élevés, que ce soit dans la gestion des tâches ménagères ou dans la manière dont il organise sa vie professionnelle et personnelle. Par exemple, elle insiste pour que tout soit rangé de manière impeccable dans leur maison et se montre critique lorsque Julien ne suit pas ses méthodes. Marie exprime rarement ses émotions de manière ouverte, de peur d’être perçue comme vulnérable ou imparfaite. Elle pense que demander de l’aide ou montrer ses faiblesses serait un signe de faiblesse, ce qui la conduit à refouler ses sentiments et à accumuler du ressentiment. Cela rend la communication difficile dans leur relation, car Julien ne sait souvent pas ce que Marie pense ou ressent vraiment...
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Grégoire Vitry PhD, systémicien, formateur, directeur et associé de LACT, directeur de SYPRENE. Docteur-chercheur en psychologie, diplômé de l’école de Palo Alto.
Travaille depuis plusieurs années avec Giorgio Nardone, Nathalie Duriez, Michael Hoyt, Teresa Garcia, Jean-Jacques Wittezaele, Wendel Ray et le MRI afin de promouvoir la recherche et la formation en approche systémique.
Il développe depuis 2016 SYPRENE, un réseau PRN (Vitry et al., 2021, 2022, 2023) en approche systémique permettant notamment d’améliorer sa pratique en étroite collaboration avec le monde universitaire. Il est également en charge de l’école internationale LACT et du congrès International Webinar Brief Therapy.
Auteur, coauteur ou directeur des ouvrages : Quand le travail fait mal, Stratégies de changement : 16 prescriptions thérapeutiques, Comprendre et soigner les addictions, Sortir de l’addiction ?, La thérapie brève systémique stratégique, Le grand livre du diagnostic systémique et de l’intervention stratégique.
Emmanuelle Gallin Thérapeute systémicienne, chargée de recherche à LACT et doctorante en sciences de gestion à l’université de Limoges. Ses recherches portent sur le rôle des croyances dans le modèle de Palo Alto.
Professeur de yoga spécialisée dans la régulation des troubles sensoriels, elle est l’auteure de TSA, TED, TDAH, ce yoga est pour vous, coauteure du Grand livre de diagnostic systémique et de l’intervention stratégique, auteure également d’articles de recherche.
Formation ACS Approche Centrée Solution au CHTIP COLLÈGE D’HYPNOSE ET THÉRAPIES INTÉGRATIVES DE PARIS, à l’Institut INDOLORE, à l’Institut HYPNOTIM.. Elle est Membre de France EMDR IMO.
Elle est formatrice entre autre sur l'Approche Centrée Solution dans le cadre du CHEMSEX.
Revue Hypnose et Thérapies Brèves 77 N°77 : Mai / Juin / Juillet 2025
Julien Betbèze, rédacteur en chef, nous présente ce numéro :
Editorial : « L’empathie et la compassion comme fil d’or du soin » Julien Betbèze
8 / En couverture : Anne Dayot De sable et d’algues Sophie Cohen
10 / Désamorcer les traumas et se replacer dans l’existence par la Psychothérapie du Trauma Réassociative (PTR) Marine Manouvrier et Gérald Brassine
20 / Chemsex, trauma et EMDR-IMO . L’échelle de mesure « croire en moi » Sophie Tournouër
28 / Cothérapie avec Romain Faire émerger les relations sécures Jérémie Roos
36 / La voie métaphorique en « super-inter-vision ». Comment développer la créativité. des soignants Claire Conte-Rossin et Catherine Martin
ESPACE DOULEUR DOUCEUR
46 / Introduction Gérard Ostermann
50 / Empathie et compassion Deux forces pour soigner autrement Olivier de Palézieux
61 / INTERVIEW Mylène Blasco Propos recueillis par Gérard Ostermann
68 / DOSSIER TOC
70 / La société contemporaine : Perfection et fabrique des TOC Grégoire Vitry et Emmanuelle Gallin
82 / La pensée magique dans les TOC Typologie des rituels magiques Claude Michel
QUIPROQUO
98 / Les obsessions S. Colombo, Muhuc
BONJOUR ET APRÈS...
102 / André et son ventre Pour une séance plus qu’émouvante Sophie Cohen
LES CHAMPS DU POSSIBLE
106 / Se cogner au réel Adrian Chaboche
CULTURE MONDE
114 / Dans les sanctuaires du shintō Bruno Bréchemier
LIVRES EN BOUCHE
120 / J. Betbèze et S. Cohen
125 ESPACE FORMATIONS
Illustrations: Anne DAYOT
Cothérapie avec Romain: faire émerger les relations sécures. Revue Hypnose et Thérapies Brèves 77.
Dr Jérémie ROOS
Engagés dans une cothérapie, où il s’agit de mutualiser leurs compétences, le thérapeute et son patient Romain partent en chasse du « Démon Bloqueur ».
Celui-ci fige Romain dans le contrôle et le repli sur soi, vaincre le « Démon » lui permettrait de retrouver des relations humaines saines et vivantes...
Une des façons de voir la thérapie est de la percevoir comme un travail qui portera sur deux axes : d’un côté la déconstruction et de l’autre la construction. Déconstruction de ce qui entretient le pouvoir de l’histoire dominatrice saturée par le problème. Construction de ce qui entretient le pouvoir de l’histoire préférée de la personne, influencée par son principe de vie. La déconstruction passe par le fait d’éloigner et de diminuer le pouvoir dissociatif des relations qui entretiennent le problème. La construction passe par le fait de faire émerger et de renforcer la dimension sécure des relations potentiellement vivantes.
En effet, l’ambiance relationnelle qui colore les situations dans lesquelles le sujet se trouve sera liée au maillage relationnel avec lequel il est en lien. Si, à un niveau inconscient, dans une situation, je suis connecté à des relations qui me voient comme une personne avec qui une relation de confiance est possible, je peux me percevoir comme ayant confiance en moi et prendre ma place. Si, à l’inverse, le contexte est triangulé par des relations qui me voient comme n’ayant pas de valeur, je vais me percevoir comme inférieur, indigne et je voudrais disparaître de la situation.
On peut dire que l’identité est un nœud de relations. C’est le « club de vie » dont parle Michael White. Nous pouvons en voir une illustration à travers l’histoire de Romain, qui a donné son accord pour partager le contenu de nos échanges de façon anonymisée. Romain a 25 ans, ça fait maintenant près de six mois que nous travaillons ensemble et nous commençons à faire une équipe de co-thérapeutes bien aguerrie.
COTHÉRAPIE POV : LE PSY AU PREMIER RENDEZ-VOUS
- Thérapeute : « Je prends des notes à l’ordinateur en même temps qu’on discute, c’est OK pour vous ?
- Romain : ...
- Th. : La prise de notes ça me permet de mémoriser ce que nous partageons et d’organiser ma pensée.
- Romain : D’accord.
- Th. : Il y a peut-être deux autres choses que j’aimerais préciser sur la prise de notes si je peux prendre une minute pour les évoquer ?
- Romain : ... (détourne les yeux du mur à sa droite pour croiser mon regard un instant).
- Th. : La première, ça va sans dire mais parfois ça va mieux en le disant. C’est de dire que toutes les notes que je prends vont dans le dossier médical sur mon ordinateur et ne sortiront pas de ce bureau. C’est le secret professionnel. Tout ce qu’on se dit reste un secret entre vous et moi. La seconde c’est de dire que si mes notes sont confidentielles pour tout le monde, elles ne le sont pas pour vous, et vous pouvez me demander de les imprimer pour vous à tout moment.
- Romain : ... (me regarde de façon plus appuyée).
- Th. : Oui, parce que dans ma façon de travailler, j’aime me dire que lors de nos conversations je prends des notes pour nous deux. Comme entre les rendez-vous peut-être que vous pourriez être amené à prendre des notes pour nous deux. Prendre des notes sur des choses que je pourrais peut-être vous proposer d’observer, ou qui sait, des expériences que je pourrais vous proposer de réaliser, entre les rendez-vous, comme co-thérapeute. Ça peut être OK pour vous ?
- Romain : ... (moue sceptique).
- Th. : Mais peut-être que vous souhaitez que je précise co-thérapeute ?
- Romain (d’une faible voix) : Oui, co- Thérapeute je ne connais pas trop ce mot...
- Th. : J’ai tendance à croire que si une personne n’a pas réussi à sortir d’une problématique avec ses propres compétences, il ne s’agit pas qu’elle renonce à ses compétences pour s’appuyer exclusivement sur les compétences de quelqu’un d’autre. Mais plutôt de voir comment l’on peut mutualiser des compétences qui se situent à des niveaux différents. Si on peut dire que je suis un expert de la santé mentale en général, et des liens que ça peut avoir avec les différentes parties de la vie en général ; on peut dire que vous êtes l’expert de votre santé à vous, et des liens que ça a avec les différentes parties de votre vie à vous. On peut dire que vous êtes l’expert de votre propre vie. On voit donc qu’il peut y avoir un bénéfice à mettre en commun ces compétences plus spécifiques et plus générales pour augmenter la probabilité de sortir de la problématique. Vous êtes d’accord avec ça ?
- Romain (se redresse) : Bien sûr. »
Au début ça n’a pas été facile. Romain avait déjà rencontré de nombreux psys malgré son jeune âge et il savait qu’il n’avait presque aucun espoir à attendre de ce côté-là. « Ça fait des années que je fais des thérapies et que j’ai des traitements qui ne fonctionnent pas. » Romain était très fermé, et ses réponses à mes questions étaient toujours allusives, floues, voire absentes. On ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment, nous a appris le cardinal de Retz. Il a fallu plusieurs semaines pour identifier le « Démon Bloqueur », nom que notre travail d’enquête commun a permis d’attribuer au problème qui avait pris le pouvoir sur une grande partie de l’expérience de vie de Romain.
Le Démon Bloqueur dit : « Mets une carapace de protection ! » Quand il exerce ses effets il fait avoir peur du jugement, il pousse Romain à être dans le contrôle pour s’adapter aux autres et il empêche d’être soi-même. « On me pose des questions et j’essaie de répondre à côté parce que je n’ai pas envie de me livrer », « je suis bloqué, je fais tout pour disparaître »... Mais c’est typiquement un de ces pièges à double-fond dont les problèmes sont friands. Les problèmes poussent à mettre en œuvre une tentative de solution face au piège qu’ils ont tendu, qui va sembler de bon sens mais est en fait contre-productive et va aggraver la situation. « En fait, quand il me fait faire ça je vois que ça renvoie l’image de quelqu’un de pas bien, d’introverti, qui ne veut pas s’ouvrir aux autres. Quelqu’un de pas normal. Du coup, le Démon Bloqueur arrive à leur faire croire que je suis nul. Je le vois dans le regard de ma mère et de mon père à table. Et ça les pousse à me parler avec jugement, méchanceté, dénigrement. »
Le pire : le Démon Bloqueur empêche la « création d’amitié saine », qui est ce qui guide Romain dans la vie et lui donne du sens. Nous avons pu faire émerger ensemble, à travers de nombreuses anecdotes, que pour lui, quand la « création d’amitié saine » est là, les relations humaines sont vivantes. Il y a des intentions partagées d’écoute, de compréhension et de bienveillance, et « ça permet à chacun de se confier, de se livrer, de tomber les masques ». Ce qui « permet de se rendre compte qu’on est pareil, de se sentir compris, et pas jugé. Et ça fait un cercle vertueux ».
Hélas, comme en prônant l’évitement de tous contacts humains, et en questionnant la possibilité de la confiance dans la relation humaine, le Démon Bloqueur empêchait de vivre ce qui donne du sens à la vie pour Romain, une seule issue semblait possible : le suicide. En effet, si dans le monde il ne peut y avoir que du jugement, comment quitter son appartement sans être envahi par une peur panique, à l’idée de se jeter dans la fosse aux lions ? Mais sous la couette, au bout d’un moment il n’y a qu’un froid sidéral et un vide sans fond. C’est l’impasse, et la mort semble être la solution pour ne plus souffrir. « Son projet c’est de me faire abandonner. Il veut m’empêcher d’être moi-même et de vivre une vie normale. Alors que quand je résiste, je deviens moi, une autre personne que celle qu’il veut que je sois. »
Mais aujourd’hui nous n’en sommes plus là, et Romain a le plaisir de m’annoncer...
Pour lire la suite ou vous abonner...
DR JÉRÉMIE ROOS Médecin psychiatre, psychothérapeute et formateur en psychothérapies. Formé à l’hypnose, thérapies brèves, TLMR et thérapie narrative. Exerce en libéral à Aix-en-Provence.
Formation ACS Approche Centrée Solution au CHTIP COLLÈGE D’HYPNOSE ET THÉRAPIES INTÉGRATIVES DE PARIS, à l’Institut INDOLORE, à l’Institut HYPNOTIM.. Elle est Membre de France EMDR IMO.
Elle est formatrice entre autre sur l'Approche Centrée Solution dans le cadre du CHEMSEX.
Sommaire du numéro 77 de la Revue Hypnose et Thérapies Brèves N°77 : Mai / Juin / Juillet 2025
Julien Betbèze, rédacteur en chef, nous présente ce numéro :
Editorial : « L’empathie et la compassion comme fil d’or du soin » Julien Betbèze
8 / En couverture : Anne Dayot De sable et d’algues Sophie Cohen
10 / Désamorcer les traumas et se replacer dans l’existence par la Psychothérapie du Trauma Réassociative (PTR) Marine Manouvrier et Gérald Brassine
20 / Chemsex, trauma et EMDR-IMO . L’échelle de mesure « croire en moi » Sophie Tournouër
28 / Cothérapie avec Romain Faire émerger les relations sécures Jérémie Roos
36 / La voie métaphorique en « super-inter-vision ». Comment développer la créativité. des soignants Claire Conte-Rossin et Catherine Martin
ESPACE DOULEUR DOUCEUR
46 / Introduction Gérard Ostermann
50 / Empathie et compassion Deux forces pour soigner autrement Olivier de Palézieux
61 / INTERVIEW Mylène Blasco Propos recueillis par Gérard Ostermann
68 / DOSSIER TOC
70 / La société contemporaine : Perfection et fabrique des TOC Grégoire Vitry et Emmanuelle Gallin
82 / La pensée magique dans les TOC Typologie des rituels magiques Claude Michel
QUIPROQUO
98 / Les obsessions S. Colombo, Muhuc
BONJOUR ET APRÈS...
102 / André et son ventre Pour une séance plus qu’émouvante Sophie Cohen
LES CHAMPS DU POSSIBLE
106 / Se cogner au réel Adrian Chaboche
CULTURE MONDE
114 / Dans les sanctuaires du shintō Bruno Bréchemier
LIVRES EN BOUCHE
120 / J. Betbèze et S. Cohen
125 ESPACE FORMATIONS
Illustrations: Anne DAYOT
Celui-ci fige Romain dans le contrôle et le repli sur soi, vaincre le « Démon » lui permettrait de retrouver des relations humaines saines et vivantes...
Une des façons de voir la thérapie est de la percevoir comme un travail qui portera sur deux axes : d’un côté la déconstruction et de l’autre la construction. Déconstruction de ce qui entretient le pouvoir de l’histoire dominatrice saturée par le problème. Construction de ce qui entretient le pouvoir de l’histoire préférée de la personne, influencée par son principe de vie. La déconstruction passe par le fait d’éloigner et de diminuer le pouvoir dissociatif des relations qui entretiennent le problème. La construction passe par le fait de faire émerger et de renforcer la dimension sécure des relations potentiellement vivantes.
En effet, l’ambiance relationnelle qui colore les situations dans lesquelles le sujet se trouve sera liée au maillage relationnel avec lequel il est en lien. Si, à un niveau inconscient, dans une situation, je suis connecté à des relations qui me voient comme une personne avec qui une relation de confiance est possible, je peux me percevoir comme ayant confiance en moi et prendre ma place. Si, à l’inverse, le contexte est triangulé par des relations qui me voient comme n’ayant pas de valeur, je vais me percevoir comme inférieur, indigne et je voudrais disparaître de la situation.
On peut dire que l’identité est un nœud de relations. C’est le « club de vie » dont parle Michael White. Nous pouvons en voir une illustration à travers l’histoire de Romain, qui a donné son accord pour partager le contenu de nos échanges de façon anonymisée. Romain a 25 ans, ça fait maintenant près de six mois que nous travaillons ensemble et nous commençons à faire une équipe de co-thérapeutes bien aguerrie.
COTHÉRAPIE POV : LE PSY AU PREMIER RENDEZ-VOUS
- Thérapeute : « Je prends des notes à l’ordinateur en même temps qu’on discute, c’est OK pour vous ?
- Romain : ...
- Th. : La prise de notes ça me permet de mémoriser ce que nous partageons et d’organiser ma pensée.
- Romain : D’accord.
- Th. : Il y a peut-être deux autres choses que j’aimerais préciser sur la prise de notes si je peux prendre une minute pour les évoquer ?
- Romain : ... (détourne les yeux du mur à sa droite pour croiser mon regard un instant).
- Th. : La première, ça va sans dire mais parfois ça va mieux en le disant. C’est de dire que toutes les notes que je prends vont dans le dossier médical sur mon ordinateur et ne sortiront pas de ce bureau. C’est le secret professionnel. Tout ce qu’on se dit reste un secret entre vous et moi. La seconde c’est de dire que si mes notes sont confidentielles pour tout le monde, elles ne le sont pas pour vous, et vous pouvez me demander de les imprimer pour vous à tout moment.
- Romain : ... (me regarde de façon plus appuyée).
- Th. : Oui, parce que dans ma façon de travailler, j’aime me dire que lors de nos conversations je prends des notes pour nous deux. Comme entre les rendez-vous peut-être que vous pourriez être amené à prendre des notes pour nous deux. Prendre des notes sur des choses que je pourrais peut-être vous proposer d’observer, ou qui sait, des expériences que je pourrais vous proposer de réaliser, entre les rendez-vous, comme co-thérapeute. Ça peut être OK pour vous ?
- Romain : ... (moue sceptique).
- Th. : Mais peut-être que vous souhaitez que je précise co-thérapeute ?
- Romain (d’une faible voix) : Oui, co- Thérapeute je ne connais pas trop ce mot...
- Th. : J’ai tendance à croire que si une personne n’a pas réussi à sortir d’une problématique avec ses propres compétences, il ne s’agit pas qu’elle renonce à ses compétences pour s’appuyer exclusivement sur les compétences de quelqu’un d’autre. Mais plutôt de voir comment l’on peut mutualiser des compétences qui se situent à des niveaux différents. Si on peut dire que je suis un expert de la santé mentale en général, et des liens que ça peut avoir avec les différentes parties de la vie en général ; on peut dire que vous êtes l’expert de votre santé à vous, et des liens que ça a avec les différentes parties de votre vie à vous. On peut dire que vous êtes l’expert de votre propre vie. On voit donc qu’il peut y avoir un bénéfice à mettre en commun ces compétences plus spécifiques et plus générales pour augmenter la probabilité de sortir de la problématique. Vous êtes d’accord avec ça ?
- Romain (se redresse) : Bien sûr. »
Au début ça n’a pas été facile. Romain avait déjà rencontré de nombreux psys malgré son jeune âge et il savait qu’il n’avait presque aucun espoir à attendre de ce côté-là. « Ça fait des années que je fais des thérapies et que j’ai des traitements qui ne fonctionnent pas. » Romain était très fermé, et ses réponses à mes questions étaient toujours allusives, floues, voire absentes. On ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment, nous a appris le cardinal de Retz. Il a fallu plusieurs semaines pour identifier le « Démon Bloqueur », nom que notre travail d’enquête commun a permis d’attribuer au problème qui avait pris le pouvoir sur une grande partie de l’expérience de vie de Romain.
Le Démon Bloqueur dit : « Mets une carapace de protection ! » Quand il exerce ses effets il fait avoir peur du jugement, il pousse Romain à être dans le contrôle pour s’adapter aux autres et il empêche d’être soi-même. « On me pose des questions et j’essaie de répondre à côté parce que je n’ai pas envie de me livrer », « je suis bloqué, je fais tout pour disparaître »... Mais c’est typiquement un de ces pièges à double-fond dont les problèmes sont friands. Les problèmes poussent à mettre en œuvre une tentative de solution face au piège qu’ils ont tendu, qui va sembler de bon sens mais est en fait contre-productive et va aggraver la situation. « En fait, quand il me fait faire ça je vois que ça renvoie l’image de quelqu’un de pas bien, d’introverti, qui ne veut pas s’ouvrir aux autres. Quelqu’un de pas normal. Du coup, le Démon Bloqueur arrive à leur faire croire que je suis nul. Je le vois dans le regard de ma mère et de mon père à table. Et ça les pousse à me parler avec jugement, méchanceté, dénigrement. »
Le pire : le Démon Bloqueur empêche la « création d’amitié saine », qui est ce qui guide Romain dans la vie et lui donne du sens. Nous avons pu faire émerger ensemble, à travers de nombreuses anecdotes, que pour lui, quand la « création d’amitié saine » est là, les relations humaines sont vivantes. Il y a des intentions partagées d’écoute, de compréhension et de bienveillance, et « ça permet à chacun de se confier, de se livrer, de tomber les masques ». Ce qui « permet de se rendre compte qu’on est pareil, de se sentir compris, et pas jugé. Et ça fait un cercle vertueux ».
Hélas, comme en prônant l’évitement de tous contacts humains, et en questionnant la possibilité de la confiance dans la relation humaine, le Démon Bloqueur empêchait de vivre ce qui donne du sens à la vie pour Romain, une seule issue semblait possible : le suicide. En effet, si dans le monde il ne peut y avoir que du jugement, comment quitter son appartement sans être envahi par une peur panique, à l’idée de se jeter dans la fosse aux lions ? Mais sous la couette, au bout d’un moment il n’y a qu’un froid sidéral et un vide sans fond. C’est l’impasse, et la mort semble être la solution pour ne plus souffrir. « Son projet c’est de me faire abandonner. Il veut m’empêcher d’être moi-même et de vivre une vie normale. Alors que quand je résiste, je deviens moi, une autre personne que celle qu’il veut que je sois. »
Mais aujourd’hui nous n’en sommes plus là, et Romain a le plaisir de m’annoncer...
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DR JÉRÉMIE ROOS Médecin psychiatre, psychothérapeute et formateur en psychothérapies. Formé à l’hypnose, thérapies brèves, TLMR et thérapie narrative. Exerce en libéral à Aix-en-Provence.
Formation ACS Approche Centrée Solution au CHTIP COLLÈGE D’HYPNOSE ET THÉRAPIES INTÉGRATIVES DE PARIS, à l’Institut INDOLORE, à l’Institut HYPNOTIM.. Elle est Membre de France EMDR IMO.
Elle est formatrice entre autre sur l'Approche Centrée Solution dans le cadre du CHEMSEX.
Sommaire du numéro 77 de la Revue Hypnose et Thérapies Brèves N°77 : Mai / Juin / Juillet 2025
Julien Betbèze, rédacteur en chef, nous présente ce numéro :
Editorial : « L’empathie et la compassion comme fil d’or du soin » Julien Betbèze
8 / En couverture : Anne Dayot De sable et d’algues Sophie Cohen
10 / Désamorcer les traumas et se replacer dans l’existence par la Psychothérapie du Trauma Réassociative (PTR) Marine Manouvrier et Gérald Brassine
20 / Chemsex, trauma et EMDR-IMO . L’échelle de mesure « croire en moi » Sophie Tournouër
28 / Cothérapie avec Romain Faire émerger les relations sécures Jérémie Roos
36 / La voie métaphorique en « super-inter-vision ». Comment développer la créativité. des soignants Claire Conte-Rossin et Catherine Martin
ESPACE DOULEUR DOUCEUR
46 / Introduction Gérard Ostermann
50 / Empathie et compassion Deux forces pour soigner autrement Olivier de Palézieux
61 / INTERVIEW Mylène Blasco Propos recueillis par Gérard Ostermann
68 / DOSSIER TOC
70 / La société contemporaine : Perfection et fabrique des TOC Grégoire Vitry et Emmanuelle Gallin
82 / La pensée magique dans les TOC Typologie des rituels magiques Claude Michel
QUIPROQUO
98 / Les obsessions S. Colombo, Muhuc
BONJOUR ET APRÈS...
102 / André et son ventre Pour une séance plus qu’émouvante Sophie Cohen
LES CHAMPS DU POSSIBLE
106 / Se cogner au réel Adrian Chaboche
CULTURE MONDE
114 / Dans les sanctuaires du shintō Bruno Bréchemier
LIVRES EN BOUCHE
120 / J. Betbèze et S. Cohen
125 ESPACE FORMATIONS
Illustrations: Anne DAYOT
CHEMSEX, Trauma et EMDR - IMO.
L’Échelle de mesure «CROIRE EN MOI» Entre technique d’Exception-Différence-Relation (EDR modèle ACS) et séances d’EMDR-IMO (1), déroulé d’une thérapie en huit entretiens pour « guérir l’intime » d’un patient addict au chemsex et dont il faut « déboulonner » les traumas.
Le chemsex est une pratique sexuelle actuellement en plein essor dans le milieu des hommes ayant une sexualité avec des hommes (HsH). Cette pratique mêle une double addiction au sexe et aux nouvelles drogues de synthèse, généralement dans des contextes de partouzes (« plans »).
Nous voyons apparaître, au vu du plaisir dé* Ployé et de l’endurance obtenue lors de ces contextes, des addictions rapidement ancrées surtout en cas d’injection (« slam »).
Cette pratique devient un enjeu de santé publique même si l’utilisation de la Prophylaxie pré-exposition (PrEP) permettant une prévention des contaminations au VIH est usuelle. Une consultation gratuite et spécialisée chemsex m’est confiée au CSAPA (2) du centre Monceau.
Monsieur X., la trentaine, se présente à ma consultation chemsex, il pleure énormément en parlant de cette tristesse inconsolable, d’une envie de mourir et des traumatismes subis au cours de sa vie (abus sexuels par sa nounou sur plusieurs années lors de sa petite enfance, rejet parental dû à son homosexualité, agression physique par son ex avec qui il est tombé, il y a deux ans, dans le slam, pratique qui consiste à s’injecter des produits de synthèse).
Ayant traversé les océans pour rejoindre la France, passionné de littérature, il a fait des études de comptabilité afin de plaire à son père. Pourtant, il ne rêve que d’écrire et n’est venu ici que pour fuir le jugement et s’épanouir dans son identité HsH assumée. Dès son arrivée il y a trois ans, il trouve un travail en lien avec son diplôme, rencontre un homme dont il tombe fou amoureux et fait la connaissance du chemsex. Ils vont le pratiquer ensemble dès le début de leur relation avec de multiples partenaires. Et après une rupture douloureuse, il maintient cette habitude désormais hebdomadaire et indésirable.
Sur ce premier entretien, il est extrêmement agité, il parle de la déception qu’il a infligée à son père, homme très religieux et de ses phrases qu’il ne parvient pas à effacer : « Je ne peux accepter d’avoir un fils gay, tu peux oublier que tu as une famille... » Il se remémore également la prise de distance de sa mère et se sent coupable de tout cela.
Dès son arrivée , il trouve un travail en lien avec son diplôme, rencontre un homme dont il tombe fou amoureux et fait la connaissance du chemsex. Après évaluation, il ne présente pas de risque suicidaire et je lui évoque la technique de mouvements oculaires indéniablement utile en cas de psychotraumatisme. S’il décide de revenir, nous pourrons envisager ce traitement s’il en est désireux suite à la présentation de cette méthode. Le fait d’atteindre l’objectif formulé : « je veux croire en moi » permettra selon lui l’arrêt du chemsex qui est devenu désormais le danger à éviter. Croire en lui permettra aussi d’entamer des études de littérature et de « se sentir capable de vivre ».
Au travers du modèle Approche Centrée Solution (ACS) – mon socle de référence depuis de nombreuses années – il est pratiquement toujours possible dès le premier entretien de définir l’objectif des patients rencontrés (l’objectif étant affinable, modulable, réorientable), en commençant en parallèle à tenter une activation des ressources qui soit la plus efficace possible. Activation se devant d’être respectueuse du patient et de sa temporalité, afin qu’il puisse parvenir à dire un jour qu’il n’a plus besoin d’un travail thérapeutique. De plus, la dimension des exceptions au problème est centrale dans ce modèle et son exploration stratégique permet généralement des bénéfices rapides chez le patient.
Lors du deuxième entretien, nous regardons comment nous pouvons commencer à agir sur la consommation de chemsex de M. X. et explorons donc les moments où la consommation le laisse un peu plus tranquille (externalisation pour le sortir de cette identité de « chemsexeur »).
Nous trouvons notamment que l’emploi alimentaire qu’il occupe actuellement l’amène certaines fois à travailler le week-end, ce qui diminue la consommation. Nous convenons qu’il lui est possible (toujours demander l’autorisation du patient) de s’organiser pour travailler sur plus de week-ends, ce qui im* Pactera la fréquence des plans chemsex. Par le suivi que nous entamons, impliquant un regard extérieur, il a pu ne rester que seize heures sur le dernier plan à la place des deux jours habituels.
En observant ce qu’il a fait différemment sur les moments préservés, nous remarquons qu’il lit plus, qu’il a étudié certains textes, s’est fait à manger... M. X., toujours très fragile, aborde sa vie en observant des obligations qu’il se donne sans jamais s’autoriser à prendre du plaisir dans son quotidien. En explorant les bénéfices avec la technique d’Exception-Différence-Relation (EDR modèle ACS) nous obtenons un épaississement de ses compétences (neuroplasticité cérébrale permettant l’utilisation de nouveaux chemins neuronaux). Cela permet également de commencer à décaler le patient de l’intrication identitaire à la consommation. En fin d’entretien, nous convenons d’une tâche d’observation des moments où il parvient à ne pas consommer, à retarder ou abréger un plan. De plus, il accepte une tâche (paradoxale dans le sens de le contraindre au plaisir) qui l’amènera à réserver une heure par jour pour faire des activités lui faisant plaisir.
Nous ferons lors du troisième entretien, environ un mois après, un état des lieux concernant les points d’avancée malgré les difficultés, afin de solidifier et encourager ce qui existe déjà. Nous évaluons aussi les tâches afin de réaxer le travail thérapeutique. Nous pouvons déjà noter des ressources qui s’étoffent et permettent de commencer à mettre le patient sur la voie de l’espoir. M. X. met en avant qu’il réalise avoir fait un pas sur le fait d’être conscient, qu’il voit les points à changer et remarque que la tâche de prendre du plaisir lui a imposé quelque chose qu’il s’interdisait, qui pourtant lui fait du bien, le connecte à lui-même et lui permet d’accompagner la réduction de consommation.
Le chemsex est encore d’actualité mais a fortement diminué... Nous évaluons l’échelle que nous avions posée dès le premier entretien autour de « croire en moi ». Il évalue être à 4/10 sur l’échelle alors qu’il était à 0,5 au premier entretien. Il estime qu’une fois arrivé à 8 sur cette échelle, cela indiquera que notre travail est terminé. Nous en profitons pour épaissir les bénéfices déjà obtenus grâce à la technique EDR ci-dessus évoquée (qu’est-ce que cela change ? comment le remarquez-vous ? comment cela bouge vos pensées, émotions, actions ? qu’est-ce que cela permet qui n’était pas possible avant ?...) = Neuroplasticité cérébrale.
Nous affinons la préparation de la séance d’EMDR - IMO (en plus des notes prises avec son autorisation lors du premier entretien). J’explique le fonctionnement d’une séance, son protocole et préviens des effets secondaires possibles (fatigue, nausée, vomissement, diarrhée, pleurs, colère...). J’insiste sur le fait que cette séance risque d’être extrêmement remuante pour lui, au vu de l’ancienneté et de la place du trauma dans sa structuration psychique. Elle est prévue d’un commun accord au prochain entretien.
Le jour de la séance, ou quatrième entretien. A partir de mes notes, en l’invitant à suivre les mouvements avec ses yeux sans bouger la tête, je lui pose entre chaque mouvement la même question : « qu’est-ce qui vient ? ». En lui ayant précisé auparavant que cela peut être une pensée, une émotion, une sensation, une image, une phrase, un souvenir, un ressenti corporel... Et que nous prenons ce qui vient spontanément.
A l’inverse de mon modèle Socle Orienté Solution, le mouvement oculaire vient entrer dans la douleur traumatique afin de la cibler proprement, la nettoyer et l’aider à cicatriser. Je reprendrai les phrases de mon patient sans modification aucune et l’inviterai pour chacune à pouvoir les répéter dans sa langue maternelle (ce que je fais avec chaque patient qui n’a pas eu comme première langue le français car cela me semble plus propice à « déboulonner » le trauma). Ces phrases formulées telles que son père a pu lui exprimer ou de la manière dont il se dit les choses intérieurement sont notées précisément sans que j’y introduise le moindre changement.
La séance va demander une présence analogique et un étayage forts, tout en veillant à être à la bonne distance, notamment par des mots de soutien (Digital) accompagnés d’un regard bienveillant (Analogique) face à l’émotionnel blessé de mon patient qui prendra une dimension explosive au cours de la séance. Nous utiliserons ci-dessous « MO » pour indiquer chaque fois que nous effectuons des mouvements oculaires.
Je m’assois comme toujours en décalé face à mon patient afin de pouvoir faire les mouvements et prendre des notes sur mon carnet. Nous testons la distance par rapport à ses yeux. Certaines phrases sont répétées plusieurs fois à la suite lors du mouvement.
- Thérapeute : MO + « Mes parents n’acceptaient pas que je sois homosexuel, ils n’ont que la religion dans la tête.
- Patient : Je déteste mon père.
- Th. : MO + « Il me regarde comme un possédé (rebondir avec une phrase récoltée lors de la préparation de la séance).
- P. : Ils ne sont jamais contents de moi, comme si j’étais perdu (M. X. s’agite, il bouge sur son fauteuil).
- Th. : C’est comment dans le corps ?
- P. : Je me sens coincé.
- Th. : Respirez ! Les mains, les pieds, des sensations particulières ? (les patients y ressentent souvent des picotements ou autres sensations lorsque l’on cible bien le trauma).
- P. : Lourd et chaud.
- Th. : OK, on reprend. MO + « Tu peux oublier que tu as une mère...
- P. : Elle a pris ses distances avec moi, je souffre ! (M. X. se met à pleurer).
- Th. : MO + « Je ne peux accepter d’avoir un fils gay, tu peux oublier que tu as une famille...
- P. : Mon père m’a traité de pédé et de fauxcul, je n’oublierai jamais son regard... (M. X. bouge énormément, il pleure et se mouche beaucoup).
- Th. : Je sais que c’est très difficile pour vous de repasser par ces moments, courage, on continue... MO + « Tu es égoïste, tu ne penses qu’à toi...
- P. : Je n’ai pas de famille, je n’aurai jamais de famille (il s’effondre, crie dans sa langue maternelle des insultes adressées à son père).
- Th. : Voulez-vous que je me retourne ? (analogique afin de ne pas lui imposer mon regard).
- P. : Je ne supporte pas qu’on me regarde dans cet état ! (dit-il agressivement, me criant dessus au milieu des larmes et de la morve coulant sur son visage).
Je me retourne en lui demandant s’il veut un verre d’eau.
- P. : Je veux arrêter et partir.
Il se lève dans une agitation qu’il ne peut contrôler, le visage décomposé, en criant des insultes dans sa langue maternelle.
- Th. : Désolée, comme je vous l’avais dit, nous devons continuer afin de traiter le psychotrauma ; maintenant que nous avons ouvert la brèche, il ne serait pas raisonnable de vous laisser partir comme cela. Accrochez-vous... (le soutien doit être infaillible à cet instant afin d’étayer le patient).
- P. : Je me laisse violer, je ne sais pas ce qu’est d’être un enfant “grâce” à cette baby-sitter !
Il se rassoit en acceptant de continuer.
- Th. : Oui, ce que vous avez vécu est totalement injuste... (acceptation de cette réalité traumatique). Courage, nous nous y remettons... MO + « Ils ne sont jamais contents de moi, c’est comme si j’étais perdu.
- P. : Je ne vis que pour les autres, je veux arrêter. Je veux accepter que ce que j’aime et pas pour faire plaisir aux autres... »
La séance durera 45 minutes, M. X. est épuisé et démoralisé, d’où l’importance de prévenir en amont les patients de l’après-séance, des conséquences possiblement difficiles sur plusieurs jours, de pouvoir prévoir quelqu’un de ressource et de l’importance d’aller se reposer après. De nombreux patients chemsexeurs m’ont signalé une sensation identique à une prise de kétamine à la sortie d’une séance d’EMDR-IMO. (Certains ont même pu dire avec humour : « merci pour la défonce gratos ! ».) Mon action en mouvements oculaires étant généralement extrêmement ciblée, elle ne nécessite normalement qu’une séance, sauf en cas de polytraumatismes ou pour certains traumas complexes fortement enracinés. L’utilisation de l’ACS en support permet la mise en place d’un socle thérapeutique solide et fructueux.
Un mois après, lors du cinquième entretien, nous évaluons l’effet du mouvement oculaire sur la problématique du patient, M. X. se dira avoir été extrêmement étonné de ses réactions lors de la séance. Il me présente ses excuses, étant désolé de m’avoir crié dessus, je lui dis qu’il est normal que les choses puissent sortir sous cette forme face à de grandes injustices et qu’il m’arrive régulièrement d’être face à d’intenses réactions de mes patients. Il m’avouera qu’en attendant avant la séance, fort perplexe, il se disait : « je vais faire son truc avec les yeux, ça a l’air de lui faire plaisir... franchement, je n’y croyais pas à ta technique » (je vouvoie M. X. qui oscille entre le vouvoiement et le tutoiement, ce qui est totalement OK pour moi).
Le mouvement oculaire vient entrer dans la douleur traumatique afin de la cibler proprement, la nettoyer et l’aider à cicatriser Et force est de constater qu’il va vraiment mieux, il met en avant qu’il présente beaucoup moins d’anxiété et que de nombreuses fois, il n’a pas eu envie de prendre des chems. Depuis notre dernier rendez-vous, il n’a fait qu’un seul plan qui a duré moins longtemps, il y a pris beaucoup moins de subs tances et même sous leur effet, il était plus en conscience. Il remarque que depuis le début de la thérapie, les fois où il en a pris, il gère de mieux en mieux et arrive même à dire non. Il sent qu’il se rapproche du bout du tunnel et qu’il a plus de force. « Je commence vraiment à m’en sortir. » Il évoque la question de se faire plaisir, il est radicalement sorti de la culpabilité qui y était associée, il arrive même aujourd’hui à se masturber sans se sentir coupable.
Ces avancées l’amènent ce jour à réévaluer son objectif d’arrêt du chemsex, il se pose la question d’aller sur une consommation régulée et décidée à l’avance (toujours accompagner le patient dans son objectif en lui soulignant dans ce cas le danger que cela peut représenter). Nous recoupons ce désir avec l’objectif thérapeutique posé lors du premier entretien : « croire en moi ». En réutilisant l’échelle, nous sommes à 6, et en explorant ce qui nous permettra d’aller vers le 8 désiré afin de finir la thérapie. Il est évident pour mon patient que nous devons nous pencher sur la relation « toxique » qu’il a pu avoir avec son ex, la séparation violente entraînant une consommation non plus sur le mode du plaisir mais sur celui de la fuite afin d’oublier. Nous préparons donc les prochains mouvements oculaires en récoltant ses douleurs autour de la violence de cette relation et de tout ce que cela impliquait.
Au sixième entretien, nous faisons une séance d’EMDR-IMO essentiellement basée sur le vécu de la violence de l’abandon. Le patient est agité mais moins que lors de la première séance, anticipant sûrement mieux les implications de ce travail. La notion de culpabilité d’avoir accepté l’inacceptable émergera au cours de la séance. A la fin de la séance, et une fois l’orage passé, je lui donne à nouveau des instructions d’évaluation des bénéfices. Bénéfices sur la question de la consommation de chemsex et sur la mesure de l’échelle « croire en moi ». Nous prévoyons de nous revoir comme à l’habitude environ un mois après.
À la séance suivante et septième entretien, M. X. met fièrement en avant qu’il n’a pas consommé depuis deux mois et demi. Nous pouvons donc évaluer que le rapport que mon patient entretient au chemsex a radicalement changé, notamment de par le traitement traumatique. En effet, l’abus sexuel et la réaction de ses parents en apprenant son homosexualité (sans jamais avoir eu connaissance de l’abus) avait, comme souvent, amené la découverte du chemsex comme une solution afin de désintriquer le trauma de la dynamique sexuelle, permettant au consommateur de découvrir un espace de plaisir totalement préservé.
La deuxième séance de mouvements oculaires, en touchant le point d’entrée dans une consommation à vocation d’oubli de la douleur amoureuse, a permis de recentrer le patient sur ses besoins et priorités. M. X. va mieux, tellement mieux, il dit : « maintenant je fais attention aux arbres, aux fleurs, au soleil et au jour bleu... ».
Nous nous concentrons sur la mesure des changements et les ancrons par le questionnement EDR (qu’est-ce qui va mieux ? qu’est-ce que cela change ? qu’est-ce que cela permet qui n’était pas possible avant ? comment s’en rend-il compte ? comment les autres pourraient le percevoir ? qu’est-ce que cela dit de lui-même ? pourquoi ? comment ? quoi d’autre ? et quoi encore ?... avec un balayage sur les émotions, les pensées et les actions).
Ce tissage permet un travail intégratif des bénéfices et leur ancrage en profondeur. Il pourra dire à quel point cela a bougé son niveau d’exigence envers lui-même, en acceptant de prendre du plaisir dans la vie. Il m’avouera qu’il était choqué, bien qu’il ait accepté cette tâche donnée au deuxième entretien, par le fait d’avoir le droit de prendre du plaisir. Le fait d’introduire la dimension du plaisir qu’il s’interdisait, en s’appuyant sur son niveau d’exigence, a permis de reconfigurer son rapport à ces deux points.
Il parle d’une renaissance en arrêtant de penser de manière incessante au passé et envisage même de reprendre des études de littérature. La mesure de l’échelle nous amène à un joli 8,5 qui lui permet de croire en lui et d’être son meilleur allié. La thérapie a bien atteint son objectif selon lui. Nous prévoyons une dernière séance dans deux mois afin de finaliser en sécurité toutes ses avancées.
Sur ce dernier et huitième entretien, M. X. n’a toujours pas refait de chemsex. Il a compris que le moteur de ses consommations était la honte et la culpabilité (sentiments souvent présents dans les traumas sexuels). Il évoque un mouvement intérieur profond, une guérison qu’il n’avait jamais pensé possible ni envisageable. Non seulement aujourd’hui il s’accepte mais se trouve enfin beau, me disant : « tu as guéri mon intime ». Le dernier entretien offre au thérapeute cette image magnifique de l’alignement de la personne ; l’alignement de ses actions sur ses intentions et ses valeurs, ainsi que celui de ses pensées, ses émotions et ses actions. Nous mesurons et ancrons avec les outils de l’ACS afin de le laisser reprendre plus légèrement le cours de sa vie, parvenant désormais à croire en lui.
NOTES
1. ACS : Approche Centrée Solution ;
EMDR :Eye Movement Desensitization and Reprocessing ;
IMO : Intégration par les Mouvements Oculaires.
EMDR - IMO: (appelée aussi EMDR Intégrative) développée par Laurent GROSS dans les années 2007
2. CSAPA : Centre de Soin, d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie pour la Prise en Charge
SOPHIE TOURNOUËR Psychologue clinicienne, thérapeute familiale et de couple. Hypnothérapeute, spécialisation en psychotraumatisme.
Formatrice et superviseur au CHTIP COLLÈGE D’HYPNOSE ET THÉRAPIES INTÉGRATIVES DE PARIS, à l’Institut INDOLORE, à l’Institut HYPNOTIM.. Elle est Membre de France EMDR IMO.
Elle est formatrice entre autre sur l'Approche Centrée Solution dans le cadre du CHEMSEX.
Diffusé par hypnose-ericksonienne.org
Nous voyons apparaître, au vu du plaisir dé* Ployé et de l’endurance obtenue lors de ces contextes, des addictions rapidement ancrées surtout en cas d’injection (« slam »).
Cette pratique devient un enjeu de santé publique même si l’utilisation de la Prophylaxie pré-exposition (PrEP) permettant une prévention des contaminations au VIH est usuelle. Une consultation gratuite et spécialisée chemsex m’est confiée au CSAPA (2) du centre Monceau.
Monsieur X., la trentaine, se présente à ma consultation chemsex, il pleure énormément en parlant de cette tristesse inconsolable, d’une envie de mourir et des traumatismes subis au cours de sa vie (abus sexuels par sa nounou sur plusieurs années lors de sa petite enfance, rejet parental dû à son homosexualité, agression physique par son ex avec qui il est tombé, il y a deux ans, dans le slam, pratique qui consiste à s’injecter des produits de synthèse).
Ayant traversé les océans pour rejoindre la France, passionné de littérature, il a fait des études de comptabilité afin de plaire à son père. Pourtant, il ne rêve que d’écrire et n’est venu ici que pour fuir le jugement et s’épanouir dans son identité HsH assumée. Dès son arrivée il y a trois ans, il trouve un travail en lien avec son diplôme, rencontre un homme dont il tombe fou amoureux et fait la connaissance du chemsex. Ils vont le pratiquer ensemble dès le début de leur relation avec de multiples partenaires. Et après une rupture douloureuse, il maintient cette habitude désormais hebdomadaire et indésirable.
Sur ce premier entretien, il est extrêmement agité, il parle de la déception qu’il a infligée à son père, homme très religieux et de ses phrases qu’il ne parvient pas à effacer : « Je ne peux accepter d’avoir un fils gay, tu peux oublier que tu as une famille... » Il se remémore également la prise de distance de sa mère et se sent coupable de tout cela.
Dès son arrivée , il trouve un travail en lien avec son diplôme, rencontre un homme dont il tombe fou amoureux et fait la connaissance du chemsex. Après évaluation, il ne présente pas de risque suicidaire et je lui évoque la technique de mouvements oculaires indéniablement utile en cas de psychotraumatisme. S’il décide de revenir, nous pourrons envisager ce traitement s’il en est désireux suite à la présentation de cette méthode. Le fait d’atteindre l’objectif formulé : « je veux croire en moi » permettra selon lui l’arrêt du chemsex qui est devenu désormais le danger à éviter. Croire en lui permettra aussi d’entamer des études de littérature et de « se sentir capable de vivre ».
Au travers du modèle Approche Centrée Solution (ACS) – mon socle de référence depuis de nombreuses années – il est pratiquement toujours possible dès le premier entretien de définir l’objectif des patients rencontrés (l’objectif étant affinable, modulable, réorientable), en commençant en parallèle à tenter une activation des ressources qui soit la plus efficace possible. Activation se devant d’être respectueuse du patient et de sa temporalité, afin qu’il puisse parvenir à dire un jour qu’il n’a plus besoin d’un travail thérapeutique. De plus, la dimension des exceptions au problème est centrale dans ce modèle et son exploration stratégique permet généralement des bénéfices rapides chez le patient.
Lors du deuxième entretien, nous regardons comment nous pouvons commencer à agir sur la consommation de chemsex de M. X. et explorons donc les moments où la consommation le laisse un peu plus tranquille (externalisation pour le sortir de cette identité de « chemsexeur »).
Nous trouvons notamment que l’emploi alimentaire qu’il occupe actuellement l’amène certaines fois à travailler le week-end, ce qui diminue la consommation. Nous convenons qu’il lui est possible (toujours demander l’autorisation du patient) de s’organiser pour travailler sur plus de week-ends, ce qui im* Pactera la fréquence des plans chemsex. Par le suivi que nous entamons, impliquant un regard extérieur, il a pu ne rester que seize heures sur le dernier plan à la place des deux jours habituels.
En observant ce qu’il a fait différemment sur les moments préservés, nous remarquons qu’il lit plus, qu’il a étudié certains textes, s’est fait à manger... M. X., toujours très fragile, aborde sa vie en observant des obligations qu’il se donne sans jamais s’autoriser à prendre du plaisir dans son quotidien. En explorant les bénéfices avec la technique d’Exception-Différence-Relation (EDR modèle ACS) nous obtenons un épaississement de ses compétences (neuroplasticité cérébrale permettant l’utilisation de nouveaux chemins neuronaux). Cela permet également de commencer à décaler le patient de l’intrication identitaire à la consommation. En fin d’entretien, nous convenons d’une tâche d’observation des moments où il parvient à ne pas consommer, à retarder ou abréger un plan. De plus, il accepte une tâche (paradoxale dans le sens de le contraindre au plaisir) qui l’amènera à réserver une heure par jour pour faire des activités lui faisant plaisir.
Nous ferons lors du troisième entretien, environ un mois après, un état des lieux concernant les points d’avancée malgré les difficultés, afin de solidifier et encourager ce qui existe déjà. Nous évaluons aussi les tâches afin de réaxer le travail thérapeutique. Nous pouvons déjà noter des ressources qui s’étoffent et permettent de commencer à mettre le patient sur la voie de l’espoir. M. X. met en avant qu’il réalise avoir fait un pas sur le fait d’être conscient, qu’il voit les points à changer et remarque que la tâche de prendre du plaisir lui a imposé quelque chose qu’il s’interdisait, qui pourtant lui fait du bien, le connecte à lui-même et lui permet d’accompagner la réduction de consommation.
Le chemsex est encore d’actualité mais a fortement diminué... Nous évaluons l’échelle que nous avions posée dès le premier entretien autour de « croire en moi ». Il évalue être à 4/10 sur l’échelle alors qu’il était à 0,5 au premier entretien. Il estime qu’une fois arrivé à 8 sur cette échelle, cela indiquera que notre travail est terminé. Nous en profitons pour épaissir les bénéfices déjà obtenus grâce à la technique EDR ci-dessus évoquée (qu’est-ce que cela change ? comment le remarquez-vous ? comment cela bouge vos pensées, émotions, actions ? qu’est-ce que cela permet qui n’était pas possible avant ?...) = Neuroplasticité cérébrale.
Nous affinons la préparation de la séance d’EMDR - IMO (en plus des notes prises avec son autorisation lors du premier entretien). J’explique le fonctionnement d’une séance, son protocole et préviens des effets secondaires possibles (fatigue, nausée, vomissement, diarrhée, pleurs, colère...). J’insiste sur le fait que cette séance risque d’être extrêmement remuante pour lui, au vu de l’ancienneté et de la place du trauma dans sa structuration psychique. Elle est prévue d’un commun accord au prochain entretien.
Le jour de la séance, ou quatrième entretien. A partir de mes notes, en l’invitant à suivre les mouvements avec ses yeux sans bouger la tête, je lui pose entre chaque mouvement la même question : « qu’est-ce qui vient ? ». En lui ayant précisé auparavant que cela peut être une pensée, une émotion, une sensation, une image, une phrase, un souvenir, un ressenti corporel... Et que nous prenons ce qui vient spontanément.
A l’inverse de mon modèle Socle Orienté Solution, le mouvement oculaire vient entrer dans la douleur traumatique afin de la cibler proprement, la nettoyer et l’aider à cicatriser. Je reprendrai les phrases de mon patient sans modification aucune et l’inviterai pour chacune à pouvoir les répéter dans sa langue maternelle (ce que je fais avec chaque patient qui n’a pas eu comme première langue le français car cela me semble plus propice à « déboulonner » le trauma). Ces phrases formulées telles que son père a pu lui exprimer ou de la manière dont il se dit les choses intérieurement sont notées précisément sans que j’y introduise le moindre changement.
La séance va demander une présence analogique et un étayage forts, tout en veillant à être à la bonne distance, notamment par des mots de soutien (Digital) accompagnés d’un regard bienveillant (Analogique) face à l’émotionnel blessé de mon patient qui prendra une dimension explosive au cours de la séance. Nous utiliserons ci-dessous « MO » pour indiquer chaque fois que nous effectuons des mouvements oculaires.
Je m’assois comme toujours en décalé face à mon patient afin de pouvoir faire les mouvements et prendre des notes sur mon carnet. Nous testons la distance par rapport à ses yeux. Certaines phrases sont répétées plusieurs fois à la suite lors du mouvement.
- Thérapeute : MO + « Mes parents n’acceptaient pas que je sois homosexuel, ils n’ont que la religion dans la tête.
- Patient : Je déteste mon père.
- Th. : MO + « Il me regarde comme un possédé (rebondir avec une phrase récoltée lors de la préparation de la séance).
- P. : Ils ne sont jamais contents de moi, comme si j’étais perdu (M. X. s’agite, il bouge sur son fauteuil).
- Th. : C’est comment dans le corps ?
- P. : Je me sens coincé.
- Th. : Respirez ! Les mains, les pieds, des sensations particulières ? (les patients y ressentent souvent des picotements ou autres sensations lorsque l’on cible bien le trauma).
- P. : Lourd et chaud.
- Th. : OK, on reprend. MO + « Tu peux oublier que tu as une mère...
- P. : Elle a pris ses distances avec moi, je souffre ! (M. X. se met à pleurer).
- Th. : MO + « Je ne peux accepter d’avoir un fils gay, tu peux oublier que tu as une famille...
- P. : Mon père m’a traité de pédé et de fauxcul, je n’oublierai jamais son regard... (M. X. bouge énormément, il pleure et se mouche beaucoup).
- Th. : Je sais que c’est très difficile pour vous de repasser par ces moments, courage, on continue... MO + « Tu es égoïste, tu ne penses qu’à toi...
- P. : Je n’ai pas de famille, je n’aurai jamais de famille (il s’effondre, crie dans sa langue maternelle des insultes adressées à son père).
- Th. : Voulez-vous que je me retourne ? (analogique afin de ne pas lui imposer mon regard).
- P. : Je ne supporte pas qu’on me regarde dans cet état ! (dit-il agressivement, me criant dessus au milieu des larmes et de la morve coulant sur son visage).
Je me retourne en lui demandant s’il veut un verre d’eau.
- P. : Je veux arrêter et partir.
Il se lève dans une agitation qu’il ne peut contrôler, le visage décomposé, en criant des insultes dans sa langue maternelle.
- Th. : Désolée, comme je vous l’avais dit, nous devons continuer afin de traiter le psychotrauma ; maintenant que nous avons ouvert la brèche, il ne serait pas raisonnable de vous laisser partir comme cela. Accrochez-vous... (le soutien doit être infaillible à cet instant afin d’étayer le patient).
- P. : Je me laisse violer, je ne sais pas ce qu’est d’être un enfant “grâce” à cette baby-sitter !
Il se rassoit en acceptant de continuer.
- Th. : Oui, ce que vous avez vécu est totalement injuste... (acceptation de cette réalité traumatique). Courage, nous nous y remettons... MO + « Ils ne sont jamais contents de moi, c’est comme si j’étais perdu.
- P. : Je ne vis que pour les autres, je veux arrêter. Je veux accepter que ce que j’aime et pas pour faire plaisir aux autres... »
La séance durera 45 minutes, M. X. est épuisé et démoralisé, d’où l’importance de prévenir en amont les patients de l’après-séance, des conséquences possiblement difficiles sur plusieurs jours, de pouvoir prévoir quelqu’un de ressource et de l’importance d’aller se reposer après. De nombreux patients chemsexeurs m’ont signalé une sensation identique à une prise de kétamine à la sortie d’une séance d’EMDR-IMO. (Certains ont même pu dire avec humour : « merci pour la défonce gratos ! ».) Mon action en mouvements oculaires étant généralement extrêmement ciblée, elle ne nécessite normalement qu’une séance, sauf en cas de polytraumatismes ou pour certains traumas complexes fortement enracinés. L’utilisation de l’ACS en support permet la mise en place d’un socle thérapeutique solide et fructueux.
Un mois après, lors du cinquième entretien, nous évaluons l’effet du mouvement oculaire sur la problématique du patient, M. X. se dira avoir été extrêmement étonné de ses réactions lors de la séance. Il me présente ses excuses, étant désolé de m’avoir crié dessus, je lui dis qu’il est normal que les choses puissent sortir sous cette forme face à de grandes injustices et qu’il m’arrive régulièrement d’être face à d’intenses réactions de mes patients. Il m’avouera qu’en attendant avant la séance, fort perplexe, il se disait : « je vais faire son truc avec les yeux, ça a l’air de lui faire plaisir... franchement, je n’y croyais pas à ta technique » (je vouvoie M. X. qui oscille entre le vouvoiement et le tutoiement, ce qui est totalement OK pour moi).
Le mouvement oculaire vient entrer dans la douleur traumatique afin de la cibler proprement, la nettoyer et l’aider à cicatriser Et force est de constater qu’il va vraiment mieux, il met en avant qu’il présente beaucoup moins d’anxiété et que de nombreuses fois, il n’a pas eu envie de prendre des chems. Depuis notre dernier rendez-vous, il n’a fait qu’un seul plan qui a duré moins longtemps, il y a pris beaucoup moins de subs tances et même sous leur effet, il était plus en conscience. Il remarque que depuis le début de la thérapie, les fois où il en a pris, il gère de mieux en mieux et arrive même à dire non. Il sent qu’il se rapproche du bout du tunnel et qu’il a plus de force. « Je commence vraiment à m’en sortir. » Il évoque la question de se faire plaisir, il est radicalement sorti de la culpabilité qui y était associée, il arrive même aujourd’hui à se masturber sans se sentir coupable.
Ces avancées l’amènent ce jour à réévaluer son objectif d’arrêt du chemsex, il se pose la question d’aller sur une consommation régulée et décidée à l’avance (toujours accompagner le patient dans son objectif en lui soulignant dans ce cas le danger que cela peut représenter). Nous recoupons ce désir avec l’objectif thérapeutique posé lors du premier entretien : « croire en moi ». En réutilisant l’échelle, nous sommes à 6, et en explorant ce qui nous permettra d’aller vers le 8 désiré afin de finir la thérapie. Il est évident pour mon patient que nous devons nous pencher sur la relation « toxique » qu’il a pu avoir avec son ex, la séparation violente entraînant une consommation non plus sur le mode du plaisir mais sur celui de la fuite afin d’oublier. Nous préparons donc les prochains mouvements oculaires en récoltant ses douleurs autour de la violence de cette relation et de tout ce que cela impliquait.
Au sixième entretien, nous faisons une séance d’EMDR-IMO essentiellement basée sur le vécu de la violence de l’abandon. Le patient est agité mais moins que lors de la première séance, anticipant sûrement mieux les implications de ce travail. La notion de culpabilité d’avoir accepté l’inacceptable émergera au cours de la séance. A la fin de la séance, et une fois l’orage passé, je lui donne à nouveau des instructions d’évaluation des bénéfices. Bénéfices sur la question de la consommation de chemsex et sur la mesure de l’échelle « croire en moi ». Nous prévoyons de nous revoir comme à l’habitude environ un mois après.
À la séance suivante et septième entretien, M. X. met fièrement en avant qu’il n’a pas consommé depuis deux mois et demi. Nous pouvons donc évaluer que le rapport que mon patient entretient au chemsex a radicalement changé, notamment de par le traitement traumatique. En effet, l’abus sexuel et la réaction de ses parents en apprenant son homosexualité (sans jamais avoir eu connaissance de l’abus) avait, comme souvent, amené la découverte du chemsex comme une solution afin de désintriquer le trauma de la dynamique sexuelle, permettant au consommateur de découvrir un espace de plaisir totalement préservé.
La deuxième séance de mouvements oculaires, en touchant le point d’entrée dans une consommation à vocation d’oubli de la douleur amoureuse, a permis de recentrer le patient sur ses besoins et priorités. M. X. va mieux, tellement mieux, il dit : « maintenant je fais attention aux arbres, aux fleurs, au soleil et au jour bleu... ».
Nous nous concentrons sur la mesure des changements et les ancrons par le questionnement EDR (qu’est-ce qui va mieux ? qu’est-ce que cela change ? qu’est-ce que cela permet qui n’était pas possible avant ? comment s’en rend-il compte ? comment les autres pourraient le percevoir ? qu’est-ce que cela dit de lui-même ? pourquoi ? comment ? quoi d’autre ? et quoi encore ?... avec un balayage sur les émotions, les pensées et les actions).
Ce tissage permet un travail intégratif des bénéfices et leur ancrage en profondeur. Il pourra dire à quel point cela a bougé son niveau d’exigence envers lui-même, en acceptant de prendre du plaisir dans la vie. Il m’avouera qu’il était choqué, bien qu’il ait accepté cette tâche donnée au deuxième entretien, par le fait d’avoir le droit de prendre du plaisir. Le fait d’introduire la dimension du plaisir qu’il s’interdisait, en s’appuyant sur son niveau d’exigence, a permis de reconfigurer son rapport à ces deux points.
Il parle d’une renaissance en arrêtant de penser de manière incessante au passé et envisage même de reprendre des études de littérature. La mesure de l’échelle nous amène à un joli 8,5 qui lui permet de croire en lui et d’être son meilleur allié. La thérapie a bien atteint son objectif selon lui. Nous prévoyons une dernière séance dans deux mois afin de finaliser en sécurité toutes ses avancées.
Sur ce dernier et huitième entretien, M. X. n’a toujours pas refait de chemsex. Il a compris que le moteur de ses consommations était la honte et la culpabilité (sentiments souvent présents dans les traumas sexuels). Il évoque un mouvement intérieur profond, une guérison qu’il n’avait jamais pensé possible ni envisageable. Non seulement aujourd’hui il s’accepte mais se trouve enfin beau, me disant : « tu as guéri mon intime ». Le dernier entretien offre au thérapeute cette image magnifique de l’alignement de la personne ; l’alignement de ses actions sur ses intentions et ses valeurs, ainsi que celui de ses pensées, ses émotions et ses actions. Nous mesurons et ancrons avec les outils de l’ACS afin de le laisser reprendre plus légèrement le cours de sa vie, parvenant désormais à croire en lui.
NOTES
1. ACS : Approche Centrée Solution ;
EMDR :Eye Movement Desensitization and Reprocessing ;
IMO : Intégration par les Mouvements Oculaires.
EMDR - IMO: (appelée aussi EMDR Intégrative) développée par Laurent GROSS dans les années 2007
2. CSAPA : Centre de Soin, d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie pour la Prise en Charge
SOPHIE TOURNOUËR Psychologue clinicienne, thérapeute familiale et de couple. Hypnothérapeute, spécialisation en psychotraumatisme.
Formatrice et superviseur au CHTIP COLLÈGE D’HYPNOSE ET THÉRAPIES INTÉGRATIVES DE PARIS, à l’Institut INDOLORE, à l’Institut HYPNOTIM.. Elle est Membre de France EMDR IMO.
Elle est formatrice entre autre sur l'Approche Centrée Solution dans le cadre du CHEMSEX.
Diffusé par hypnose-ericksonienne.org
Catégories: Hypnose Ericksonienne Thérapie Brève